La future usine de panneaux solaires photovoltaïques du français Carbon, sur la zone industrialo-portuaire (ZIP) de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), a franchi une nouvelle étape avec l'obtention du permis de construire et des autorisations environnementales. Son statut de projet d'intérêt national majeur et les efforts pour réduire au maximum son impact ont facilité l'instruction du dossier, qui a duré moins d'un an. Le projet Carbon, dans lequel l'industriel éponyme investit 1,7 Md €, vise une capacité de 5 GWc de cellules et 3,5 GWc de modules par an, pour un total de 11 millions d'unités. Ce sera la première installation en Europe à maîtriser toute la chaîne de valeur : de la croissance des lingots de silicium à l'assemblage des modules, en passant par la découpe des wafers (fines plaques de matériau semi- conducteur) et la fabrication des cellules.
Avant de s'étendre sur 300 000 m2 SP (1), Carbon doit tenir compte de plusieurs contraintes, à commencer par la proximité de l'eau de la darse qui impose, pour éviter les problèmes potentiels de submersion, des plateformes à 2,40 m minimum au-dessus de la mer. En raison de la mauvaise qualité des sols et du risque sismique, les constructions seront fondées sur pieux. Elles doivent aussi pouvoir résister au souffle en cas d'explosion d'une des usines voisines, tout en limitant les nuisances sonores et les poussières. A cela s'ajoute l'aménagement de deux zones Natura 2000 de 8 ha au total sur les 45 ha du terrain, cédé par le Grand port maritime de Marseille via un bail emphytéotique de 70 ans. Enfin, la future gigafactory est classée Seveso seuil haut.
Jumeau numérique
L'industriel prévoit d'attribuer une dizaine de macrolots, d'une valeur comprise entre 50 et 120 M€. Les travaux démarreront en octobre prochain par le défrichage et la dépollution des sols. Pour l'heure, les équipes techniques de Carbon, épaulées par plusieurs ingénieries dont Ingérop et Groupe-6 Architectes, mènent des études détaillées. « Nous allons créer un jumeau numérique qui servira à identifier et à anticiper le fonctionnement futur de l'usine. Après un lancement de la production fin 2027, il y aura une montée en puissance progressive des lignes de production », résume Jérôme Marchais, directeur construction et coordination des projets pour Carbon.
Dans une logique de sobriété, l'usine, qui aura besoin de 240 MW de puissance électrique pour fonctionner 24 h/24, produira elle-même une partie de son énergie. Outre la couverture de 44 % des 120 000 m2 de toitures avec des panneaux photovoltaïques, Carbon imagine un partenariat avec la start-up Sweetch Energy pour transformer en électricité l'énergie qui se libère naturellement quand l'eau douce rencontre celle de mer.
Sobriété en eau et en carbone
La maîtrise de la consommation s'applique justement à l'eau industrielle, les besoins étant estimés à 4,5 millions de m3 par an. Une des pistes d'économies supplémentaires consisterait à refroidir le process par l'eau de mer ou avec un réseau de géothermie dans lequel l'eau circulerait en réseau fermé. Par ailleurs, béton bas carbone pour le dallage, isolants biosourcés et menuiseries recyclées sont de rigueur.
Les dirigeants de Carbon participeront au débat public, lancé le 2 avril, sur l'avenir de la ZIP, dont l'Etat veut faire une « zone industrielle bas carbone ». Ces trois mois seront l'occasion de partager leur expérience et d'exprimer leurs besoins en termes d'infrastructures routières, de logement et de formation. A terme, Carbon emploiera 3 000 salariés.
(1) L'usine sera composée de salles blanches, d'entrepôts, d'un immeuble tertiaire avec cantine, d'un parking-silo de 750 places, d'une station de traitement des eaux, d'une zone de stockage de gaz…
