Circulation Les giratoires, de la périphérie au centre-ville

Le rond-point s’est imposé depuis 20 ans aux entrées de ville. Efficace pour fluidifier le trafic automobile, il reste critiqué sur le plan de l’intégration urbaine. Le giratoire pourrait trouver une seconde jeunesse en centre-ville, sous la forme de « mini-ronds-points ».

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Ils sont environ 30 000 en France. Aucune agglomération, aucun bourg n’a pu y échapper. Les carrefours giratoires, appelés par abus de langage « ronds-points », fêtent cette année leur centième anniversaire. On en attribue la paternité, au début du XXe siècle, à l’urbaniste Eugène Hénard (1). Serait-il fier, aujourd’hui, du succès rencontré par son invention ? On peut en douter, tant la croissance du nombre des giratoires a suscité, dans le même temps, leur critique (2).

Produits de la logique automobile, ils paraissent incompatibles avec un usage civilisé du territoire, et semblent intrinsèquement antiurbains. Selon Eric Alonzo, un architecte qui a retracé leur histoire (voir interview page de droite), la création des giratoires remonte aux ronds-points des chasses royales et aux aménagements des forêts d’Ile-de-France par Louis XIV. Plus tard dans le siècle et au siècle suivant (XVIIIe et XIXe), on aménage de nombreuses places de forme circulaire dans les villes européennes.

Une mécanique efficace. Depuis le début du XXe siècle et l’apparition de l’automobile, les giratoires fonctionnent toujours selon les principes simples édictés par Hénard : le centre du carrefour – là où se situent les points de conflits lors du croisement des véhicules – est rendu inaccessible par l’installation d’un obstacle infranchissable. Les véhicules doivent tourner toujours dans le même sens et pénétrer dans l’anneau de giration sous un angle de 45°, ce qui permet d’atténuer l’impact des chocs éventuels. Enfin, il faut ajouter la priorité de circulation aux véhicules situés sur l’anneau, règle instituée d’abord en Angleterre, dans les années 1960, qui fluidifie grandement le trafic. Adoptée en France, en 1984, cette modification du Code de la route stimule la création de ronds-points à la périphérie des villes : en dix ans, 17 000 nouveaux giratoires seront créés !

Une figure à réhabiliter ?

Le giratoire standard ne brille pas par son insertion dans l’environnement : dans la majorité des cas, on se borne à placer une sculpture plus ou moins heureuse en son centre et l’on néglige les aménagements latéraux, qui pourraient favoriser leur franchissement par les piétons ou les cyclistes. Cependant, les nouvelles politiques en cours visant à mieux partager la voirie incitent à repenser ce dispositif, qui reste un système de croisement efficace.

Le développement des tramways, qui traversent le giratoire en son centre, a provoqué une première mutation de cette figure que l’on pensait figée.

On peut sans doute aller plus loin, ainsi que le prouvent les giratoires innovants réalisés en Espagne ces dernières années : à Barcelone, le carrefour de la « Plaça de las Glories Catalanes » – conçu par l’architecte Arriola – abrite en son centre un jardin et, sous l’anneau, des places de stationnement. On peut aussi augmenter la qualité de traitement du centre et de l’anneau, dans le sens d’une plus grande liaison avec la topographie environnante. On découvre aussi que le giratoire peut remplacer avantageusement les bretelles d’autoroutes, tout en consommant beaucoup moins d’espace.

Le mini-rond-point en centre-ville. La redécouverte de ces avantages n’empêche pas certains professionnels de l’aménagement de penser que les giratoires doivent être purement et simplement supprimés.

Mais, chassés des périphéries, les giratoires ne seraient-ils pas promis à un grand avenir… dans les centres-villes ?

C’est ce que veut croire l’ingénieur et urbaniste Yan Le Gal, pour qui tout est une question d’échelle : « Les grands giratoires sont dangereux, car la vitesse élevée des véhicules peut être source d’accidents, notamment par la prise de risques nécessaire pour y pénétrer ». Un inconvénient que ne connaissent pas les mini-ronds-points. Selon Yan Le Gal, ils permettent de civiliser l’espace « en responsabilisant l’automobiliste qui se régule sur le piéton ».

Replacer le piétonau centre de la mobilité. Son utilisation dans les villes, alliée à la mise en double sens de ses voies d’accès, pourrait même replacer le piéton au centre de la mobilité : « Actuellement, on installe des carrefours à feu qui forment de véritables points de congestion, et l’on oppose l’automobiliste au piéton. Or, réduire l’espace de voirie réservée à l’automobile au profit d’autres modes – vélos, piéton, tramway – n’a de sens que si on fluidifie la circulation, ce qui est possible par l’aménagement des mini-ronds-points ». Un atout qui laisse augurer d’un nouvel avenir pour le giratoire en ville.

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