La loi Littoral prévaut toujours sur une simple carte communale

Un arrêt récent du Conseil d'Etat illustre une nouvelle fois la vivacité de la loi Littoral, votée à l'unanimité il y a plus de trois décennies, le 3 janvier 1986. Un rappel salutaire de la hiérarchie des normes urbanistiques... et une façon d'inciter les communes littorales récalcitrantes à se doter (enfin) d'un plan local d'urbanisme.

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Littoral

Alors que les côtes littorales françaises, étendues sur plus de 7 000 km, restent très convoitées, que les pressions financières, touristiques et urbanistiques sont toujours aussi présentes, le Conseil d'Etat vient de rendre un nouvel « hommage » à la loi Littoral, trente après son adoption. Par un arrêt du 3 octobre dernier (1), la Haute juridiction administrative a en effet jugé que cette législation, très protectrice du point de vue environnemental et patrimonial, demeurait la référence pour délivrer les autorisations d'urbanisme dans ces communes, en particulier dans celles encore dotées d'une simple carte communale.

En l'espèce, un particulier a sollicité un certificat d'urbanisme puis un permis pour la construction d'une maison d'habitation sur une parcelle classée non constructible (Nr) par le plan local d'urbanisme (PLU) récemment approuvé par le conseil municipal, mais non encore entré en vigueur. Appliquant par anticipation le règlement du PLU, le service instructeur de la commune – en l'occurrence celle de Plouhinec (Finistère) – a dans un premier temps délivré un certificat d'urbanisme négatif, puis, en toute logique, a refusé d'accorder le permis sollicité.

Le pétitionnaire a alors demandé au tribunal administratif (TA) de Rennes de faire annuler la délibération du conseil municipal ayant approuvé le PLU, le certificat d'urbanisme négatif et le refus de permis. Selon lui, la parcelle litigieuse était essentiellement classée par la carte communale antérieure au PLU (et donc toujours en vigueur) en zone constructible (Uh), cette seule circonstance entachant d'erreur manifeste d'appréciation le classement en zone non constructible via le nouveau PLU. Le TA a rejeté l'ensemble de ses demandes par trois jugements, confirmés par la cour administrative d'appel (CAA) de Nantes dans un arrêt du 11 mai 2015. Le requérant a alors formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat.

La loi Littoral, mètre-étalon urbanistique toujours vivace

Et que disent les Sages du Palais-Royal ? Du point de vue de la hiérarchie des normes, la teneur de la solution apportée demeure assez classique : le fait que le PLU ne soit pas encore entré en vigueur au moment où la commune a opposé son refus de permis n'a aucune incidence sur la légalité de cette décision, dans la mesure où la loi Littoral, traduite par le I de l'article L. 146-4 du Code de l'urbanisme, prévaut nécessairement sur une carte communale. Or, selon ce même texte, dans les communes littorales, l'extension de l'urbanisation doit se réaliser « soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ». Aucune construction ne peut donc être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages.

Le Conseil d'Etat estime ainsi que la CAA de Nantes n'a commis aucune erreur de droit en jugeant que la décision litigieuse était légalement justifiée, « dès lors qu'une carte communale ne saurait en tout état de cause méconnaître les dispositions du Code de l'urbanisme telles que celles de son article L. 146-4 alors en vigueur ». Mais si le point de droit soulevé et sa solution ne sont pas franchement novateurs, la symbolique d'une telle jurisprudence reste forte : trente ans après son adoption, la très protectrice loi Littoral reste bel et bien le mètre étalon pour la délivrance (ou non) des autorisations d'urbanisme dans ces zones.

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