Germinal Peiro, président du département de la Dordogne, ne peut s’empêcher de voir des similitudes entre l’histoire de l’A69 et celle du contournement de Beynac. Déclaration d’utilité publique, avis favorables des services l’Etat, démarrage des travaux, des opposants déboutés à plusieurs reprises… Et au final, un arrêt des travaux ; avec une injonction à démolir les ouvrages dans le cas de la Dordogne. « Démolir est aussi compliqué et néfaste pour l’environnement que construire », précise l’élu. Pour cette raison, le délai de 12 mois imposé par la justice pour remettre le site en l’état n’a pas été respecté et la collectivité – soumise à des astreintes – a payé, à ce jour, 1,9 million d’euros. L’ancienne route pour accéder au château des Milandes, où vécut Joséphine Baker, a été remise en service, quand la nouvelle a été rabotée à l’automne 2023. Les piles du futur pont baignent, elles, toujours dans la Dordogne…
La boucle multimodale à la rescousse
L’objectif du contournement étant en premier lieu la sécurisation de la traversée de Beynac, dont la route est étroite et menacée par des chutes de pierres provenant de falaises, mais également l’accueil des 2,3 millions de visiteurs par an des châteaux de Beynac, Marqueyssac, Castelnaud et des Milandes. Une intervention sur cette zone était donc essentielle.
Démolir est aussi compliqué et néfaste pour l’environnement que construire
— Germinal Peiro, président du département de la Dordogne
« Nous avons considéré un périmètre plus large que le contournement de Beynac pour ce nouveau projet qui englobe la réouverture de la gare Castelnaud-Fayrac qui deviendra un pôle multimodal ; la voie verte ; la voie ferrée et la mise en circulation de navettes électriques durant l’été. Les règles de circulation sont modifiées avec la déviation des poids lourds – interdits à Beynac – et la création de sens uniques afin d’éviter les croisements. Les éléments construits sont réutilisés et nous évitons la dépense de plus de 30 millions d’euros dans des démolitions », détaille Germinal Peiro. Le projet routier passe en mode doux.
Cette boucle multimodale a été autorisée par la préfecture en novembre 2024 et frappée, presque aussitôt, de plusieurs recours. Les opposants contestent le retour de ce projet annulé plusieurs fois par la justice pour des raisons environnementales, et dont le site n’a toujours pas remis en état ; ils dénoncent, par ailleurs, une opération de « greenwashing ». De son côté, le département a saisi la cour administrative d’appel de Bordeaux en novembre dernier afin de faire valoir ce nouveau projet. « Je garde espoir que le bon sens l’emporte », estime le président de la Dordogne. Selon le rapport du 17 février 2025 de la chambre régionale des comptes, 39 millions d’euros ont déjà été engagés et il en faudrait 29,9 millions d’euros de plus pour achever le nouveau projet.
Le droit bafoue les services de l’Etat, le droit des citoyens et la décision des élus
— Germinal Peiro, président du département de la Dordogne
Dans le cas périgourdin, comme dans celui de l’A69, « le droit bafoue les services de l’Etat, le droit des citoyens et la décision des élus », estime-t-il. Renforcer les procédures en amont plutôt que d’aller au blocage d’un chantier irait plus dans le sens de l’intérêt général, selon Germinal Peiro. « Que serait devenue la Dordogne sans l’A89 ? questionne-t-il, le monde rural s’effondre, l’agriculture est en recul, les métropoles grossissent… L’équilibre du territoire n’est-il pas préférable à cela ? La multiplication de ces situations de blocage risque de figer les zones rurales. »