Trois faits, de portée inégale, se signalent simultanément à notre attention : un discours revigorant, celui tenu par la nouvelle ministre de la Cohésion des Territoires, qui enjoint à ses administrations de favoriser la diversité des approches territoriales, invitant l'État central à ajuster en conséquence les politiques publiques ; une loi pour un État au service d'une société de confidance (Essoc) qui habilite l'exécutif à organiser par voie d'ordonnance un permis de déroger aux règles de la construction chaque fois que la pratique nouvelle assure un résultat équivalent à celui produit par la norme générale ; enfin, une expérimentation grandeur nature qui se déroule actuellement avec le concours de nombreux professionnels mobilisés à cet effet, tendant à adapter, au vu des retours d'expériences en cours, le référentiel qui fondera la réglementation environnementale des années vingt.
Ces trois situations apparemment disparates portent en réalité le même message : c'en est sans doute bientôt fini du temps de ces cathédrales normatives vouées à dicter, partout en France, les modes constructifs et ce faisant, à uniformiser les pratiques. Le moment est venu d'un retour aux fondamentaux d'autrefois qui faisaient que les constructions se distinguaient ici et là suivant les cultures régionales, les matériaux disponibles, et les climats ambiants. Cette diversité assurait non seulement le respect des territoires et l'enrichissement du patrimoine, mais aussi une culture de l'innovation, l'observation des particularismes locaux favorisant l'émulation entre les acteurs.
Bien entendu, il n'est pas question de prôner désormais le n'importe quoi qu'autoriserait une créativité débridée : l'intérêt et la protection de l'occupant de ces bâtiments de demain, comme des maîtres d'ouvrage, demeure une préoccupation centrale qui suppose que l'innovation territoriale s'ancre sans équivoque dans le champ assurantiel. Les trois faits relevés enseignent cependant un mode opératoire à suivre : cultivons l'innovation industrielle, technique, organisationnelle, juridique pour que nos constructions futures assurent toujours davantage le bien-être et la santé des occupants à coût maîtrisé, la recherche du beau, comme le respect des paysages, mais impliquons fermement les professionnels et les collectivités territoriales pour favoriser ces innovations, à la fois en encourageant l'expérimentation, et en veillant à encadrer comme il faut ces pratiques nouvelles. Retenons en effet que nous n'avons pas le droit à l'erreur collective si nous voulons que ces nouvelles libertés irriguent l'acte de construire.