Pins, bouleaux, bruyères, haies d’ajoncs, fougères… Nous sommes porte de Vanves. La couverture du boulevard périphérique prend un air de forêt de Fontainebleau ! Coulage de la dalle du belvédère, implantation de l’abri en bois pour le gardien, installation de rambardes, de bancs, du revêtement en bois du solarium… L’entreprise Segex met la dernière main au chantier avant les plantations de novembre 2012, l’ouverture au public étant prévue début 2013. Pour recréer ces paysages typiques des landes d’Île-de-France sur une dalle en béton chahutée de 6 000 m2, l’agence Arpentère des architectes paysagistes Marie France et Thibault de Metz n’a pas seulement joué sur la palette végétale. Elle a poussé le souci du détail jusqu’à reconstituer, en affleurements, les célèbres rochers de grès ocre de Fontainebleau.
Accidenter le terrain
La plaine centrale, bordée de sous-bois acides plantés de bouleaux, de pins et, en strate basse, de petits houx, paraît plus vraie que nature. Le sol, semé d’îlots végétalisés, est rythmé par une vingtaine de rochers fabriqués in situ par Aqua Roc Décor, sur les indications d’Arpentère. L’agence en a déterminé le nombre, l’emplacement, la surface et la couleur. Pour rehausser le côté naturel, de gros troncs de chêne, épars ou en tas, ont été couchés çà et là sur le sol. « Les rochers bas s’étalent en dalles irrégulières, précise Nicolas Galin, chargé du suivi du projet et du chantier pour Arpentère. Ils alternent avec des éléments hauts de quelques dizaines de centimètres pour accidenter le terrain, l’emploi de vrais rochers, très lourds, étant impossible en raison de charges que la dalle de couverture n’aurait pas supportées. » Leur structure est réalisée par les équipes Segex de Rémi Laforge, le conducteur de travaux. Constituée d’une forme en graves armée, elle est ensuite équipée d’un treillis soudé sur lequel Thierry Perrot, dirigeant d’Aqua Roc Décor, et Alexandre Denant, qui l’assiste, projettent une première couche de béton architectonique. Le produit, teinté dans la masse, a l’avantage de supporter le vieillissement et les petites dégradations, sans altération sensible de la couleur. « Nous réalisons une seconde couche de 5 cm, talochée pour obtenir les formes définitives, qui sont ensuite grattées à la truelle et à la brosse pour imiter le grain des rochers », précise Thierry Perrot. Reste les finitions : projection d’une peinture aux pigments naturels pour vieillir l’ocre de la masse et rester cohérent avec l’ensemble des rochers et le futur stabilisé, avant une ultime précaution consistant à appliquer un vernis de protection.
Un semis de 31 chaises
Ce chantier sur dalle oblige à une organisation rigoureuse, notamment au niveau de l’utilisation des matériels, les charges supportables par la dalle étant différentes en fonction des zones de travail. « Nous avons réalisé ces aménagements à l’avancement, en ayant recours à des remblais allégés avec des billes d’argile expansée et des graves recyclées de chantier, traitées à la chaux », explique Rémi Laforge. Ces matériaux ont été mis en œuvre selon leurs spécificités, grâce à un compartimentage des différentes zones, créant ainsi des boîtes délimitées par des treillis soudés et plastifiés. L’approvisionnement du chantier en remblais a été assuré par une mini-flotte de chargeuses faisant la navette entre les semi-remorques garés à l’extérieur et les différentes zones de la dalle. La dernière touche de l’aménagement portera enfin sur ce que Cécile Planchais, designer, appelle « un semis de chaises » : trente et une au total ! Métalliques, de forme très épurée et pesant chacune 40 kg, ces dernières ont déjà été installées à Bruxelles, mais dans une version sonorisée que la ville de Paris n’a pas retenue pour ce jardin.