« Ce que le président n’a pas fait pendant son premier quinquennat, il peut le faire dans le deuxième », Bruno Cavagné (FNTP)

Le président de la Fédération nationale des travaux publics, Bruno Cavagné, se réjouit de la réélection d’Emmanuel Macron. Pour autant, il ne sous-estime pas l’ampleur des défis que devra relever le chef de l’Etat, au premier rang desquels la transition écologique et la fracture territoriale.

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Bruno Cavagné
Bruno Cavagné, président de la Fédération nationale des travaux publics.

Comment avez-vous accueilli la réélection d’Emmanuel Macron ?

Ce résultat, avec un écart plus large qu’attendu, est évidemment une bonne nouvelle et un soulagement. Néanmoins, les problèmes du pays n’ont pas disparu avec la réélection d’Emmanuel Macron. Les enjeux de la fracture territoriale comme de la transition écologique sont toujours là, et même plus présents que jamais. D’ailleurs, la victoire d’hier soir est restée relativement modeste. Je n’ai vu ni triomphe ni grandes scènes de liesse dans les rues.

Quel sera l’enjeu des semaines à venir pour le président de la République ?

Passer des paroles aux actes. Présenter ce que l’on va faire concrètement durant ces cinq ans sur les retraites, les infrastructures, le logement… Quand, avec le président de la Fédération française du bâtiment (FFB), Olivier Salleron, nous appelons à la création d’un ministère élargi de la construction et de l’aménagement du territoire, c’est bien de cela dont il est question. Car il nous faut agir sans attendre en embrassant tous les sujets. Expliquer comment nous allons mener et surtout financer une transition écologique qui ne laisse personne sur le bord de la route. L’annonce d’un premier ministre en charge de la planification écologique va dans ce sens. 

Qu’attendez-vous sur ce thème de la transition écologique ?

D’abord que soit clarifiée la question de son financement. Lorsque nous avons invité les candidats le 24 février dernier lors du Forum des Travaux Publics, nous avons pu constater qu’ils avaient assez peu réfléchi à ce sujet des moyens. Je me réjouis que le président ait décidé de faire de la transition écologique le coeur de son quinquennat avec une ou un Premier ministre chargé de la mettre en oeuvre. Pour l’heure, j’entends parler d’y consacrer une enveloppe de 50 milliards en 2022, mais tout reste à confirmer et à préciser. 

Le terme de sobriété a récemment été utilisé par le président. Faut-il y voir sa conversion au concept de décroissance ?

Je pense qu’il fait d’avantage référence à la nécessité de nous montrer plus économes et de faire évoluer un certain nombre de nos pratiques. Nous progressons collectivement et à titre individuel depuis des années par le tri de nos déchets, par notre attention croissante aux consommations d’eau et d’électricité. Evidemment, il faut aller encore plus loin, mais je ne pense pas qu’il se projette dans un monde qui aurait soudainement moins besoin d‘énergie ou qui verrait les tendances démographiques de fond se renverser brusquement.

Cette élection a confirmé une corrélation entre la nature du vote et l’éloignement du centre-ville. Est-ce un nouveau témoignage de problématiques de mobilités irrésolues ?

Ce diagnostic, notre fédération l’avait déjà posé en 2017. Il faut garder à l’esprit que ces questions de mobilité ont été le déclencheur du mouvement des gilets jaunes. Pour des millions de français dont le seul moyen de transport est la voiture, il était insupportable que l’on touche au prix du carburant. Il faut donc continuer de travailler sur les mobilités, aussi bien dans les métropoles avec du transport en commun que dans des milieux ruraux ou semi-urbains en assurant la maintenance des routes et en développant les infrastructures. Reste maintenant à définir une méthode. Par exemple, l’Etat va-t-il garder ses 10 000 ou 12 000 kilomètres de routes ou bien les transférer aux collectivités locales ? Il semblerait que ce soit plutôt la deuxième option qui se dessine. Or, je pense qu’une part de la solution tient justement dans cette capacité à s’appuyer davantage sur les élus locaux.

Appelez-vous à franchir un nouveau pas vers plus de décentralisation ?

C’est, en tout cas, le message que je passe à mon modeste niveau au président réélu. Les élus locaux, mais aussi les corps intermédiaires permettent de prendre le pouls du pays et parfois d’éviter de se perdre sur des chemins dont on peine ensuite à revenir. 

Pensez-vous qu’il va cette fois emprunter cette direction ?

Il a déjà nommé Jean Castex qui venait des territoires au poste de Premier ministre, c’était un premier signal qui a démontré qu’il comprenait les territoires. Le chef du gouvernement a d’ailleurs beaucoup fait pour les infrastructures et les mobilités durant deux ans. Pour la suite, tout dépendra du gouvernement qui sera nommé. Sur qui Emmanuel Macron va-t-il s’appuyer ? Nous avons besoin de personnes qui font, qu’ils soient de la société civile ou qu’ils soient des politiques. Ce que le président de la République n’a pas fait pendant son premier quinquennat, il peut le faire dans le deuxième. Que peut-il y perdre maintenant que la question de sa réélection ne se pose plus ? Evidemment, l’équation est complexe, mais comme il est à la fois intelligent et imprévisible, je pense qu’il va nous surprendre.

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