«Le Conseil de la concurrence croit profondément en la politique de conformité, et souhaite s’y investir », a affirmé Bruno Lasserre, président de cette institution, à l’occasion d’un colloque organisé le 15 septembre. La manifestation a réuni plus de 200 acteurs du monde économique et juridique, dont nombre de représentants d’entreprises du bâtiment, des travaux publics et du négoce, autour de la présentation des premiers résultats de l’étude réalisée à la demande du Conseil de la concurrence sur les programmes de conformité.
La politique de conformité, appelée « compliance » outre-Atlantique, vise les démarches mises en place par des entreprises pour s’assurer du respect par leurs salariés de la réglementation, notamment en matière de concurrence. Selon l’étude faite par le cabinet Europe Economics pour le Conseil de la concurrence, un programme optimal doit comporter les cinq éléments suivants :
– l’implication et le soutien de la direction dans la mise en œuvre du programme ;
– des procédures claires, intégrant notamment des systèmes d’alerte interne efficaces, garantissant la protection de tout salarié signalant un manquement ;
– la mise en place d’une formation continue et d’actions de sensibilisation, particulièrement à destination des salariés les plus exposés aux risques de non-conformité ;
– des mécanismes de contrôle et d’évaluation crédibles (audits internes, externes, etc.) ;
– un cadre disciplinaire précis, qui témoigne de l’engagement effectif de l’entreprise et produit un effet dissuasif sur ses salariés.
Prise en compte de la conformité
Le Conseil de la concurrence précise n’être pas engagé par les conclusions de cette étude. Mais il entend développer la culture de conformité, et pour cela élaborer une véritable doctrine en la matière, afin de garantir aux entreprises une sécurité juridique suffisante. Point d’approche normative : son action pourrait prendre la forme d’un avis ou d’un communiqué de procédure, qui synthétiserait l’approche retenue et aiderait les entreprises à élaborer des programmes adaptés à leurs singularités. Bruno Lasserre souligne par ailleurs que « le Conseil a déjà développé une pratique décisionnelle qui prend en compte les efforts réels des entreprises auprès de leurs salariés ». Ainsi une entreprise incriminée, qui prend des engagements en matière de compliance, peut espérer une réduction d’amende de 10 %.
Des obstacles à surmonter
« La conformité au droit de la concurrence est une tâche ardue, mais c’est un enjeu économique et stratégique pour l’entreprise », témoigne François Garnier, président du Cercle Montesquieu et membre du comité de pilotage de l’étude sur la conformité. Il souligne notamment la difficulté de ciseler des formations adaptées au cas par cas à chaque salarié, et actualisées en permanence pour prendre en compte les nombreuses évolutions de la matière.
Autre difficulté : la compliance suppose une remontée d’informations avec un système d’alerte interne ; mais ce dispositif de « whistleblowing » peut se heurter à des spécificités du droit français (droit social, protection des données…)*.