LE PUY Une départementale invente le relief

Pour modeler les 5 kilomètres de la déviation de la RD136, le paysagiste Bernard Lassus s'est appuyé sur une pratique des terrassements qui fait rentrer ceux-ci dans le mouvement et l'échelle du paysage. Rattrapant les courbes de niveau, il ordonne un séquençage et une mise en scène du paysage propices à sa découverte.

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Entre Chadrac et Polignac, la déviation de la RD136, 5 kilomètres, a été construite depuis peu pour contourner le Puy. Mais loin de blesser cet ample paysage, ponctué par la butte du château de Polignac, elle semble lui appartenir depuis toujours. Le conseil général de Haute-Loire, maître d'ouvrage, doit cette réussite aux conseils de Bernard Lassus. Le paysagiste, qui est conseil auprès de Cofiroute après avoir longtemps conseillé la Direction des routes du ministère de l'Equipement, défend des méthodes de réalisation des ouvrages routiers qui tranchent sur les techniques habituelles. Elles reposent, en particulier, sur une pratique des terrassements qui fait rentrer ceux-ci dans le mouvement - et l'échelle - du paysage. Le tracé est conçu pour les éviter autant que possible, mais lorsqu'ils sont inéluctables pour obtenir les profils en long nécessaires à la sécurité, Bernard Lassus fait modeler le terrain adjacent pour rattraper en douceur les courbes de niveau. Le paysagiste fabrique de fait un autre site, inscrit dans une mise en scène et un séquençage du paysage propices à sa découverte.

La question des emprises constitue un second paramètre décisif. Le maître d'ouvrage achète généralement les terrains nécessaires à la chaussée et au chantier, tout en cherchant à minimiser les emprises. Or, cette méthode de terrassement requiert des emprises plus importantes... La solution ? Louer ou rétrocéder les terrains aux agriculteurs riverains, après remodelage des terrains, souvent avec un apport de terre végétale. « La méthode est plus coûteuse au départ, explique Bernard Lassus, mais dans des proportions acceptables. Et si l'on raisonne en coût global, les emprises définitives sont souvent moins grandes, elles génèrent donc des coûts d'entretien moindres. »

Pour Bernard Lassus, l'ensemble de la démarche ne vise pas tant à « intégrer » (un mot qu'il a banni de son vocabulaire) la route au paysage que d'assumer leur hétérogénéité, en liant le naturel et l'artificiel par des structures. De même, l'opposition entre la route et le calme des campagnes est révolue, puisque l'infrastructure est vecteur de ce tourisme vert devenu indispensable à l'économie rurale. « Le tout est de faire des routes qui passent et non des routes qui traversent », résume-t-il. Reste aux paysagistes à trouver leur place dans ce processus. Une place que Bernard Lassus, intervenant au titre de conseil de la maîtrise d'ouvrage et non de maître d'oeuvre - et donc hors loi MOP - décrit comme une prise position à chaque étape du processus plutôt que comme une participation au processus lui-même.

FICHE TECHNIQUE (p.137) :

Maîtrise d'ouvrage : conseil général de Haute-Loire

Maîtrise d'oeuvre : Direction du patrimoine et des communications, conseil général

Conseil de la maîtrise d'oeuvre : Bernard Lassus, paysagiste, pour l'élaboration du tracé et des aménagements paysagers, assisté de la DDE de Haute-Loire, subdivision du Puy-en-Velay

Programme : route de contournement du Puy dans le site classé du château de Polignac, tracé et aménagement de la RD136 sur 5 kilomètres entre Chadrac et la RN102 à Polignac

Coût global : 40 millions de francs

PHOTO : Le paysagiste assume l'hétérogénéité de la route et du paysage en liant le naturel et l'artificiel par des structures.

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