Présidentielle 2022 : les candidats face aux entrepreneurs des Travaux publics

Les principaux candidats à l'élection présidentielle ont répondu à l'invitation de la FNTP : dans le cadre du Forum des Travaux Publics "Investir la transition écologique" au Grand Palais Ephémère à Paris, ils s'expriment sur leur vision pour les infrastructures de demain. LeMoniteur.fr vous propose de suivre en direct les débats.

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Le Grand Palais Ephémère
Le Forum des Travaux Publics 2022, le 24 février, a pour thème "Investir la transition éocologique".

Ils sont 4. Quatre candidats à la magistrature suprême à passer ce jeudi 24 janvier leur "grand oral" sur le thème des infrastructures et de la décarbonation devant les entreprises de Travaux publics réunies par la FNTP au Grand Palais Ephémère de Paris pour le Forum 2022.

Anne Hidalgo et Valérie Pécresse en chair et en os et, par vidéo interposée, Marine Le Pen et...Emmanuel Macron se sont succédés à la tribune. Voici leurs principales déclarations.

"Nous sortons de cinq années de panne de construction dans le logement et de plan d’infrastructures", Anne Hidalgo (PS)

Sur l'éolien : « Comment faire retomber les oppositions aux éoliennes ? Dans des communes, dans la Somme notamment, une régie publique redistribue ses bénéfices en bons d’achat à dépenser dans les commerces locaux. Cela permet d’embarquer la population. Quand des grands groupes arrivent sur un territoire, prennent de grands espaces et imposent quelque chose d’extérieur, cela génère des inquiétudes sur le paysage. Je suis pour l’éolien offshore, mais je ne nie pas les problèmes soulevés par les pêcheurs. »

Sur les appels à projets qui se multiplient : « L’appel à projet n’est pas la bonne méthode. Les candidats passent des heures et des heures sur un projet qui ne sera jamais la généralisation pour accélérer le pas vers la transition écologique. Et à la fin, il y a très peu d’élus. La solution ? Partir des régions, dont les présidents sont les vrais ministres de la construction. Il faut leur donner la possibilité d’animer la vie économique. En plus, ils ont la compétence en matière de formation. Un regret : le plan de relance n’a pas été orienté ainsi. Il reste une vingtaine de milliards d’euros. En plus des 50 milliards d’euros de financements nouveaux prévus dans mon programme. Si on n’investit pas massivement, on laissera aux jeunes une dette économique et une dette écologique. En investissant, ils auront la dette écologique en moins. »

Sur la "société décarbonée" : « Il faut une mobilisation générale qui parte d’une volonté politique sans atténuation possible en attirant les citoyens, les syndicats, le monde économique… Dans mon programme, quatre odyssées industrielles comme les ENR et les mobilités illustrent ma méthode pour embarquer la société française vers une société décarbonée, qui continue de créer de la valeur moins impactante pour l’environnement. Outre l’appareil de formation pour accompagner le capital humain, cela suppose des investissements publics massifs. Or, nous sortons de cinq années de panne de construction dans le logement et de plan d’infrastructures. Le pouvoir pendant ce quinquennat n’a pas fait confiance aux collectivités territoriales. »

Sur le nucléaire : « Je souhaite maintenir le nucléaire jusqu’à ce qu’on puisse s’en passer. Aucun compromis sur ce besoin de maintenir notre activité économique. Mais le parc nucléaire est vieillissant. Il faudra investir pour le grand carénage et instaurer une grande discussion transparente entre les citoyens, les parlementaires et l’Autorité de sûreté nucléaire. A condition de parler des sujets à régler, comme la gestion des déchets, le site de Bure (Meuse)… ainsi que de la dépendance à l’uranium que nous n’avons pas en France et qui va devenir rare dans les années qui viennent. Il faudra faire le choix d’un mix énergétique qui nous permette d’avancer dans une croissance plus juste. »

« Contre la décentralisation, pour une politique déconcentrée », Marine Le Pen (RN)

Sur le nucléaire : « Les acquis que nous avons, nous sommes presque en train de les perdre, car nous n’investissons pas dans la capacité nucléaire, nous la laissons s’abîmer. Le sujet de l’énergie est majeur, il s’est invité dans le débat. Un sujet d’avenir fondamental puisque notre capacité de réindustrialisation, de relocalisation, en dépend. Nous sommes une grande nation, qui a de grands besoins en termes de production. On va devoir construire, et rallonger la durée de vie de nos centrales. Il faut un grand plan d’investissement dans ce domaine. La transition écologique ce n’est pas que le nucléaire, j’avais dit en 2004 que nous serions les rois du pétrole si nous maitrisions l’hydrogène. »

Sur le développement de l’éolien : « Arrêter cette folie qui coûte une fortune aux Français (4,5 mds€/ an de subvention). C’est une énergie intermittente, qui ruine nos paysages. »

Sur un grand plan d’investissement pour les infrastructures : « Nous sortirons des problèmes planétaires liés à l’environnement par les technologies. Réduire la vie, l’activité, pour protéger la planète est un mauvais choix. Je suis pour le lancement de grands investissements, via la création d’un fonds souverain. Il sera abondé par les Français, qui deviendront actionnaires de la Maison France. Ce fonds aura des priorités : investissements dans la technologie, la réindustrialisation, la couverture numérique, la R&D et les infrastructures… Il aura vocation à apporter des fonds propres aux entreprises stratégiques, à relocaliser l’économie. Nous devons être un pays qui ne laisse pas ses équipements se dégrader. Typiquement, le fonds souverain aura vocation à investir dans la réparation  de nos conduites d’eau, c’est rentable et ça permet d’éviter ce gaspillage. Je vise 500 Mds € à 5 ans, étant entendu que ce fonds montera en puissance. Les premiers investissements pourraient être réalisés immédiatement dans les infrastructures, car l’aménagement du territoire est un axe prioritaire. La nationalisation des autoroutes permettra d’aménager le pays. L’Etat a sa place dans la défense du patrimoine des Français, ce ne sont pas aux concessionnaires d’autoroute de réfléchir à l’aménagement du territoire. »

Sur l’aménagement du territoire et la décentralisation : « Je suis de plus en plus opposée à la décentralisation. Je suis plus pour la déconcentration. C’est à l’Etat d’avoir une vision haute de l’aménagement du territoire. En matière d’aménagement du territoire, les sommes en jeux sont telles que seul l’Etat, la CDC ou un fonds souverain sont capables de les mobiliser. Et il n'y a que l’Etat qui est capable de savoir quoi faire. Lui seul peut permettre d’éviter les différences trop fortes entre les départements. »

« Je veux un comité de la hache, pour réduire les normes de moitié », Valérie Pécresse (LR)

Sur les investissements dans les infrastructures : « Je ne crois pas à la stratégie de décroissance et de "démobilité". Il faut croître, produire beaucoup mieux et plus sobrement, en innovant et en travaillant sur la compétitivité des entreprises. Un grand plan d’infrastructures est nécessaire en France, pour désenclaver les territoires. Un audit des ouvrages, des routes et des ponts devra être mené, parce que je ne veux pas d’un drame comme à Gênes.»

Sur les grands projets : « Le TGV est un outil extrêmement puissant pour relier les territoires, attirer les entreprises et de nouveaux habitants. L’audit permettra de prioriser les grands projets à relancer, je pense par exemple à la LGV Bordeaux-Toulouse, à la ligne Paris-Normandie, à la desserte de Nice, des Pays de la Loire… Cela devra se faire en dialoguant avec les régions, afin en outre de rendre les projets plus acceptables. J’ai une idée un peu iconoclaste pour financer cela : fusionner le livret A et le livret développement durable en un livret vert. Nous récupérerions ainsi 130 milliards d’euros qui seraient fléchés sur le grand plan d’infrastructures et la transition écologique. »

Sur la renationalisation des autoroutes : « Renationaliser les autoroutes à quelques années de la fin des concessions n’aurait aucun sens économiquement. L’Etat doit veiller à la modération des tarifs des péages, et surtout négocier avec les concessionnaires pour voir comment ils peuvent participer à la construction de la route de demain, répondant à des nouveaux usages comme les véhicules autonomes ».

Sur le nucléaire : « Les impératifs de souveraineté énergétique et de transition écologique impliquent d’aller vers le bas carbone et donc vers le nucléaire. Je propose de construire 6 EPR pour 2035. En parallèle il faut travailler sur la réduction de la consommation énergétique et la rénovation énergétique des bâtiments. »

Sur les normes et la multiplicité des recours : « Je veux un vrai choc de simplification. Tout d’abord, en divisant par deux, dans le droit, la durée de toutes les procédures, et en créant des autorisations implicites. Il faut une obligation de résultat sur les délais pour l’administration. Ensuite, j’augmenterai le budget de la justice de 50 % notamment pour recruter des magistrats, car la durée des contentieux est inadmissible. Je souhaite labelliser les projets : ceux qui seront labellisés d’intérêt national, régional, départemental devraient bénéficier de délais accélérés, en fusionnant des procédures par exemple. Et, pourquoi pas, décider que le Conseil d’Etat statuera sur les projets d’intérêt national en premier et dernier ressort pour aller plus vite. Quant aux normes, il faut un comité de la hache, pour réduire les normes de moitié et remédier aux surtranspositions, dans le Code de la commande publique ou celui de la construction par exemple. Il faudrait aussi que les départements et régions puissent supprimer des normes localement pour libérer l’innovation. »

« J’attends de vous que vous embauchiez et que vous formiez », Emmanuel Macron

Bilan du quinquennat : « Malgré les crises, nous n’avons pas stoppé les investissements et nous avons même relancé. Au total, près 37,5 milliards ont été engagés dans les infrastructures pendant le quinquennat, ce qui a permis de donner une visibilité. »

Emplois dans les TP : « En sortie de crise, on doit continuer de relancer l’économie donc j’attends de vous que vous embauchiez et que vous formiez. Dans les travaux publics, il va y avoir des opportunités pour les jeunes. Aux entreprises de bien utiliser l’argent prêté. »

Remboursement des PGE : « Sur le PGE, on n’a pas aidé les entreprises pour qu’elles aient des difficultés en sortie de crise. Mais il y a beaucoup de différences par géographie et par secteur. Avec beaucoup de pragmatisme, on a adapté de 6 à 8 ans le remboursement avec des conditions selon la taille des entreprises. Mais je ne veux pas que des entreprises en difficultés passent par des procédures lourdes qui fragilisent leur capacité à produire et investir. Donc je vais demander au ministre de l’Economie de regarder ce qu’il se fait en l’Espagne. (A Bruno Cavagné) Si vous me dites que le gouvernement espagnol a repoussé les remboursements et que ça fonctionne mieux, pourquoi pas. Mais attention, pour que l’économie marche, il faut rembourser les prêts. »

La décroissance : « Il faut changer les usages et massivement investir. Mais on ne peut pas résoudre le problème de la transition écologique par de la décroissance au nom de l’équité des générations. Pourquoi notre génération pourrait consommer alors qu’on va faire peser la dette sur nos enfants qui ne devront moins consommer ? Ensuite, il y a une question de soutenabilité de notre modèle social. Je pense à notre hôpital et aux autres filets de sécurité dont on a vu la pertinence en 2020. Ce modèle social n’est pas finançable avec un schéma de décroissance. »

Transition écologique : « En opposition à la décroissance, une deuxième voie est possible, à condition de repositionner nos usages en allant vers la neutralité carbone. Cette stratégie passe par plusieurs étages. Le premier : l’énergie. Electrification les véhicules, développer des modes de transport à hydrogène, substituer le gaz et le pétrole… Par l’innovation, nous pouvons consommer moins. Je pense à MaPrimeRénov’ qui a permis de financer 650 000 chantiers de rénovation énergétique de logements. »

Nucléaire, énergie décarbonée : « La solution est duale : plus d’ENR et plus de nucléaire car on règle le problème de l’intermittence de l’éolien et on fournit de l’énergie décarbonée. Nous avons réussi à intégrer le nucléaire dans la taxonomie européenne. Ce qui était très attendu. Cela nous permet de montrer qu’il y a des perspectives pour les investisseurs privés. Nous donnons de la lisibilité. La France a la chance d’avoir un grand parc certes vieillissant mais existant, ce qui en fait l’une des économies les plus décarbonées d’Europe. Compte tenu des besoins, de sa population très répartie… il y aura un sujet sur le coût des infrastructures. »

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