L'attestateur, nouvel intervenant à apprivoiser

Les lois ESSOC du 10 août 2018 et Elan du 23 novembre 2019 ont été introduites quasi simultanément au cours de ces deux dernières années. La loi ESSOC fixe les conditions d'application de la réglementation ainsi que les moyens de contrôle à mettre en place. Le rôle de l'attestateur, la notion de la solution d'effet équivalent et l'attestation d'effet équivalent sont également introduits dans ce texte. Après l'ordonnance ESSOC 1 en octobre 2018, le décret ESSOC du 11 mars 2019 dressait l'inventaire des articles législatifs ou réglementaires impactés, tout en précisant le contenu de l'attestation préalablement introduite. Ces lois successives ont créé un nouveau métier : l'attestateur.

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Très simplement, les lois ESSOC et Elan respectivement du 10 août 2018 et du 23 novembre 2019 apportent un changement de paradigme - la filière décriait les contraintes réglementaires trop importantes et la législation a entendu leur complainte. La phase d'expérimentation reste un élément clé de la crédibilisation et pérennisation de la démarche. Ce n'est pas la première tentative de simplification des sujets réglementaires de la filière de la construction. Dès 2012, sous l'égide de Cécile Duflot, à l'époque ministre du Logement et de l›Égalité des territoires, 150 propositions de simplification avaient été avancées, mais un tiers seulement a été mis en place par l'Administration. En 2016, le permis d'innover est lancé par la loi du 7 juillet 2016. Suite à un appel à manifestation d'intérêt lancé par Bordeaux Euratlantique, Euroméditerranée et Grand Paris Aménagement, huit organismes, des agences d'architecture, des entrepreneurs mais aussi le Cérib, ont été désignés le 6 septembre 2018 pour mener à bien sept expérimentations constructives qui nécessiteront de déroger à la réglementation. Ainsi l'agence parisienne d'architecture Hub avait étudié l'idée d'un village vertical, mais son projet s'était alors heurté aux limites de la réglementation. Dans le cadre du permis d'innover, ces architectes pourront expérimenter la construction de ces logements, par ailleurs évolutifs et bioclimatiques. De même, la société Edelen, installée à Aubagne, fabricant de boîte aux lettres, souhaite déroger aux modèles normalisés pour un ensemble combinant des réceptacles plus petits et des boîtes à colis mutualisées, connectées et sécurisées. Le peut également être cité. Il offrait au préfet la possibilité de déroger à des règles de construction et d'urbanisme notamment environnementales. Les préfets ont usé de cette faculté plus d'une soixantaine de fois, comme pour délivrer un permis de construire à une usine de méthanisation située dans une zone bleue (aléa faible ou moyen) d'un plan de prévention du risque inondation (PPRI) ou de construire plus rapidement une digue à la Faute-sur-Mer (85). Le ) valide ce pouvoir qui prendra fin en décembre 2019.

Une démarche articulée autour de l'attestateur

Ces lois permettant d'expérimenter, de faire, d'innover ou de déroger introduisent dans la chaîne de valeur un nouvel intervenant : l'attestateur. Le décret du 11 mars 2019 (n° 2019-184) permet « à tout maître d'ouvrage de déroger à certaines règles de construction et à mettre en œuvre une solution d'effet équivalent, sous réserve qu'il apporte la preuve que cette solution parvient à des résultats équivalents à ceux découlant de l'application des règles de droit commun et que les moyens mis en œuvre présentent un caractère innovant. Le caractère équivalent de la solution proposée doit être attesté par un organisme tiers, indépendant de l'opération ». Le décret précise la liste des règles pour lesquelles une solution d'effet équivalent peut être proposée, ainsi que les objectifs généraux assignés à ces règles. Ainsi, pour déroger aux règles établies, le maître d'ouvrage doit apporter la preuve qu'il parvient, par les moyens qu'il entend mettre en œuvre, à des résultats équivalents à ceux découlant de l'application des règles auxquelles il est dérogé. En outre, ces moyens doivent présenter un caractère innovant, d'un point de vue technique ou architectural. Par exemple, s'il souhaite utiliser du bois en façade de sa construction, ce qu'interdit normalement la réglementation pour des raisons de sécurité incendie, il devra démontrer que le bois qu'il compte utiliser aura reçu un traitement spécifique le rendant aussi performant face au feu que les matériaux imposés par la réglementation.

L'attestateur sera en mission auprès du maître d'ouvrage. Il examinera les propositions d'ingénierie et de maîtrise d'œuvre, mènera une analyse comparative, vérifiera que les dispositions proposées permettent effectivement d'atteindre le niveau de performance exigé par la réglementation et délivrera l'attestation de solution d'effet équivalent. Elle sera ensuite remise par le maître d'ouvrage avec sa démarche d'autorisation d'urbanisme au moment du permis de construire. Une nouvelle mission devra être confiée au contrôleur technique. Il sera chargé de vérifier la bonne mise en œuvre de la solution d'effet équivalent tout au long du chantier. Ce dernier produira en fin de chantier une attestation certifiant du bon déroulement des travaux, vérifiant que la mise en œuvre de la solution est conforme aux règles énoncées dans le dossier de demande d'attestation. L'attestation de bonne mise en œuvre de la solution d'effet équivalent sera jointe à la déclaration finale d'achèvement des travaux (voir schéma ci-contre). Si l'attestation révèle une mauvaise mise en œuvre, l'autorité compétente pourra refuser de délivrer l'autorisation d'ouverture pour les opérations d'établissement recevant du public (ERP). Elle aura aussi la possibilité de s'opposer à la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux pour les autres opérations.

Lancement de la mission AMOSE « permis de faire »

Le 25 juin 2019, dans le cadre de la loi ESSOC visant à simplifier la filière construction, la COPREC, fédération des acteurs tierce partie agréés pour l'activité de contrôle technique construction, lance la mission AMOSE « Permis de faire » à destination des maîtres d'ouvrage. Cette mission s'inscrit dans le cadre de l'article 26 de la loi ESSOC, et de sa première ordonnance, qui permet désormais aux maîtres d'ouvrage de bâtiments de déroger à certaines règles de construction sous réserve que soit apportée la preuve de l'atteinte de résultats équivalents aux règles auxquelles il est dérogé. Il a été choisi de ne pas attendre la parution de l'ordonnance 2 et la réécriture du Code de la construction et de l'habitation prévue pour février 2020 afin d'accélérer en matière d'innovations dans le bâtiment, et d'ouvrir la voie à des bâtiments toujours plus performants au service des enjeux de sécurité des biens et des personnes. En pratique, la mission AMOSE est une vérification technique de conformité dont le référentiel et l'objet sont définis par l'ASE (l'attestation de solution d'effet équivalent) et fait l'objet de livrables distincts de ceux du CTC. Cette mission permet aux organismes tierce partie de contribuer efficacement à libérer le potentiel d'innovation dans le secteur de la construction.

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