Les PGE plomberaient les petites entreprises

Un rapport sénatorial et une étude du syndicat des indépendants et TPE (SDI) mettent en lumière les difficultés des petites entreprises qui remboursent un prêt garanti par l’Etat (PGE). Problèmes de trésorerie, risques de défaillance, l’aide se transforme en boulet.

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Maçonnerie

Les prêts garantis par l’Etat (PGE) s’érigeaient en mesure phare du gouvernement lors de la pandémie de Covid-19 en 2020 pour aider les entreprises. Ils pourraient bien finalement fragiliser certaines TPE du bâtiment. Un rapport d’information du Sénat du 7 juin 2023 pointe en effet les risques de non-remboursement des PGE des PME et surtout des TPE. Le secteur de la construction est principalement visé, puisqu’il s’agit de celui qui rassemble le plus grand nombre de bénéficiaires de PGE. 

Premier indicateur : 9 % des chefs d’entreprise de TPE et PME craignent ne pas pouvoir rembourser leur PGE selon le baromètre trimestriel de BPI France de mai 2023, contre 5 % fin 2022. Une montée en puissance de l’inquiétude, auquel vient s’ajouter un indicateur plus problématique pour la construction : le montant des PGE appelé en garantie du secteur atteignait 3,35 % du montant octroyé au 31 janvier 2023. Il s’agit du montant le plus élevé comparé aux autres secteurs (1,4 % en moyenne), représentant 410 millions d’euros.

Des PGE problématiques pour la trésorerie des TPE

Plus fragiles, les TPE subissent de plein fouet les répercussions du remboursement de leur PGE. C’est en tout cas la conclusion du syndicat des indépendants et TPE (SDI), qui a réalisé une étude auprès de 1352 chefs de très petites entreprises. Marc Sanchez, secrétaire général du syndicat, est formel : « Nous constatons que 70 % des entreprises qui remboursent un PGE se voient refuser leur crédit, contre 52 % en moyenne. » Des crédits qui sont la plupart du temps destinés à des investissements ou à renflouer la trésorerie. Cette dernière constitue d’ailleurs le nerf de la guerre, puisque 50 % des entreprises interrogées par le SDI affirment que leur trésorerie baisse. « Les entreprises qui ont besoin de matériel se retrouvent donc limitées dans leurs capacités d’investissement et de remboursement, précise Marc Sanchez. Par conséquent, leur chiffre d'affaires peut aussi être en baisse et les banques moins enclines à leur accorder des crédits. Les PGE impactent donc fortement la croissance des TPE. » Des difficultés auxquelles vient s'ajouter une croissance de la richesse nationale moribonde de 0,2 % au 1T 2023 selon l'Insee, « un chiffre proche de la récession... », remarque Marc Sanchez. Ces considérations sont cependant à nuancer au vu des résultats de l’Observatoire Image PME (Ordre des experts-comptables) du 1T 2023, qui relève que les 85 000 TPE-PME de la construction de l’échantillon observent une augmentation de leur chiffre d’affaires en valeur de 4,4 % par rapport au premier trimestre 2022. Toutefois, l’indice du coût de la construction avait progressé de 8,8 % au 4T 2022 sur les 12 derniers mois (Insee), ce qui peut augmenter artificiellement la croissance en valeur du secteur. 

Des défaillances à prévoir ?

Dans cet environnement économique instable, les indicateurs des défaillances d’entreprises montent en flèche, et notamment dans le bâtiment : +42 % en mai 2023 par rapport à la même période de l’année précédente selon le suivi mensuel des défaillances de la Banque de France. Un chiffre cependant encore en-dessous de mai 2019 (-13,4 %), « mais cela prouve que les tendances des défaillances d’entreprise se confirment, alerte Marc Sanchez. En regardant dans le détail des chiffres de la Banque de France, les TPE d’électricité, de maçonnerie et de peinture avaient déjà d’importantes difficultés au 1T 2022. » En effet, les TPE, petites entreprises et PME sont bien plus touchées que les plus grandes entreprises, avec une augmentation des défaillances respectives à mai 2023 par rapport à la même période de l’année précédente de 78,5 %, 89,3 % et 72 %. Autre indicateur significatif pour le secrétaire général du SDI : les radiations volontaires ont dépassé les radiations classiques en 2022, passant à 51,9 %. « Les chefs d’entreprise ont conscience de leur environnement économique et anticipent, analyse Marc Sanchez, pour éviter une procédure collective, qui se termine dans 90 % des cas par une liquidation judiciaire. »

Afin de limiter le poids des PGE sur les TPE, le SDI propose d'étaler le remboursement des PGE sur deux années supplémentaires sur demande du chef d'entreprise. Car pour Marc Sanchez, la réalité économique ne fait aucun doute : « Les TPE, toutes confondues, sont de plus en plus en souffrance. »

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