Filiale de Vinci Construction spécialisée dans le petit cycle de l’eau (captage et stockage d’eau brute, production et distribution d’eau potable, collecte et transfert d’eaux usées), Sogea Environnement a présenté en ce début d’année sa feuille de route RSE qui fixe ses objectifs de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre et de transformation de son activité pour plus de sobriété et de performance environnementale.
« Nous sommes alignés sur l’objectif du groupe Vinci de réduction de 40% des émissions de carbone par rapport à 2018 à l'horizon 2030 », explique Didier Deschanel, directeur délégué de Sogea Environnement. « Et pour cela nous travaillons sur nos 3 postes principaux d’émissions : nos engins de chantier, nos véhicules de fonction et de service et enfin les camions. Pour les engins de chantier, il existe peu de matériels purement électriques encore, même si nous avons testé des pelles à pneus électriques et que nous allons en acheter dans les mois qui viennent. Nous faisons donc principalement un effort sur les carburants de substitution (carburants végétaux pour la neutralité carbone). Pour les véhicules de fonction, nous sommes volontaristes sur le passage aux véhicules électriques. Depuis début 2025, 80% de nos commandes de véhicules le sont pour des véhicules tout électrique. Et nous visons une flotte tout électrique en 2028 ou 2029. »
Une stratégie RSE venue du terrain et adaptée au terrain
« Notre feuille de route a été construite par le comité de direction mais sur la base des remontées de terrain qu’on pouvait avoir et de la compréhension des enjeux locaux », raconte Didier Deschanel. «Ensuite la réalité de l’appropriation de ce plan va se faire en agence au travers des business plans stratégiques annuels. En effet, dans son plan stratégique, chaque chef d’agence prend des engagements sur des actions à mener sur les différents thèmes. Ces solutions dépendent des enjeux locaux et donc évidemment on ne mènera pas les mêmes actions à l'agence de Lille qu'à l'agence de Marseille, explique-t-il. « Pour illustrer : quand on fait une tranchée dans le sol on ne trouve pas les mêmes matériaux selon le territoire. A certains endroits, ils sont réutilisables quasiment tels quels - c'est assez rare, mais ça peut arriver – à d’autres, ils peuvent être très argileux, avec une forte présence d'eau et donc très difficiles à réutiliser dans des tranchées. Les opérations à mener pour les réutiliser ne vont donc pas être les mêmes. Mais c’est la compilation de toutes les actions menées dans chacune de nos agences qui va nous permettre d’atteindre nos objectifs », conclut-il
Consommer moins d'eau, d'énergie et de granulats
Côté sobriété, Sogea Environnement vise une réduction de 30% de sa propre consommation d’eau. « Cela concerne plusieurs de nos usages », confirme Didier Deschanel. « Des usages domestiques pour le nettoyage des véhicules ; sanitaire évidemment ; et dans le process de rinçage des canalisations ». En effet avant de les mettre en service, il faut les désinfecter et les rincer. L'idée est alors d'optimiser ce rinçage. En jouant part exemple sur la quantité d’eau injectée dans la canalisation. « La réglementation impose aujourd’hui 3 volumes d’eau. Mais en pratique, dans certains cas, deux volumes pourraient suffire », juge le directeur de Sogea Environnement. Autre idée : étudier en temps réel l’état bactériologique de l’eau en sortie de rinçage pour l’arrêter dès que le niveau sanitaire requis est atteint. « On peut aussi imaginer des solutions de rinçage « à sec » avec des ultra-violets ou de la vapeur d’eau », évoque Didier Deschanel.
"Utilities" toujours, après l'eau vient l'énergie : Sogea Environnement mène à l’heure actuelle plusieurs projets utilisant l’Intelligence Artificielle pour permettre d’optimiser les consommations énergétiques des stations d’épurations. « Nous avons l'ambition de proposer, à terme, des stations pilotées grâce à l’IA, et notamment équipées de panneaux photovoltaïques pour les rendre autonomes », annonce Didier Deschanel. « Autre enjeu fort qui arrive : le traitement des « nouveaux polluants » qu'il va falloir assurer. Je pense notamment à tout ce qui est microplastiques, et notamment les PFAS qui sont des polluants éternels ».
Enfin, pour éviter des aller-retours en camion et faire des économies de matière première, Sogea Environnement vise 100% d'opérations utilisant des matériaux réemployés ou recyclés. « Il s’agit des déblais que l’on extrait quand on pose une canalisation », explique Didier Deschanel. « Aujourd’hui, ils sont majoritairement envoyés en décharge et on ramène des matériaux « neufs » de carrière pour remblayer. Notre ambition est que d’ici 2030, il y ait, à coup sûr, dans les matériaux que l’on utilise en remblais, des matériaux recyclés ou réemployés », détaille-t-il. « Pour le réemploi, il s'agit de matériaux, qui, même une fois extraits conservent des caractéristiques mécaniques qui permettent de les réutiliser tels quels ou après un traitement léger. Pour les autres matériaux, nous pouvons faire de la correction granulaire. Cela consiste à ramener une fraction de matériaux de carrière (10 ou 20%) que l’on mélange avec ces matériaux extraits, avant de les remettre dans la tranchée. Et puis, bien sûr, il existe aussi des matériaux recyclés comme le béton concassé. L’idée est d’être capable de mettre en œuvre des matériaux qui auront des performances au moins équivalentes à des matériaux "neufs" », conclut-il.
Sans-tranchée
Mais, chez Sogea Environnement, l’impact de cette feuille de route se fera sentir bien au-delà. Ce sont en effet ses techniques de chantiers même, et les métiers correspondants, qui seront appelées à se transformer. « L'un des plus gros impacts, c'est le développement des travaux sans tranchée », confirme Didier Deschanel. « Ils génèrent moins de gêne pour les usagers, moins de nuisances (bruit, poussière). Ils sont réalisés plus rapidement et permettent des économies supplémentaires de CO2 - de 90 à 95% par rapport à un chantier traditionnel - en évitant le transport de matériaux par camion », énumère Didier Deschanel.
Sogea Environnement ambitionne ainsi de devenir un des acteurs majeurs de cette technique et d’atteindre plus de 15% de chantiers réalisés sans tranchées.
Mais selon la méthode choisie, cela se fera plus ou moins facilement. « Pour la rénovation, la technologie de chemisage – l’introduction d’une gaine que l’on fait durcir par polymérisation pour recréer un tuyau dans le tuyau – ne se prête pas encore à toutes les canalisations, comme celles d’eau potable ou des réseaux de chaleur », concède Didier Deschanel. « Cela dépend de l’état de la conduite et de la pression de l’eau transportée », explique-t-il. « Pour des conduites neuves en revanche, on utilise de plus en plus des micro-tunneliers : on installe une canalisation à partir d’un puits de poussée vers un puits de sortie ».
Côté métiers, les profils seront dès lors différents. « L’IA, par exemple, nécessite des data analysts. Nous en avons recruté. Pour les travaux sans tranchée, les métiers sont plus technologiques que la pose de canalisation traditionnelle. Le chef de chantier d’unité de chemisage, devra devenir en quelque sorte un opérateur de technologie centralisée. Pour cela il faudra qu'il ait une formation dédiée. Pour faire du sans tranchée, il faut en effet commencer par faire passer des robots qui vont aller inspecter la canalisation, la réparer, raboter les racines qui y ont pénétré…. C’est un pilotage différent. »
Nouveaux métiers
Sogea Environnement souhaite également féminiser ses effectifs. « A deux niveaux », précise Didier Deschanel. « Sur les chantiers d’abord. C'est l’aspect le plus long à faire évoluer dans les mentalités. Parce que le métier de canalisateur reste un métier qui, dans certains cas, peut être jugé plus ardu à exercer et ce malgré l’arrivée de matériels modernes qui en limitent fortement les aspects les plus difficiles. Il est plus facile d’avoir des conductrices d’engins et de camions. Le deuxième niveau, c’est l’encadrement (cheffe de chantier, conductrice de travaux, cheffe de secteur…). L’objectif est d’avoir 30% de femmes dans l’encadrement à l’horizon 2030. Promouvoir nos métiers auprès des jeunes femmes sorties d’école est une de nos priorités », conclut-il.