Trente-cinq ans après sa réalisation, le quartier des Courtillières, construit par Emile Aillaud, reste une enclave mal reliée au centre-ville de Pantin, à l'écart aussi d'Aubervilliers et de La Courneuve. La réhabilitation des logements, entreprise sous la vigilance d'Emile Aillaud lui-même pour les tours, s'est limitée à des réparations techniques pour les bâtiments bas enserrant le parc central ; mais elle n'a pas comblé le déficit d'équipements dont souffre cette cité de 6 000 habitants.
La maison de quartier que Suzel Brout vient de construire répare ce manque en rassemblant, sur 2 000 m2, une bibliothèque, une halte-garderie, des bureaux d'aide sociale, un restaurant, des locaux associatifs et d'activités. Le pari que soutient cette construction est risqué puisque le terrain, site de l'ancienne annexe de la mairie également intégrée à l'édifice, n'est central ni par rapport au quartier, ni par rapport à la commune. Il se démarque surtout par la programmation d'un édifice unique, à rebours des politiques actuelles de quartier qui font un principe de l'éparpillement d'équipements-relais à moins de 250 m de chaque logement.
Le pari était ici de rassembler, sur un seul bâtiment, une charge symbolique et des financements suffisants pour tirer vers le haut un quartier qui cherche encore son équilibre.
L'architecte a traduit cet objectif en donnant au bâtiment un vrai statut d'équipement public, c'est-à-dire en élargissant son emprise à toute l'assiette du terrain et en alignant la construction sur le boulevard. Les matériaux utilisés sont sobres et de qualité. Bien que largement vitré, le socle exprime sa solidité par un béton de gros gravillons. Les capots retournés des menuiseries aluminium imitent des profils d'acier. A l'étage, des brise-soleil de grande portée en béton acidé protègent les salles contre l'ensoleillement devant les grands vitrages qui libèrent les vues.
A l'intérieur, le bâtiment a été pensé comme un véritable lieu de vie où les transparences mettent en relief la multiplicité des programmes, invitent à la rencontre et créent une atmosphère ouverte et conviviale autour de la distribution. L'échelle des vides donne à l'édifice sa qualité d'équipement : le hall central, l'escalier ample éclairé d'une verrière zénithale, la bibliothèque perchée sur le toit en attique, et la terrasse offerte aux enfants de la halte-garderie, dans l'axe d'une percée à venir vers le parc central du quartier.
FICHE TECHNIQUE
Maîtrise d'ouvrage : ville de Pantin.
Maîtrise d'oeuvre : Suzel Brout, architecte ; GEC, bureau d'études.
Surface : 2 070 m2 HON. Coût travaux : 15 millions de francs HT.
Entreprise générale : Bouygues.
PHOTOS :
L'équipement dans son quartier : les tours (au fond) et l'immeuble bas enserrant le parc (à droite)
La façade d'entrée. A droite de la porte, un bar placé dans l'angle accueille le visiteur. Ci-contre, triple hauteur sous la verrière.
