Les habitants de l'immeuble « Le Jardin suspendu » à Bordeaux (Gironde), dans le secteur de Brazza, sont des pionniers. Premiers à s'être installés dans ce quartier en devenir de la rive droite de la Garonne, ils étrennent ce projet urbain qui prévoit la mutation de 53 ha. A terme, quelque 450 000 m² SP y seront réalisés, dont pas loin des trois quarts seront dédiés au logement. De plus, les nouveaux arrivants occupent une position particulière. Leurs appartements ont été construits au-dessus d'un parking-silo, et ce, à la faveur d'une révision de la répartition initiale des lots.
Portée par le Comité ouvrier du logement (COL), société coopérative d'intérêt collectif HLM implantée dans le Sud-Ouest depuis soixante-dix ans, cette opération de 20 logements participatifs en accession sociale à la propriété aurait en effet dû s'ancrer dans le sol, sur sa propre parcelle. Et dans ce projet initial, le parking de 188 places devait être réalisé par Eiffage sur le terrain voisin. « Il n'était pas possible d'atteindre le nombre de places de stationnement souhaité sur un seul lot. Sans compter que les logements du COL se seraient retrouvés dans une situation défavorable. Notre bâtiment aurait en effet culminé à 16 m, à l'arrière d'immeubles montant jusqu'à 40 m construits en premier rideau sur le fleuve », explique Laëtitia Mérimée, architecte de l'agence Lemérou, maître d'œuvre de l'opération.

Optimisation des coûts. Après discussions, les différentes parties sont parvenues à la conclusion que regrouper les deux lots et superposer les programmes était une bien meilleure solution. L'ensemble du chantier a été confié à l'équipe formée par le COL et l'agence Lemérou, le parking étant construit en Vefa. Pour Imed Robbana, directeur général du COL, cette mutualisation a conduit à « une optimisation des coûts de construction. Toutefois, cette réalisation s'avère un peu plus chère que nos opérations habituelles, avec un coût de 1 664 euros HT par mètre carré habitable. » Le budget du chantier s'est élevé, au total, à 4,7 M€ HT, soit 2,7 M€ pour le parking et 2 M€ pour les logements.
Fusionner les deux opérations a aussi permis de penser un système constructif pertinent. « Nous avons pu concevoir les structures des logements et du parking en correspondance », remarque Laëtitia Mérimée. Dans ce bâtiment dont l'esthétique évoque d'anciens hangars industriels du secteur, le parc de stationnement sur trois niveaux en poteaux-poutres béton, enveloppé d'une grande jupe en tasseaux de bois, supporte deux longues halles parallèles : leur structure est en métal, et les murs en ossatures bois. Les pignons en béton préfabriqué assurent le contreventement. Un bâtiment intermédiaire abrite notamment un studio partagé.

« Volumes capables ». Le recours à une charpente constituée de grands portiques a autorisé des portées de 12,50 m, tout en répondant à la demande de l'urbaniste de Brazza, Youssef Tohmé, de produire dans ce secteur des « volumes capables ». Il s'agit de surfaces à prix abordables mais nues, hors des obligatoires points d'eau de la cuisine et de la salle de bains, et que le preneur peut finir d'aménager à sa guise. Ces grandes halles au plan libre ont enfin facilité l'organisation d'appartements aux typologies variées, du studio de 25 m² au logement de 100 m², qui répondaient aux capacités de financement des acquéreurs.
Ce système de superposition a généré une large surface disponible en toiture du parking, aménagée en terrasses et jardinets pour les logements. Et de leur position en hauteur, les habitants jouissent finalement d'échappées visuelles vers la Garonne.