Expérience pionnière, la reconversion de la caserne de Bonne à Grenoble a permis de créer un écoquartier parmi les plus aboutis de France. Cette friche militaire de 8,5 ha, en limite sud du centre-ville, abandonnée par les militaires en 1994, est devenue en quelques années un laboratoire à ciel ouvert de l’habitat écosensible. Au premier rang des priorités, la lutte contre l’étalement urbain : « Le quartier devait offrir un espace résidentiel dense mais aussi attractif pour convaincre les gens qui aujourd’hui préfèrent habiter en périphérie dans une maison individuelle de rester dans un appartement au centre de Grenoble », explique l’urbaniste Christian Devillers, lauréat en 2002 du marché de définition lancé par la Ville et l’Armée sur le site.
La réponse apportée par le quartier : un modèle de ville à la fois compact et végétal, combinant densité et qualité des espaces publics, avec deux bandes bâties articulées autour d’un parc central de 3,5 ha. Cet espace, décomposé en trois séquences, sert de passerelle entre le passé militaire du site et son devenir urbain. « On retrouve à peu près les mêmes plans dans toutes les casernes, explique la paysagiste Jacqueline Osty, choisie sur concours en 2003. En particulier, l’ordonnancement de la cour d’honneur a dicté ici la composition d’un parvis mi-végétal mi-minéral, bordé par des mails plantés le long des façades et pointé sur l’ancien bâtiment de l’état-major. »
Affirmant la centralité nouvelle du quartier, le parvis est relié à l’est au parc Hoche et sera prolongé vers l’ouest courant 2010 par le jardin des Vallons, qui réutilisera les déblais de chantier : « Nous avons imaginé des surfaces légèrement en creux par rapport aux allées pour créer une rétention pour les pluies d’orage avant de temporiser pour l’infiltration », explique Jacqueline Osty. « Poumon vert » du quartier, cette armature établit de nouvelles continuités piétonnes dans le tissu urbain, à proximité des grands boulevards, requalifiés par l’aménagement du tramway en 2006. Elle aère aussi un tissu voulu compact, avec une densité dépassant les 100 logements à l’hectare. Les bâtiments résidentiels, aux trois-quarts réalisés, composent au sud une série d’îlots en U, ouverts sur le parc central.
Totalisant 600 logements sur les 850 du quartier, cette bande résidentielle est l’un des points remarquables du projet urbain.
Confort thermique
Par le biais des prescriptions architecturales et environnementales, la Ville a pu imposer aux promoteurs et aux bailleurs sociaux différentes exigences. Qualité architecturale tout d’abord, avec des logements traversants, l’interdiction d’utiliser le PVC ou encore des prolongements extérieurs (balcons, loggias, terrasses) pour chaque logement. Qualité d’enveloppe et de systèmes ensuite : grâce aux financements (2,7 millions d’euros) issus du concours européen Concerto, les surcoûts d’études liées à la performance environnementale des bâtiments ont pu être amortis. Isolation par l’extérieur, solaire thermique, cogénération, double vitrage gaz argon, toitures végétalisées… Ce panel, inspiré des expériences scandinaves, concernait au départ les 439 logements désignés par Concerto. Il a finalement été étendu à l’ensemble des constructions neuves : « En 2003, quand ont été négociées les premières charges foncières, l’objectif était de réduire de 50 % la consommation énergétique des logements par rapport à la réglementation thermique 2000, alors en vigueur. Cela correspond aux performances atteintes aujourd’hui par les bâtiments labellisés BBC (bâtiments basse consommation) », explique Valérie Dioré, directrice de la Sages, l’aménageur en charge de la ZAC (lire page suivante).
Un confort thermique ouvert au plus grand nombre. En dehors des 35 % de logements sociaux et d’accession construits sur l’ancienne caserne, « il y a aussi quelque chose de très original que la municipalité avait demandé : 50 % des programmes ont été vendus à un prix bloqué, soit environ 2 800 euros le m² », explique le promoteur Bruno Blain. Cette mixité va de pair avec des fonctions diversifiées. Conçu comme une extension du centre-ville, le quartier accueillera au premier trimestre 2010 une galerie commerciale de plus de 16 000 m², conçue par Groupe-6 architectes et tout juste rachetée par le promoteur Soderip. Cet investissement de plus de 85 millions d’euros combinera la réhabilitation d’éléments remarquables de patrimoine au recours massif aux énergies renouvelables, avec des panneaux photovoltaïques intégrés en toitures et un rafraîchissement par captage sur nappe. Un standard finalement sur la ZAC de Bonne.