Le rocher numéroté « 3 M », un bloc de basalte de 5 t, arrive par les airs, pendu par d’énormes sangles à l’extrémité du bras de la pelle sur pneus de l’entreprise Calvière E.V. Il provient d’un stock - à quelques centaines de mètres de là, derrière les serres du parc Borely - de plus d’un millier d’un millier de blocs de toutes formes et de toutes tailles dont une centaine dépassent la tonne.
Deux ans de collaboration
La majorité d’entre eux a été extraite de la carrière de Saint-Thybery dans l’Hérault, le plus massif pesant… 7 t ! Rien que du basalte gris, sombre et noir dont la texture et la couleur en font un matériau conforme à l’esprit du jardin japonais. Ces pierres sont destinées à celui que crée, sur 1 700 m2, la Direction des parcs et des jardins de la cité phocéenne dans la partie botanique du parc marseillais. Dessiné par Dominique le Fur, il est le fruit d’une collaboration de 2 ans entre Marseille et Kobe et sera inauguré en 2011 dans le cadre du 30e anniversaire du jumelage des deux villes, Kobe ayant offert, pour l’occasion, 3 lanternes de pierre. Masayuki Morita (80 ans) et Michihiro Onishi (70 ans) deux expérimentés patrons de PME de paysage nippones et Mitsuru Harada, responsable adjoint de la planification du Département E.V. de Kobe, sont arrivés en renfort pour la partie « âge de pierre » du chantier. L’équipe japonaise, complétée par l’interprète Hisako Tatara, venue de Montpellier, s’est concentrée sur la réalisation, dans les règles de l’art, des deux pôles rocheux du projet.
Un éboulis au-dessus de l’eau
Le premier, la cascade, doit former une masse compacte d’une douzaine de blocs et avoir l’air aussi naturel que s’il était posé là depuis toujours. Une source en jaillira pour se déverser dans 5 bassins jusqu’au petit lac dont une partie sera aménagée en espace de « purification végétale », le lit en béton hydrofuge de la rivière artificielle étant déjà construit. L’autre pôle, en bas, se situe près de l’entrée, non loin du jardin zen à créer. Le premier contact visuel s’établit ici : l’œil se pose sur un éboulis surplombant l’eau, le chaos minéral s’ordonnant autour d’un bloc sentinelle dominant dont les formes rappellent celles d’un sphinx. Pour les maîtres japonais qui l’ont choisi et positionné avec soin, il symbolise « le visage intérieur de Marseille ». Ce chantier, exercice de force, de précision et de création artistique est une course contre la montre, l’équipe japonaise ne pouvant rester qu’une semaine. Elle doit assurer le travail avec les 3 hommes et les 4 machines de l’entreprise Clavière E.V. et former l’équipe de maîtrise d’œuvre de Dominique le Fur (Daniel Chotard, sculpteur chargé de la partie rocher, Enzo, un spécialiste français des jardins japonais et Alain Jacquemmoz, le fontainier). Pour la Direction des parcs et jardins, Daniel Garnier, du bureau d’études, suit l’opération. « Morita et Onishi ont commencé à sélectionner les rochers sur la plateforme de stockage, s’étonne le technicien. Au premier coup d’œil, on voyait qu’ils plaçaient déjà les pierres dans leur tête en fonction de leur emplacement ».
Une palette nipponne
Les rochers repérés sont affectés d’un numéro et d’une lettre précisant leur positionnement. Tracé à la bombe, un point rouge cerclé signale la face devant rester visible. Autour, une trentaine d’arbres de 20 espèces différentes sera plantée. La palette végétale, a été composée par Michel Mazet, responsable du Jardin botanique avec 300 arbustes de 28 espèces ainsi que des centaines de plantes vivaces et aquatiques.
