Sarah, Bantan et Armelle, trois des six tunneliers qui ont assuré le creusement des 19,1 km du lot 1 de la ligne 16 du Grand Paris Express jusqu’à janvier dernier reprendront bientôt du service. En effet, au sein de son atelier de Thieux (Seine-et-Marne), Eiffage Génie Civil opère actuellement un reconditionnement de ces équipements de 1650 t, 9,87 m de diamètre pour 100 m de long.L’objectif : les remettre en état de marche pour leur permettre de creuserla ligne C du métro de Toulouse.
« Notre travail consiste à réviser ces tunneliers à pression de terre, les reconditionner et même les restructurer. Des modifications sont notamment apportées pour réduire leur diamètre de 20 cm et répondre au cahier des charges du projet toulousain », explique Fabrice Senecal, directeur d’exploitation d’Eiffage Génie Civil. Une opération tout à fait inédite pour le groupe qui a par le passé déjà opéré des rétrofits de ce type d’équipement sans toutefois les modifier structurellement.
Une réutilisation maximisée des composants
En collaboration avec Herrenknecht, le fabricant allemand de ces tunneliers, l’équipe matériels d’Eiffage Génie Civil a donc repensé la conception de la machine tout en essayant de réutiliser la plupart des composants.
Le bouclier comme la roue de coupe sont ainsi redimensionnés au diamètre de 9,67 m. « Pour le bouclier, nous avons choisi d’utiliser une structure neuve qui nous est livrée sans aucun accessoire. C’est-à-dire que nous nous chargeons d’y installer, par exemple, les vérins de poussée reconditionnés et le sas hyperbare modifié », détaille Stéphane Leriche, directeur matériels. « Sur la roue de coupe, le carré central structurel est conservé mais quatre nouveaux pétales sont ajoutés. Deux d’entre eux, d’environ 5 m de large, sont soudés en amont à Thieux, tandis que les deux autres de 9 m seront soudés sur place à Toulouse ». Un choix qui permet de pouvoir transporter le colis de 90 t jusqu’au chantier.
Des modifications sont notamment apportées pour réduire leur diamètre de 20 cm et répondre au cahier des charges du projet toulousain.
— Fabrice Senecal, directeur d’exploitation d’Eiffage Génie Civil
Dix mètres plus longs dans leur nouvelle version, les tunneliers seront composés, chacun, de cinq remorques au lieu de quatre. Cette dernière plateforme servira à embarquer les trémies permettant le stockage de la boue bentonitique. Sur les quatre autres, les techniciens s’attèlent notamment à déplacer les armoires et à ajouter une trappe en sortie de vis et une pompe de marinage.
Un reconditionnement en moins d’un an
Au sein du site de 28 000 m², quatorze encadrants et cinquante personnels spécialisés (hydrauliciens, mécaniciens, automaticiens, conducteurs d’engins, opérateurs de tunnelier…) du groupe Eiffage sont mobilisés depuis mi-mai. Aussi épaulés de techniciens Herrenknecht (entre 5 et 20 selon les besoins), ils suivent un processus précis.
Après le démontage de tous les composants des boucliers (entraînement, vérins de poussée, moteurs, SAS hyperbare, vis d’extraction, flexibles, tuyauteries…), une révision, une réparation puis un échange des composants, au besoin, sont réalisés. Ensuite, les éléments structurels du bouclier vont être rééquipés de leurs accessoires.
« Nous effectuons un montage à blanc de la roue de coupe, du bouclier et des deux premières remorques de chacun des tunneliers sur site.Cela nous permet de réaliser les essais des composants et contrôler notamment la rotation de la roue de coupe », précise Fabrice Senelac. Une fois, les équipements validés, un dernier démontage permettra leur colisage en vue de les transporter jusqu’à Toulouse. Vingt convois exceptionnels et environ 100 camions semi-remorques par tunnelier seront requis.
Actuellement, un tunnelier est en phase de tests, un second est en cours d’assemblage tandis que les composants du 3e sont encore en reconditionnement. Eiffage prévoit de finaliser les équipements d’ici le 1er trimestre 2024.
Nécessitant moins d’un an de réalisation, l’opération de rétrofit des tunneliers peut donc s’avérer plus courte que la production d’un matériel neuf. Outre son aspect économique, elle s’avère aussi intéressante sur le plan environnemental. Selon Herrenknecht, en moyenne 71,42 % des émissions de CO2 par tonne de composants du tunnelier peuvent être évitées dès l’instant que des composants reconditionnés sont utilisés.