Le quartier d’affaires Archipel de Strasbourg (Bas-Rhin) respecte les règles élémentaires de l’arithmétique : 2 n’y sera pas égal à 1.
La seconde tranche en cours d’émergence entend en effet pousser plus loin les préceptes du développement durable dans son principe d’aménagement, par rapport à la première qui n’en est pas dépourvu, mais a été conçue il y a une dizaine d’années avec le « matériel » de l’époque en la matière, moins riche.
Indéniable succès immobilier qui a commercialisé ses 115 000 m2 plus vite que prévu, l’Archipel 1 n’en fait pas moins débat quant à sa densité. Parfaitement recherchée par la Ville comme symbole du pôle de tertiaire supérieur qui se forme sur place, la skyline crée, le long du boulevard de Dresde, un front urbain serré qui suscite approbation… ou non.
L’Archipel 2 (ou « 2.0 » comme ses concepteurs le nomment) capitalisera sur les atouts naturels plus marqués que dans la première tranche. Il porte des ambitions que sa maîtrise d’œuvre estime particulièrement variées et élevées, éléments factuels à l’appui.
« Mûri pendant un an et demi, retravaillé avec la Ville (à travers sa mission Wacken-Europe) dans la continuité de sa commande initiale, le projet répond à un axe directeur dont chaque mot compte : Habiter et travailler dans un parc », énonce David Zillhardt, responsable Est Villes & Mobilités d’Ingérop, mandataire de l’équipe formée avec les agences DeA Architectes et K&+ Architecture globale (architectes-urbanistes) et avec Acte2 Paysage.
D’une surface bâtie équivalente à la première phase, Archipel 2 s’inscrit dans une parcelle trois fois plus étendue, de 11,5 hectares. Plus mixte dans sa programmation, il se structure, non autour du boulevard urbain, mais des rives de la rivière Aar située en fond de parcelle qui ouvrent la perspective sur les plaines végétalisées du nord de l’agglomération. C’est à sa proximité que s’implantera le parc de 3,5 hectares, colonne vertébrale d’une succession d’espaces publics hiérarchisés — places, placettes, squares, guinguette remettant en valeur une maison éclusière oubliée — qui parcourront le site.
Pour commencer, un jardin temporaire s’aménage : « Depuis la fin de l’année dernière, nous y implantons une pépinière, qui permettra ensuite de replanter les 70 arbres de façon répartie sur le site. Les arbres pousseront littéralement sur place ! », décrit Serge Gross, dirigeant d’Acte2 Paysage.
Un cours botanique
Cette pépinière prend place près du nouveau théâtre du Maillon, le long du « cours botanique ». Celui-ci mènera jusqu’au parc de l’Aar de façon à remplir plusieurs fonctions : trame verte interne au site, axe de promenade, liaison avec les bordures avoisinantes du centre-ville en direction de la place Adrien-Zeller voisine devant le siège du conseil régional puis loin de la place de Bordeaux et gestion des débordements de l’Aar en réponse aux exigences du plan de prévention des risques inondation (PPRI). « Les contraintes hydrauliques majeures du site se sont en fait transformées en une belle opportunité pour l’aménagement, dont elles deviennent la pierre angulaire », appuie David Zillhardt.
Dans cette conception qui repose sur le CIM (City information modeling) pour la première fois à Strasbourg à l’échelle d’un quartier entier, la voirie se fait « grignoter » par le vert. Alors qu’elle devait initialement représenter 58 % de la surface, sa part tombe finalement à 8 %, au profit des parcs et espaces plantés, qui passent de 10 à 25 %. Archipel 2 est désormais organisé aussi comme une succession d’îlots de fraîcheur, visant à renforcer une performance énergétique déjà favorisée par le raccordement au réseau de chaleur urbain, en attendant un réseau de froid à l’étude.

La conception de l’aménagement intègre la gestion des îlots de chaleur par la répartition des espaces verts et des plantations. © DeA Architectes
Les hauteurs au nord
La part consacrée au bâti ne change pas par rapport aux projections initiales : 32 %. Ces constructions entendent elles aussi créer une certaine rupture avec Archipel 1.
Le boulevard de Dresde aurait pu prolonger son rôle de front urbain, d’autant que cette fois-ci, il se situe au sud. Or, « la volonté de structurer autour de l’Aar a fait privilégier une gradation des hauteurs en sa direction, vers le nord de la parcelle.
On passe de R+7 le long du boulevard à R+16 près des rives, là où les immeubles de logement s’implanteront », souligne Guillaume Delemazure, gérant de DeA Architectes. En contraste, dans une certaine mesure avec la première phase, les différents immeubles, résidentiels et tertiaires, présenteront une physionomie « élancée, qui permettra leur disposition en quinconce, avec des épaisseurs limitées à 16 mètres », complète Daniel Gasser, cogérant de K&+ Architecture globale.
Cet ensemble de constructions devra aussi trouver son harmonie avec l’équipement recevant du public qui est programmé, la nouvelle salle du club de basket SIG, à la volumétrie prévue plus compacte. Il reste aussi, dans ce cadre à « retravailler » le parvis précédant la salle. Une mission à mener avec l’équipe municipale qui sortira des urnes ce 28 juin.