Interview

«Nous n’avons aucune visibilité sur les mois à venir», José Ramos, président de la Fédération régionale des travaux publics d’Ile-de-France

Alors que le pays est reconfiné depuis une dizaine de jours, le président de la FRTP s’alarme de la forte chute des appels d’offres en Ile-de-France, de l’ordre de 33 % sur les dix premiers mois de 2020.

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José Ramos, président de la Fédération régionale des travaux publics d’Ile-de-France
José Ramos, président de la Fédération régionale des travaux publics d’Ile-de-France

Comment se passe ce reconfinement ?

Depuis le printemps, nos équipes et nos entreprises ont apprivoisé la Covid-19. Les chantiers se déroulent normalement mais, forcément, avec un impact sur la production lié à la mise en œuvre des mesures barrières et un surcoût qui varie de 0 à 5 %, voire 7 % dans les cas un peu exceptionnels. L’une des problématiques induite par le reconfinement concerne la fermeture des restaurants et des hôtels. Cette situation préoccupe les entreprises qui ont des collaborateurs en déplacement. Par ailleurs, si la décision du gouvernement de classer le secteur du BTP comme métier prioritaire nous satisfait, bien sûr, elle n’en entraîne pas moins une conséquence : en cas de baisse d’activité, l’entreprise ne pourra plus bénéficier du temps partiel Covid. Elle devra recourir au temps partiel économie avec une prise en charge plus importante pour elle.

Justement, fin octobre, vous avez lancé un appel pour alerter les pouvoirs publics sur l’effondrement des appels d’offres. Qu’en est-il exactement ?

En Ile-de-France, sur les dix premiers mois de 2020, les appels d’offres ont chuté de 33 % par rapport à la même période de 2019, ce qui représente 2 000 consultations en moins. Si l’on détaille par grandes catégories de maîtres d’ouvrage, la baisse atteint 42 % pour les communes, 41 % pour les syndicats intercommunaux, 34 % pour les intercommunalités et 20 % pour les départements. L’effet Covid cumulé à celui du cycle électoral se révèle catastrophique. Heureusement, en mars dernier, les entreprises bénéficiaient de carnets de commandes bien fournis, ce qui leur a permis de tenir jusqu’à maintenant. Elles devraient terminer cette année 2020 sans trop de casse mais au final, l’activité devrait reculer de 18 à 20 % dans le secteur des TP franciliens.

« L’incertitude autour de la date des élections départementales et régionales crée une difficulté supplémentaire »

Quelles sont les perspectives pour 2021 ?

Les départements, qui nous ont bien soutenus jusqu’à maintenant, vont être fortement impactés par l’augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA. Les conseils départementaux franciliens pourraient avoir à dépenser 200 millions d’euros supplémentaires à ce titre-là en 2020. Ce sont autant de financements qui ne seront pas fléchés vers l’investissement. Par ailleurs, certains gros maîtres d’ouvrage comme l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris commencent à repousser des chantiers pour raison budgétaire. Le surcoût induit par l’application des mesures sanitaires réduit aussi d’autant les budgets à la disposition des donneurs d’ordre. Enfin, l’incertitude autour de la date des élections départementales et régionales crée une difficulté supplémentaire. Quand les budgets 2021 vont-ils être votés ? Nous n’avons donc aucune visibilité sur les mois à venir. Nous espérons, comme le président de la République l’a annoncé, un retour à la normale à l’été 2021, mais encore faut-il que le premier semestre ne devienne pas le fossoyeur de nos entreprises. Un tiers de nos entrepreneurs éprouve déjà de fortes craintes pour leur continuité d’activité. Ce sont entre 20 et 30 % de nos emplois directs qui sont menacés. Je suis très, très inquiet.

Comment inverser cette tendance ?

Nous avons besoin d’une reprise massive et urgente des appels d’offres malgré le contexte sanitaire. Au regard des réserves et des capacités des collectivités locales, c’est possible. Les besoins existent : nous avons pris beaucoup de retard dans les travaux d’entretien, de dépollution, de transition écologique, etc. Le relèvement du seuil des marchés publics à 100 000 euros permettrait de compenser un peu cette baisse des appels d’offres mais il ne peut constituer la seule réponse à nos problèmes. Nous misons aussi sur le plan de relance, France Relance, mais il tarde à démarrer.

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