Un office public de l'habitat (OPH) est autorisé à réaliser un lotissement constitué de 21 lots. Par arrêté, le maire de la commune concernée par cette opération accorde un permis de construire sur le lot n° 21 destiné à la réalisation de 20 logements locatifs.
Les propriétaires d'un ensemble immobilier contigu à la parcelle du lot n° 21, objet du permis de, constatent que cette autorisation est illégale et demandent à ce que la responsabilité sans faute de l’OPH soit engagée.
Ils demandent également à ce que soient indemnisés leurs préjudices en réparation des troubles dans leurs conditions d'existence résultant de la construction litigieuse, ainsi qu’au titre des mesures compensatoires à mettre en œuvre, et de la perte de valeur vénale de leur bien immobilier.
Le tribunal administratif rejette leurs demandes, ce que la cour administrative d’appel infirme.
Dans cette espèce, la cour administrative d’appel considère que le permis de construire de l’ouvrage public ayant été accordé en méconnaissance des règles d'urbanisme applicables, les intéressés ne pouvaient s'attendre à une telle réalisation sur le terrain contigu à leur propriété et qu’ainsi la responsabilité sans faute de la commune pouvait être engagée.
Le Conseil d’État rappelle pourtant que pour retenir la responsabilité sans faute du propriétaire d'un ouvrage, le préjudice allégué doit revêtir un caractère anormal.
Or, le caractère anormal d’un tel trouble doit être apprécié au regard de son caractère permanent, mais surtout par comparaison aux troubles qui affectent tout résident d'une habitation située dans une zone urbanisée, et qui se trouve normalement exposée au risque de voir des immeubles collectifs édifiés sur les parcelles voisines.
Ainsi, la responsabilité sans faute d’un propriétaire d’ouvrage public ne pourra être engagée que si les troubles permanents qu'entraîne la présence de l'ouvrage public sont supérieurs aux troubles normaux qu’encourt tout résident d’une zone urbanisée.
Le Conseil d’État censure donc la cour administrative d’appel dès lors que l'illégalité affectant une autorisation d'urbanisme ne saurait par elle-même suffire à caractériser l'anormalité du préjudice.
Edouard Guillou, avocat
Conseil d'État, 6e et 1re chambres, 28 septembre 2016, OPH Gironde Habitat, n° 389581%%/MEDIA:1223614%%