Hérault : des nouvelles façons d'habiter le littoral

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Littoral
A Frontignan-la-Peyrade, la Scop Archiles propose une « zone refuge » parallèle à la ligne de côte d’où partent des passerelles qui s’étirent vers la mer pour distribuer les logements construits sur pilotis et servir de moyen d’évacuation.

La Méditerranée monte. Son niveau augmentera d'au moins 40 cm à l'horizon 2100 - voire 1 m dans le pire scénario -selon le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec). En première ligne avec 90 km de côtes, le département de l'Hérault s'y prépare en déployant notamment sa stratégie Hérault Littoral 2019-2030, pour une gestion intégrée des zones côtières. « Faire des études prospectives ne suffit plus, pointe Michel Pieyre, directeur mission développement durable au conseil départemental. Il faut imaginer les premiers gestes qui sauvent les territoires et savoir comment les mettre en œuvre. » Dans cette optique, la collectivité a organisé un concours d'idées inédit en France. Architectes, urbanistes et paysagistes ont été invités à plancher sur l'aménagement du site des Hierles, à Frontignan-la-Peyrade, face aux aléas climatiques et aux risques de submersion marine, à l'horizon 2050. « Nous avons appliqué trois principes pour traiter cette problématique : un travail pluri et transdisciplinaire ; la prise en compte du jeu des échelles, de l'échelon urbanistique aux détails de l'habitat ; et la nécessité d'adapter le bâti existant au même titre que le neuf », indique Laura Nave, cofondatrice de la Scop Archiles, lauréate du premier prix du concours, décerné en février.

Le projet Oyat, présenté par cet atelier d'architecture marseillais au sein d'un groupement, s'articule en rubans. Chacun propose un nouveau littoral avec une « zone refuge » parallèle à la ligne de côte. De là partent des passerelles qui s'étirent vers la mer pour distribuer les logements construits sur pilotis et servir de moyen d'évacuation. La réflexion inclut des solutions pour stocker l'eau potable, nourrir ce quartier, ou encore penser les espaces extérieurs soumis à la salinité. Elle incite également à accompagner la population, « encore peu consciente de vivre dans une zone à risque imminent », pour qu'elle soit partie prenante.

Double enveloppe. En filigrane, Archiles espère que son projet encouragera les parties prenantes de l'acte de bâtir à changer leur façon de faire et conduira à une évolution de la réglementation, pour que la construction d'habitations soit à nouveau envisagée dans ces zones. Pour cela, la Scop s'appuie sur des outils architecturaux et structurels spécifiques, comme la pose d'anneaux d'amarrage en façade des bâtiments ou l'usage systématique d'une double enveloppe pour protéger les baies vitrées des projections d'embâcles en cas de tsunami.

Encourager les parties prenantes de l'acte de bâtir à changer leur façon de faire.

« Le travail réalisé par les candidats nous a ouvert les yeux sur des réalités et des solutions techniques originales auxquelles nous n'avions pas pensé », reconnaît Michel Arrouy, maire de Frontignan-la-Peyrade. De son côté, Michel Pieyre en est persuadé : « La première solution à adopter consiste à modifier le cahier des charges des appels d'offres en intégrant des aspects sociologiques, environnementaux, de mobilité, etc. » Aux yeux de l'expert, la région a la chance de disposer d'importantes ressources comme le Centre d'écologie fonctionnelle et évolutive à Montpellier, ou le Réseau d'expertise sur les effets du changement climatique en Occitanie. « C'est une opportunité pour les écoles car les besoins en termes de formation vont être immenses », estime Michel Pieyre. Ce dernier appelle aussi de ses vœux un partenariat plus étroit entre les collectivités et l'ingénierie publique ou privée pour améliorer les méthodes actuelles.

Les six autres lauréats du concours d'idées

  • Le projet « L'homme et les roses eaux », de l'agence en Plein milieu.x (mandataire), repose sur une bio-utopie avec une approche globale sur l'eau, le territoire et les ressources.
  • Le projet « Site, cyte, cité », de l'agence Les Ateliers Up +, SCE et Créocéan (mandataire), se distingue par son diagnostic territorial et ses propositions à l'échelle supra-communale selon le jury.
  • Le projet « Le littoral du futur », présenté par Ophélie Jolys, alors étudiante à l'ENSP, se concentre sur la renaturation du site avec pour spécificité de ne pas habiter le secteur des Hierles.
  • Le projet « En attendant la mer », présenté par Shama Martinie de Maisonneuve, alors étudiant à l'Ensa Montpellier, imagine des habitations en pierre de taille pouvant être transformées et déplacées à volonté.
  • Le projet « Promesses silencieuses », présenté par Mathieu Brunel, alors étudiant à l'Ensa Montpellier, se base sur une logique de « réécriture permanente du sol » permettant le développement de nouvelles cultures, de jardins et d'espaces boisés.
  • Le projet « Faire place », présenté par Sébastien Soulez-Larivière (Slow Architectures), propose une solution à habiter et touristique, s'appuyant sur l'imaginaire de la maison de pêcheurs.
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