La force du compromis. A côté de Lille (Nord), sur les devenus prisés bords de Deûle, une friche industrielle de 10 ha se métamorphose à grande vitesse sous la houlette de deux promoteurs-aménageurs (Linkcity et Nhood) et d'une SEM (Ville renouvelée), le tout grâce à une forte dose de concertation avec les élus locaux. C'est ainsi un nouveau quartier mixte attractif de 86 000 m² SP -baptisé Quai 22 - qui sort de terre à Saint-André-lez-Lille, dans le respect des souhaits des collectivités mais sans toucher à leurs finances. La Ville récupérera même gratuitement les 2 ha d'espaces verts aménagés. « Même si le foncier est 100 % privé, nous travaillons de la même manière que pour une concession d'aménagement classique, excepté qu'il n'y a pas d'argent public investi, hormis la contribution de la Métropole européenne de Lille (MEL) qui a traité les bords de Deûle pour y assurer une continuité des aménagements », souligne Isabelle Fèvre, responsable de projets urbains à la SEM Ville renouvelée (SEM VR).
Ateliers de travail « musclés ». Ce travail d'équilibriste entre acteurs publics et privés passe par un processus d'urbanisme négocié, déployé au travers d'ateliers de travail « musclés ». Pilotés par ANMA et s'appuyant sur un plan guide évolutif et des fiches de lot élaborés au préalable par l'agence, ces ateliers regroupent aménageurs, promoteurs associés à leurs équipes de maîtrise d'œuvre, la Ville… Dans ce cénacle, chacun négocie les caractéristiques des programmes immobiliers en respectant les contraintes des autres.
Le procédé semble bien fonctionner puisque la Ville de Saint-André-lez-Lille y recourt désormais systématiquement. « Trois à quatre ateliers sont nécessaires avant le dépôt du permis de construire d'un lot, constate Mélusine Hucault, associée chez ANMA, qui les anime. Il est plus difficile de tenir un cadre strict que dans un projet urbain classique mais cela fait émerger de nouvelles solutions. Pour parvenir à un arbitrage accepté par tous, il faut que les acteurs partagent une culture commune. » Et Lionel Amann, directeur de projets urbains Hauts-de-France et Normandie de Linkcity, de résumer : « Il n'est pas possible de déposer le permis tant que le résultat ne satisfait pas tout le monde. Cela impose un débat permanent. »
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Aux promoteurs ayant commencé leur carrière d'aménageur sur Quai 22, cette maîtrise du foncier à grande échelle donne la souplesse nécessaire pour faire évoluer le projet en fonction des demandes. « Panorama, futur siège régional de Dalkia de 7 600 m2 qui se termine, est un bon exemple de la réactivité offerte. Le projet n'était pas prévu lors de la création des 10 lots mais, quand nous avons reçu la demande de Dalkia en 2020, nous avons pu nous réorganiser pour y répondre favorablement tout en maintenant la chaîne de valeur. Nous sommes devenus copromoteurs avec Nhood sur ce lot alors que ce n'était pas prévu », illustre Lionel Amann.
Bilan carbone allégé. La maîtrise du foncier à grande échelle facilite aussi la programmation d'opérations de plus en plus ambitieuses au niveau environnemental, d'autant que, dans le cas de Linkcity, ce sont les collègues de Bouygues Bâtiment Nord Est qui réalisent tous les travaux. « Entre les premiers et les derniers lots, l'intensité carbone des bâtiments édifiés - comprenant construction et consommation d'énergie - aura baissé de 30 % », estime Lionel Amann.
L'autre point qui devrait être particulièrement réussi est l'animation des lieux, Nhood assurant le plan de merchandising de l'ensemble des lots, c'est-à-dire la cohérence des commerces présents. « Sur nos deux lots, nous sommes particulièrement ambitieux. Nous réorganisons actuellement notre programme afin de l'adapter finement aux modifications liées à l'arrivée des transports en commun et d'un pôle multimodal », indique Isabelle Detroy, leader des opérations aménagement et promotion de Nhood en Hauts-de-France. Avec un souci du détail partagé de bout en bout.
► 86 000 m² SP programmés dont 700 logements (30 % de sociaux et 10 % d'intermédiaires). 10 000 m² de bureaux et 9 500 m² de commerces et services de proximité. Un budget global de 200 M€ dont 120 M€ pour la construction des bâtiments.