Les entreprises du BTP azuréen applaudissent le coup de filet contre les décharges illégales

Le 9 juin, le siège de six sociétés de travaux publics et deux chantiers ont été investis par des enquêteurs qui ont placé en garde à vue onze personnes, après des mois d’enquête sur des déversements sauvages de déblais de chantier sur la Côte d’Azur. L’information réjouit le monde du BTP azuréen qui dénonce des pratiques illégales et déloyales qui portent préjudice à la profession. La FBTP du Var va se constituer partie civile.

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Le BTP azuréen se réjouit du récent coup de filet contre les décharges illégales.

Le coup de filet de mardi dernier initié par les parquets de Draguignan (Var) et de Nice (Alpes-Maritimes) n’a pris personne au dépourvu dans le monde du bâtiment et des travaux publics azuréen. Il a même réjoui.

Bonne nouvelle

« Un grand coup a été donné. Cela va dans le sens de ce qu’on voulait. C’est une catastrophe écologique et économique. Ce sont des pratiques tellement intolérables, et dont la filière souffre, qu’il faut des sanctions exemplaires. On ne sait pas qui sont les 11 personnes interpellées lors du coup de filet du 9 juin. Peu importe. Ceux qui seront jugés coupables, doivent être sévèrement punis », affirme Jean-Jacques Castillon, président de la Fédération départementale du BTP du Var (FBTP83). En jeu, la réputation des entreprises du BTP.

« Le démantèlement d’un réseau, annoncé par le parquet, est une bonne nouvelle. On est agréablement surpris par les moyens mobilisés. C’est bien la preuve qu’il y a un problème de fond que nous signalons depuis longtemps. La FBTP83 a d’ailleurs été entendue dans le passé sur la base des signalements de décharges illégales qu’elle avait faits », renchérit Cyril Bolliet, secrétaire général de la FBTP83.

Traçabilité

Mais il ne faut pas en rester là. « Il faut frapper fort à tous les niveaux : entreprises, transporteurs, maîtres d’ouvrage, etc. L’enquête doit se poursuivre et remonter absolument jusqu’aux maîtres d’ouvrage, car ils sont les producteurs de déchets et de ce fait les propriétaires », insiste Antoine Gonzalez, président du syndicat des TP du Var.

Laure Carladous, présidente de la FBTP des Alpes-Maritimes n’est pas en reste dans la critique des maîtres d’ouvrage. « Il faut qu’ils se rendent compte que c’est parce qu’ils ne se préoccupent pas de la destination des déchets qu’on en arrive là. La solution serait plus de contrôle et une obligation de traçabilité des déchets. Les maîtres d’ouvrage devraient signer en ce sens un document d’engagement », estime-t-elle.

Faux problème

Le manque d’exutoires pour les déchets inertes que sont les gravats, avancé par certains, est un faux problème. « Il existe des solutions, sauf qu’elles coûtent. Et ceux qui ont recours à ces pratiques illégales ne se rendent pas compte qu’ils portent préjudice aux entreprises qui font les choses dans les règles de l’art », rappelle Antoine Gonzalez qui cite la possibilité d’amener les déblais chez les carrières et les centre de valorisation. « Les gens ne veulent pas payer, de l’ordre de 8 à 10 euros la tonne, Voilà, le vrai problème », martèle-t-il.

Préjudice

D’ailleurs, considérant que ces pratiques « illégales et déloyales » portent préjudice à la profession, la FBTP 83 a choisi cet automne l’avocate Me Ségolène Tuloup du Groupe LLC et Associés (La Valette-du-Var) pour se constituer partie civile dans toutes les affaires de décharges de déchets de chantier jugées par les tribunaux correctionnels.

Suite au coup de filet du 9 juin, elle a écrit en ce sens aux procureurs qui supervisent les enquêtes. « Quand on trouve des déchets de chantier, on ne se dit pas que la FBTP83 est une victime désignée. D’où la nécessité de se manifester pour rappeler au parquet qu’on a vocation et intérêt à se constituer partie civile », a-t-elle précisé au Moniteur.

1 million de tonnes de gravats

En 2019, 20 décharges illégales avaient été identifiées dans le Var. D’après la direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de Provence-Alpes-Côte d’Azur (Dreal Paca), entre 800 000 et 1 million de tonnes de gravats avaient été déversés cette même année, entre la plaine de l’Argens et le massif des Maures. Des déchets qui proviennent souvent de chantiers des départements voisins.

« Le Var, département rural, tente beaucoup de personnes. Sa situation géographique, entre deux grandes métropoles qui ont de gros chantiers, Nice et Marseille, peut expliquer la présence de ces décharges à l’est et à l’ouest du département », avance un représentant des services de l’État mobilisés depuis de longues années pour contrer le phénomène.

Cinq premières mises en examen


Cinq premières mises en examen ont été signifiées, une personne a été placée en détention et six autres ont été déférées jeudi 11 juin, a annoncé à l’AFP le procureur de la République Patrice Camberou.


L’enquête qui a conduit à perquisitionner le siège de six sociétés de Fréjus (Var) et Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes) et saisir une centaine de camions, a débuté par des plaintes de particuliers victimes de cette mafia qui sévissait depuis plusieurs années. « Ils approchaient des particuliers recherchant de la terre végétale pour leur terrain et, au lieu de ça, ils leur mettaient 200 camions de trucs pourris. Si les propriétaires mécontents s’avisaient de protester, ils recevaient la visite de gros bras et étaient incités à patienter », précise une source proche du dossier.


Près de 200 gendarmes ont été mobilisés mardi lors de l’opération baptisée « Terres brûlées », appuyés par des agents du fisc et de la direction régionale de l’environnement (Dreal).


L’enquête, selon le parquet, a mis au jour « un système organisé depuis plusieurs années » : les entreprises obtenaient des marchés d’évacuation de gravats, facturaient au tarif réglementaire mais entreposaient les déblais « sur des terrains privés ou publics, en trompant ou menaçant les propriétaires », pour « environ cinq fois moins cher ».

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