Monuments historiques, quand la loi défie le temps

Urbanisme et environnement -

Réservé aux abonnés

À l’époque du consumérisme juridique, la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques fait contraste en affichant une insolente longévité. Voilà près de cent ans qu’elle œuvre pour la conservation des immeubles les plus remarquables du point de vue de l’art et de l’histoire. Mais est-elle toujours utile ?

La question n’est pas incongrue si l’on considère que d’autres outils ont été créés afin de protéger le patrimoine de nos villes et villages. Les secteurs sauvegardés et les ZPPAUP (zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager) en cours de transformation en AVAP (aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine) ont certes vocation à s’appliquer à des ensembles urbains, mais ils comportent tous des mesures de protection individualisées. Le PLU lui-même dispose d’un fort potentiel patrimonial : il peut identifier des éléments à protéger pour des motifs culturels ou historiques et les associer à des prescriptions garantissant leur intégrité.

Douter de l’utilité de la loi, c’est aussi s’interroger sur l’opportunité de maintenir des procédures régaliennes de sélection des biens à préserver et de contrôle des travaux, alors que les communes se sont vu confier le destin des espaces urbains et que la moitié des monuments leur appartient. Comment en outre ne pas entendre les critiques récurrentes émises sur les servitudes de protection des abords considérées comme rigides, et des avis jugés parfois trop subjectifs de l’architecte des bâtiments de France (ABF) ?

En réalité, la protection au titre des monuments historiques n’est ni dépassée ni archaïque. Elle fait même preuve d’une étonnante vitalité. Chaque année, plusieurs centaines de biens sont ajoutées à la liste des 44 000 immeubles déjà classés ou inscrits sans que le contentieux contre ces mesures ne dépasse quelques unités. Le dispositif n’a également rien d’anachronique. La jurisprudence a confirmé que, si les sujétions résultant de la protection portent atteinte au droit de propriété, elles restent proportionnées à l’objectif d’intérêt général poursuivi. Ces dernières années, les procédures ont été précisées, adaptées au droit de la concurrence et mieux articulées au droit de l’urbanisme. Ultime preuve de ce dynamisme, la défiscalisation attachée aux monuments a été épargnée par le plafonnement global des niches fiscales appliqué depuis 2013.

Se poser la question de l’utilité de la loi de 1913 est donc surtout l’occasion de rappeler que la protection du patrimoine culturel a besoin d’un instrument qui défie le temps, sensible aux intérêts locaux sans leur être inféodé, capable, dans des espaces en perpétuel mouvement, de préserver avec vigueur les témoignages tangibles de notre mémoire collective. Longue vie à la Centenaire !

Abonnés
Baromètre de la construction
Retrouvez au même endroit tous les chiffres pour appréhender le marché de la construction d’aujourd'hui
Je découvreOpens in new window
Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires