L’agglomération lyonnaise aménage tellement d’espaces publics et de jardins qu’en dix ans, les agents d’entretien ont vu leur surface de travail multipliée par deux. Comment assurer une maintenance efficace des lieux tout en poursuivant ce mouvement de création ? Comment entretenir bien mais moins cher, pour pouvoir budgéter les futures réalisations ? La question est complexe car l’entretien ne découle pas seulement du vieillissement des végétaux et matériaux utilisés, mais aussi de l’appropriation parfois imprévue que les habitants font des lieux. En outre, permettre un entretien aisé ne doit pas entraver l’imagination des concepteurs, paysagistes ou architectes. Un exemple montre comment quinze années de réalisations ont donné une expérience indiscutable en la matière à la métropole rhônalpine. Après avoir introduit le sable stabilisé comme matériau de revêtement de sol extérieur pour ses qualités de coloris et de texture, sa mise en œuvre de façon pérenne est apparue difficile. Aujourd’hui, on tend à le remplacer par des bétons à aspect naturel (désactivés, balayés), concassés minéraux, enrobés ou asphaltes parsemés de granulats de couleur. Des matériaux qui tiennent dans le temps tout en se faisant éléments de composition urbaine. Et si le lieu autorise le sable stabilisé (présence de bordurettes en bois pour retenir le matériau, risque limité de ravinement pluvial…), on dispose une sous-couche plus compacte qui empêche les mauvaises herbes de pousser, limitant ainsi le nettoyage.
Des moutons pour tondre les prairies pentues. Le souci de la maintenance s’applique à tous les facteurs qui concourent à la réussite d’un espace public : adaptation au site, implantation dans la ville, usage par les habitants, composition spatiale. S’agissant d’adéquation au site, le plan de végétalisation confié au paysagiste Gilles Clément en 1996 a promu de multiples espèces supportant bien le climat et l’atmosphère urbaine pour remplacer le platane, victime d’un chancre. En bord de Rhône, les paysagistes In situ travaillent particulièrement la résistance des végétaux aux crues. Et partout dans la ville, on réintroduit plantes et fleurs dont la robustesse dispense presque de soins : espèces locales, vivaces, prairies fleuries, « mauvaises herbes » décoratives.
En termes d’usage, on limite les détériorations en permettant sur le même site plusieurs usages fortement différenciés par le paysagement : le parc de Saône (Michel Desvigne-ADR-Georges Descombes) juxtaposera promenade de rive pour piétons, vélos ou rollers, jardins aquatiques pour l’observation écologique, pelouses pour des usages libres aux pieds des immeubles. En divers quartiers, associer les habitants à la programmation d’un espace ou même à sa réalisation les a sensibilisés au respect du bien collectif.
En 2005, le label ISO 14001 consacrait Lyon première ville en France pour une gestion évolutive durable à l’échelle d’une commune. La méthode développe « l’entretien différencié » – à degré variable selon le caractère du site, du plus prestigieux au plus naturel – en un projet plus global de réduction des impacts environnementaux. S’y associent désherbage par brûlage, élimination des parasites par leurs prédateurs, tonte par des moutons des prairies pentues… Pérennisant le végétal par des traitements doux, ces méthodes économisent sur les budgets. Certaines techniques apportent un plus visuel, tels les paillages décoratifs, ou les tapis de feuilles mortes qu’on laisse s’épaissir pour donner libre cours à des interventions artistiques fugaces.
