« La bonne politique budgétaire consiste à investir ». En réponse aux menaces de coupes budgétaires brandies par l’ancien ministre de l’Economie Bruno Le Maire, Alain Grizaud fourbit les arguments qu’il se prépare à défendre devant le gouvernement de Michel Barnier. Le président de la Fédération nationale des Travaux publics (FNTP) a détaillé sa plaidoirie dans une note du 29 août, dont le titre résonne comme un manifeste : « L’investissement dans les infrastructures, un levier d’action au service du redressement de notre pays ».
Positiver la dette
Les parlementaires des deux chambres ont reçu le message qui oppose à l’argument du déficit celui du coût de l’inaction : « Laisser s’accumuler la dette grise équivaut à multiplier la facture du remboursement par cinq à dix », calcule Alain Grizaud.
Face aux aléas conjoncturels, le président de la FNTP recommande au gouvernement de s’inspirer de l’attitude des chefs d’entreprise : « Ils maintiennent et optimisent leurs outils ; ils consolident leur parc, et ils n’ont pas peur de s’endetter ».
Au passage, Alain Grizaud n’hésite pas à recommander le sacrifice d’objets qui lui paraissent inutiles : « A quoi sert l’OFB » ? Le canalisateur n’a pas digéré les 400 M€ soustraits chaque année au budget des agences de l’eau, pour financer l’Office français de la biodiversité.
La route d’abord
Mais le message essentiel porte, sans surprise, sur le transport, et en premier lieu la route : « C’est le cœur du réacteur, dans le seul secteur d’activité dans lequel les émissions de carbone ne diminuent pas », rappelle Alain Grizaud. La croisade de la FNTP passera par une campagne sur la route de demain, et par l’aboutissement de la labellisation de l’éco-comparateur Seve TP, consacré à l’éco-conception des infrastructures.
Pour éviter que les politiques de transition écologique ne se noient dans les normes et les contraintes, génératrices de colère, le président recommande une visibilité pluriannuelle : « Arrêtons de remettre chaque année sur la table tous les dispositifs posés lors des précédentes discussions budgétaires ». Aux yeux d’Alain Grizaud, alarmé par les menaces qui pèsent sur le Fonds vert, « le stop and go, c’est le gros problème d’aujourd’hui ».
Desserrer les contraintes
L’adaptation au changement climatique nourrit son analyse, éclairée par les ravages dans la vallée de la Roya, consécutifs à la tempête Alex de 2020. « Après des catastrophes de ce type, il faut prendre le temps de s’interroger sur où et comment reconstruire, et de réfléchir à la migration des populations ». Pour aider les élus locaux à anticiper ce type d’événements, le président promeut la plateforme digitale Infraclimat, développée par la FNTP.
Le thème du desserrement des contraintes ramène le président vers l’eau, et plus précisément la réutilisation des eaux usées traitées (Re-UT). « Chaque agence régionale de la santé applique sa propre doctrine, alors que l’Europe montre l’exemple de la simplification », dénonce Alain Grizaud, rassuré de voir que la pression climatique ramène certains territoires à la raison : les Pyrénées orientales envisagent d’alimenter leurs nappes et leurs canaux d’irrigation avec la Re-UT.
Le précédent de la reconstruction
La visibilité et la simplification rendraient possibles un effort indispensable à la réussite de la transition écologique, et comparable à celui qu’a mis en œuvre la France, pendant la reconstruction.
« On peut le refaire ! Cela représente 1 à 1,5 point de PIB en plus », évalue Alain Grizaud.