Les nouveaux Robinsons du jardin

Annick Bertrand, auteur et Yves Gillen, jardinier -

Depuis trente ans, ils appliquent leurs convictions « écolos ». Près de Saint-Nazaire, leur merveilleux jardin du Marais est la meilleure preuve des bienfaits du jardinage au naturel.

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Ces deux-là n'ont jamais rien fait comme tout le monde. Dans les années 1970, ils fuient la frénésie de la ville et sillonnent lentement les campagnes, en roulotte tirée par un cheval. Annick échappe ainsi à l'usine et Yves tourne le dos à la délinquance. « On rejetait tout ce que nous proposait la société de consommation. On voulait vivre librement, à notre rythme, en s'imprégnant de notre environnement », se souvient Annick. Vendanges ici, aquarelles là. Pendant cinq ans, les deux originaux font leur chemin qu'ils tracent à leur rythme et selon leurs convictions. « Je n'avais jamais jardiné, mais sur la route, on a rencontré un homme formidable, Pépin-Loup, un jardinier avant-gardiste, fils d'un ingénieur agronome qui depuis trente-cinq ans avait fait le choix du bio », se souvient l'autodidacte.

Bons sauvages.

En 1975, le couple remet le cap sur Saint-Nazaire. Avec leur maigre pécule, ils dégottent un terrain marécageux doté d'une source d'eau potable où garer leur roulotte. Yves délaisse toile et pinceaux pour se faire coupeur de roseaux. Annick se consacre à l'entretien de la maison, sans eau courante ni électricité. Quand la lessive, les conserves ou les confitures lui laissent un moment de répit, elle écrit. Des articles, ici ou là. Et un livre formidable : Les Affranchis jardiniers, dans lequel elle raconte leurs parcours d'écolo d'avant l'heure. « À notre arrivée, nous nous sommes rués dans le supermarché du coin pour faire le plein de graines. Nous avons semé tout et n'importe quoi, n'importe comment », se souvient-elle. La récolte est misérable. Heureusement, Saint Pépin-Loup fait son œuvre : le jardinier visionnaire offre à Yves le célèbre manuel de Claude Aubert Une Révélation et l'initie aux joies du jardinage bio.

Paradis naturel.

Bientôt, aération de la terre à la grelinette, compost et paillage n'ont plus de secret pour l'autodidacte qui s'inspire de la forêt pour jardiner « là où la terre n'est jamais nue. Dans mon jardin, c'est pareil. Le compostage est essentiel. Et comme dit Claude Aubert, « montre-moi ton tas de compost, je te dirai quel jardinier tu es ». À défaut de peindre, l'artiste fait des jardins du Marais sa plus belle œuvre : sous ses doigts, le terrain marécageux se transforme en Eden qui procure moult fruits, légumes, herbes et fleurs aux nouveaux Robinsons. Soucieux de partager leurs convictions, depuis 1996, de mai à octobre, Annick et Yves ouvrent leurs 13 000 m de nature aux curieux. Petit ou grand, impossible de rester insensible au discours du jardinier et à la poésie de ce lieu qui vit à l'heure des énergies solaire et éolienne. De retour en ville, on aurait presque des envies de compost sur le rebord de sa fenêtre. -

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