L'architecture de la cité scolaire Jean-Marie-Le-Bris de Douarnenez (Finistère), qui regroupe un collège et un lycée, a toujours été le reflet de son époque. Lorsqu'elle ouvre ses portes en 1963, elle répond aux besoins du moment avec des ouvrages fonctionnels mais énergivores et sans considération pour l'environnement. A la rentrée, la région Bretagne inaugurera un site transformé avec un nouveau bâtiment passif qui redonnera toute sa place à la nature et accueillera le lycée, une section d'enseignement général et professionnel adapté (Segpa), un internat, le restaurant scolaire et des ateliers d'entretien.
Réalisée en site occupé, cette restructuration a démarré en janvier 2024. Le bâtiment neuf prend place dans le prolongement du collège, réhabilité en 2019 par Bouygues Bâtiment Grand Ouest (BBGO), également à la manœuvre de ce nouveau projet en tant que mandataire du groupement du marché global de performance (MGP) passé avec la région. Le lycée historique sera, lui, déconstruit avant la fin de l'année.
« Réduire l'emprise foncière grâce à un bâtiment compact, aux volumes simples, constitue la première vertu de ce projet. Cela permet de réaménager et de végétaliser la cour, qui était entièrement bitumée », explique Fabien Le Jeune, responsable d'opérations à la SemBreizh, maître d'ouvrage délégué. Et de poursuivre : « Nous avons fait le choix d'un MGP en conception-réalisation-exploitation avec des gains attendus sur plusieurs cibles : énergie, matériaux biosourcés, qualité de l'air, acoustique, réemploi et biodiversité. » Le nouveau bâtiment répond à ces objectifs en atteignant le niveau E3C1 du label E+C-, avec des besoins en chauffage inférieurs à 15 kWh/m2 .an (standard d'un bâtiment passif), 20 kg de matériaux biosourcés/m2 ou encore un taux de polluants atmosphériques de l'air intérieur inférieur à 850 ppm. « Côté réemploi, nous réutilisons 2 000 m2 de faux plafonds acoustiques d'un de nos chantiers à Strasbourg (Bas-Rhin) reconditionnés par Ecophon », complète Guillaume Rinckel, responsable commercial de BBGO pour la Bretagne.
60 % du foncier aménagé en espaces naturels. Le critère biodiversité a été particulièrement poussé avec l'aménagement de 60 % du foncier en espaces naturels et la création d'écosystèmes variés, comme des mini-fourrés, des noues paysagères, une mare ou encore des îlots non entretenus. « Nous avons planté une soixantaine d'arbres et coupé une vingtaine - des robiniers et des érables répertoriés comme invasifs - que nous avons transformés en mobilier extérieur », raconte Fabien Mahé, cogérant d'Onésime Paysage, concepteur du projet. Les croûtes d'enrobés de la cour ont, elles, été réemployées pour devenir des pas japonais ou des gabions, refuge idéal pour les petits reptiles.
Une telle attention envers la petite faune a été l'une des particularités du chantier. « Lors du terrassement, nous avons dû réfléchir sur une méthode, par bandes, afin d'éviter aux insectes de se retrouver coincés », témoigne Alan Kerveillant, responsable travaux chez BBGO.
Cette démarche qui met la biodiversité au cœur du projet est l'essence même de la certification Effinature, souhaitée par le conseil régional de Bretagne. Ce référentiel élaboré par l'Institut de recherche et d'innovation pour le climat et l'écologie (Irice) impose une prise en compte de ces enjeux dès la conception et s'attache à impliquer l'ensemble des intervenants, y compris les fournisseurs. « Avec l'entreprise de travaux paysagers, nous avons sollicité des pépinières certifiées Plante bleue ou Agriculture biologique afin que 90 % de nos plants soient issus d'essences locales », illustre Fabien Mahé.
Obligation de résultat. L'opération a été certifiée Effinature pour sa phase conception mais, dans le cadre du MGP, elle va bien plus loin : elle vise le niveau Haute valeur écologique (HVE) qui intègre une phase d'exploitation et fait l'objet d'une réévaluation tous les trois ans. « Avec la biodiversité, on se limite généralement à une obligation de moyens car rien n'est jamais garanti. Pour le dire autrement, ce n'est pas parce qu'on pose un nichoir que les hirondelles vont s'y reproduire. Mais cette fois, nous avons une obligation de résultat », résume Alexandre Delamarre, directeur régional Loire Bretagne de Biotope, conseil en environnement.
Pour cela, avant même le début du concours, l'AMO de la région EkoAm Environnement a réalisé un inventaire de terrain avec une dizaine de critères - synthétisés dans l'indice de qualité écologique (IQE) [1] - qui seront évalués dans le temps. « Durant les quatre années qui suivront la réception, nous réaliserons deux visites annuelles pour évaluer ces critères, ainsi que les quelque 80 autres imposés par la certification Effinature HVE », détaille Prunelle Perly, cheffe de projet environnementaliste et nature en ville chez Biotope. Et comme le bon entretien du site ne se fera pas sans les usages, les élèves, les équipes enseignantes et les services techniques ont été associés très tôt à la démarche.
(1) Méthode qui permet de caractériser la biodiversité à l'échelle d'un site.


Informations techniques
Maîtrise d'ouvrage : région Bretagne. MOA déléguée : SemBreizh.
Marché global de performance : groupement porté par Bouygues Bâtiment Grand Ouest (mandataire) avec CRR Ecritures architecturales et AUA BT (architectes), Oteis (BET VRD), Onésime (paysagiste), Biotope (conseil en environnement), Bellocq (entreprise de paysage), Kerleroux (déconstruction), Sanitherm (CVC plomberie), Gervais (électricité).
Superficie du bâti : 6 632 m2 S P.
Superficie des espaces extérieurs : 7 420 m2.
Livraison : rentrée 2025.
Coût de l'opération : 27,4 M€ TTC.