En août dernier, un éboulement de la falaise de la Praz, en Maurienne (Savoie), a entraîné la coupure de liaison ferroviaire entre la France et l’Italie. Après des analyses et des auscultations poussées du tunnel ferroviaire de la Brèche, situé en pied de falaise, par les équipes d’ingénierie de SNCF Réseau, le gestionnaire a chargé l’entreprise locale Bianco de déblayer au plus vite le toit de la galerie recouvert de près de 25 000 m3 et risquant à tout moment l’effondrement. « SNCF Réseau nous a demandé d’intervenir rapidement afin d’éviter des mouvements supplémentaires de la galerie et par conséquent sa déformation », précise Stéphane Bastien, directeur général de la filiale du groupe Fayat, intégrée au groupe Razel-Bec.
Au vu des risques encourus sur la zone à désencombrer, il n’était pas question d’autoriser l’accès aux piétons. C’est pourquoi, Bianco a fait le choix de recourir à sept engins pilotés à distance : quatre pelles - deux Cat 349 de 50 t, une Cat 330F et une Hitachi ZX350 - ainsi que trois tombereaux sur chenilles Morooka, tous équipés de caméras.
« Nous avons travaillé sur la partie hydraulique des engins avec un prestataire qui a fourni les modules et les télécommandes puis, en moins d’un mois, quatre de nos collaborateurs ont réalisé l’ensemble de l’installation sur les machines dans notre atelier de Marthod », détaille Jérémie Bulloz, chef de secteur Réseaux & Terrassement de Bianco qui a donc privilégié cette approche aux solutions existantes sur le marché dont le temps de déploiement ne répondait pas aux délais de ce chantier.
Des engins bardés de caméras
Chaque pelle a été dotée de cinq caméras installées sur les chenilles ainsi qu’au niveau du poste de conduite pour avoir une vue sur le bras et surveiller le tableau de bord dans le même temps. En complément, dans la base vie du chantier des postes de conduites avec écrans ont été aménagés. « Une distance de 200 m séparait le sommet de l’éboulement et la zone arrière du chantier où nous étions positionnés. Il nous était donc impossible de télécommander les machines avec une visibilité directe, ce qui explique la nécessité de déployer ce type de dispositifs » explique Jérémie Bulloz. La portée de la radiocommande s’élevant, elle, à 150 m.

Sur les dumpers Morooka, une caméra à l’intérieur du poste de conduite a permis aux opérateurs de les mouvoir en marche avant tandis qu’en sens inverse, ils se sont appuyés sur les retransmissions en temps réel émises, dans la base vie, par les autres caméras des pelles.
Point important pour accroître la visibilité sur la zone d’intervention, un drone a survolé en permanence le chantier. Imaginé initialement comme une aide visuelle pour observer sous le godet ou identifier une éventuelle fuite sur un flexible, l’engin aérien s’est révélé très vite indispensable et ses captations ont donc été retransmises sur tous les postes de conduite de la base vie.
Des opérateurs expérimentés
Les opérateurs sélectionnés en interne pour piloter les engins ont été sollicités sur la base du volontariat par Bianco. « Sur ce chantier complexe, il y avait un risque de retournement des engins assez élevé du fait de la présence de blocs de gypse et de grès dans les éboulis. C’est pourquoi, il était important pour nous de privilégier des professionnels expérimentés habitués à travailler avec des engins de terrassement dans ce type d’environnement montagneux », précise Stéphane Bastien qui reconnait cependant que l’éventualité de choisir des opérateurs moins expérimentés mais avec une plus grande dextérité avec les commandes joysticks s’est posée.
Pour les besoins du chantier, l’excavatrice de 30 t était équipée d’un BRH tandis qu’une autre était doté de cisaille, un accessoire indispensable pour venir à bout des 14 000 m² de filets anti-sous-marins qui s’entremêlaient aux 25 000 m3 de matériaux et blocs de gypse et de grès. « La difficulté avec les filets anti-sous-marins a été d’éviter qu’ils ne se tordent et se coincent dans les mâchoires de la cisaille car aucun collaborateur n’était autorisé à aller sur la zone de chantier », explique le chef de secteur.
Deux équipes de 7 opérateurs se sont relayées pour manipuler les machines qui ont tourné 7 j/7, de 7h à 17h pendant environ un mois et demi, de décembre à fin janvier. Une pelle Cat 320 Next Gen, deux tombereaux articulés Cat 730 et une chargeuse sur pneus Komatsu pilotés conventionnellement ont servi hors de la zone d’éboulement à charger et évacuer les déblais.