80 % de la population héraultaise se concentre sur 13 % du département de l’Hérault : le littoral. Soumis à forte pression démographique et touristique, il reste fragile. « Nos stations sont menacées par l’érosion du trait de côte, la montée de la mer et des épisodes cévenols. Mais faute d’avoir pris une claque climatique, elles ne mesurent pas assez le risque » estime Daniel Andersch, chef de mission à la DDTM 34.
A l’inverse des Pays-Bas, où « le sol et l’architecture sont perçus comme temporaires » témoigne le paysagiste Fréderic Rossano. Le gouvernement y établit des plans de prévention selon l’avancée des connaissances scientifiques, « dans une logique de développement durable qui se veut non définitive ». Echaudé par des travaux censés sécuriser sa côte mais qui ont coupé la dynamique entre l’estuaire et la mer, ce pays réaménage désormais son territoire en laissant « de l’espace pour la rivière ».
Une relation plus souple au paysage dont pourrait s’inspirer la France. « Sculpter un bâtiment pour faciliter l’écoulement rapide de l’eau » lance l’architecte urbaniste François Leclerc, car « tenir compte du risque ne signifie pas renoncer à construire. » A la Grande-Motte, l’enjeu passe par la densification. « Notre projet ville-port est aujourd’hui le seul moyen de nous développer en préservant l’héritage de Balladur. La touche finale face à des promoteurs avides » résume le maire, Stéphan Rossignol.

Place à la nature
Qu’il soit question de reconstruire la ville sur la ville ou de réfléchir à des formes d’habitat flottant, les architectes doivent intégrer la question de l’aménagement du territoire. « 50 ans après la mission Racine, nos stations entament une mue nécessaire dans le cadre du plan Littoral 21. Nous les encourageons à adosser à leurs projets, une vision prospective intégrant le devenir du rétro littoral : que va-t-il se passer quand les étangs vont s’ouvrir à la mer où que l’aéroport sera relié au port ? » interroge Daniel Andersch qui appelle aussi à des actes de renaturation ou d’abandon de l’urbanisation pour préserver l’identité du littoral.
D’ailleurs pour François Leclerc, « la nature n’est pas qu’un moyen d’embellissement. Elle devient un objet technique par rapport à la rétention d’eau, la lutte contre les îlots de chaleur et donc la qualité de vie. » Pourtant, le paysagiste arrive souvent en fin de commande. « Or créer des espaces naturels le long d’un fleuve permet d’élargir le périmètre de protection des crues, coûte moins cher que de redimensionner des digues, et l’argile extraite peut être vendue » plaide Fréderic Rossano. Autant d’enjeux communs, pas toujours partagés.
« Chaque station est gérée individuellement, peut-être à cause de nos limites administratives » déplore Stéphan Rossignol. « Il faudrait instiller une forme de coopération littorale, à l’image de la filière de l’eau qui raisonne par bassin versant » renchérit Daniel Andersch. Un avis partagé par François Leclerc. « La constitution administrative s’est bâtie sur l’histoire alors que les événements climatiques nous ramènent à un système géographique commun. »