Bénéficiant d’une position stratégique au cœur de Montbéliard, l’île du Mont-Bart, inondable, n’avait jamais fait l’objet d’un projet d’aménagement global. L’extension du CCSTI (centre de culture scientifique, technique et industrielle), situé sur l’île, est l’occasion pour la communauté d’agglomération du pays de Montbéliard, maître d’ouvrage de l’opération, d’aménager le reste du site : 12 ha qui accueilleront, d’ici à 2010, un parc scientifique et ludique sur le thème du mouvement. Au regard de sa situation, cet espace offre également à la ville l’opportunité « de créer une unité entre le centre historique et les quartiers les plus récents », explique Didier Klein, chargé du projet à la communauté d’agglomération. Baptisé « L’île en mouvement », ce projet de développement local mêlant tourisme, environnement et culture s’inscrit également dans une volonté de renouveler l’image de cité industrielle de la ville.
Lauréate du concours en 2005, l’agence de paysagistes Base a travaillé sur la notion d’« antijardin » définie par le maître d’ouvrage, interprétée comme l’expression d’un chaos naturel, et une approche du visiteur en tant qu’acteur plutôt que simple spectateur. « Dans un premier temps, explique Franck Poirier, responsable du projet chez Base, il s’agissait d’affirmer le caractère insulaire des lieux, très peu perçu par les habitants ». Pour cela, un imposant bâtiment pont positionné en biais au cœur de l’île marque les entrées piétonnes. Ce dispositif vise à accompagner le franchissement de l’eau d’une sensation physique. En se déroulant ensuite sous forme d’un ruban, élément cinétique de liaison, il structure le parcours du jardin.
D’un point de vue paysager, la réponse à la thématique du mouvement s’exprime par la mise en place d’une dynamique géologique à l’échelle du site. Formant une faille, une rivière artificielle animée (pontons flottants, plots arroseurs, vis d’Archimède…) est créée au cœur et dans la longueur du site. Ce dispositif définit de part et d’autre de l’eau un parcours aller et retour et deux jardins distincts, métaphores des hémisphères du cerveau, où le visiteur est mis dans une situation active. « Plutôt qu’une démonstration formelle du mouvement, il s’agit de créer des territoires aux multiples expériences impliquant le visiteur face à une situation de mise à l’épreuve, poursuit Franck Poirier. Rétrospectivement, celles-ci pourront être appréhendées par le public comme didactiques, capitalisables en elles-mêmes. »
Paysage mouvementé parsemé de graminées, le jardin sud (l’aller) repose sur un cheminement aléatoire au long duquel le visiteur subit une série d’épreuves qui malmènent ses sens : tunnel du vertige, jardin des reflets, déstabilisation optique… Le parcours est jalonné de tremplins inclinés, supports des animations ainsi mises hors crue et visibles depuis le niveau bas. Plateau de compréhension, dont le parcours est défini par une passerelle, le jardin nord (le retour), strict et linéaire, sollicite quant à lui l’anticipation et la réflexion. Les animations s’organisent en série dans un système de buttes forestières : jardin des trajets mentaux, jardin des âmes… A l’ouest, la liaison entre les deux itinéraires est marquée par un geyser de 10 m de haut qui fait face à un théâtre de verdure de 750 places. Les animations ont été élaborées avec Alain Berthoz, directeur du laboratoire de physiologie de la perception et de l’action, au Collège de France, conseiller scientifique de la maîtrise d’ouvrage.