3. Les clauses du term sheet faisant l'objet d'une attention renforcée

Financement -

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La récente crise du crédit a placé les équipes de syndication des banques en première ligne et les a conduites à introduire dans les term sheets bancaires et autres documents de financement des clauses - fréquentes sur le marché des financements LBO - jusqu'alors peu pratiquées dans les financements immobiliers et faisant dépendre les conditions du crédit ou certains engagements de l'emprunteur de l'issue de la syndication. Certaines clauses traditionnelles sont également devenues plus sensibles.

Clauses liées au marché secondaire

Même à supposer que les banques signataires du crédit se soient engagées à mettre celui-ci en place et que l'engagement des banques représente donc dès l'origine l'intégralité du crédit, il n'en reste pas moins que les prêteurs qui ont vocation à syndiquer une partie de leur engagement souhaitent prendre en compte cette syndication.

Outre l'assistance traditionnelle du prêteur, il peut dans ce cadre être imposé à l'emprunteur un engagement aux termes duquel, pendant une période donnée, l'emprunteur - le cas échéant ses actionnaires - s'interdit de solliciter le marché bancaire pour un financement concurrent du financement octroyé. La finalité de cette clause, dite de clear market, est de diriger vers la syndication l'ensemble des intervenants désireux de devenir prêteurs de l'emprunteur pendant cette période.

Ayant pour conséquence de brider la capacité d'emprunt, donc d'investissement de l'emprunteur pendant la période concernée, cette clause est souvent âprement négociée. Elle permet aux banques de mettre toutes les chances de leur côté pour parvenir à la syndication recherchée. Pour autant, elle ne garantit pas le succès de celle-ci ; c'est la raison pour laquelle une autre clause faisant dépendre la marge du crédit du résultat de la syndication peut être prévue. Cette clause, dite de market flex, est définie par Pierre Vernimmen, comme une « technique qui consiste à augmenter les marges d'un crédit offert sur le marché de la syndication bancaire quand celle-ci fait apparaître une demande en montant qui est inférieure à l'offre » (www.vernimmen.net).

Ainsi, s'il apparaît que la syndication ne peut être menée à bonne fin aux conditions financières proposées, les parties conviennent que, dans les limites convenues, les modalités du crédit seront modifiées dans des conditions généralement défavorables à l'emprunteur (augmentation de la marge ou upward flex) pour permettre à la syndication d'aboutir ou compenser l'échec de la syndication et la conservation du risque concerné par la banque prêteuse. Bien entendu, cette clause de market flex doit être exécutée avec diligence et de bonne foi par les prêteurs initiaux pour éviter toute contestation, en particulier quant à son caractère potestatif (lorsque l'exécution de la clause dépend de la seule volonté d'un des contractants).

À ces clauses s'en ajoutent d'autres plus classiques, mais pour lesquelles une vigilance particulière reste de mise.

Clauses traditionnelles d'une actualité certaine

Tout d'abord, il est nécessaire de rappeler l'importance des ratios, et en particulier du ratio LTV (loan to value) correspondant au rapport entre l'encours du crédit et la valeur de l'immeuble sous-jacent. L'incertitude actuelle quant à l'évolution des taux de capitalisation conduit à diminuer ce ratio pour anticiper une éventuelle baisse des valeurs vénales.

Il faut ensuite revenir sur les clauses qui font dépendre la mise à disposition des fonds d'éléments futurs et extérieurs aux parties de nature à modifier l'économie du financement. L'imprévision n'étant, comme on le sait, pas reconnue en droit privé, seules des stipulations spécifiques peuvent conduire à suspendre, résilier ou modifier les conventions conclues qui ont force obligatoire et doivent s'exécuter conformément à leur terme.

La MAC clause

La clause la plus connue - la plus redoutée aussi - est la MAC clause (Mac pour major adverse change), qui permet aux prêteurs de ne pas libérer les fonds ou de mettre le crédit en défaut en cas de survenance d'un événement significatif défavorable affectant l'emprunteur, ses activités, les immeubles financés, voire les sûretés consenties. Ces clauses sont souvent négociées pour déterminer s'il doit exister ou non un lien entre l'événement considéré et la capacité de l'emprunteur à exécuter ses obligations au titre du crédit, et si l'événement doit être en relation directe avec l'opération ou peut être général (à titre d'exemple, il peut être prévu que l'évolution du marché immobilier ne sera pas considérée comme un événement significatif défavorable, cette concession pouvant être consentie par la banque dès lors que les conséquences d'une telle situation sont couvertes par ailleurs via le respect d'un niveau de ratio LTV dont le dénominateur est la valeur de l'immeuble directement dépendante de l'évolution du marché immobilier). La MAC clause peut être appelée à jouer tant pendant la période comprise entre la date de signature du term sheet et la date de signature des documents de financement que postérieurement à celle-ci.

Les clauses dites de « circonstances nouvelles » ou de « perturbation de marché »

De manière plus technique, une attention particulière est désormais portée aux clauses dites de « circonstances nouvelles » ou de « perturbation de marché ».

Dans la même philosophie que la clause « impôts et taxes », la clause de « circonstances nouvelles » tend à répercuter sur l'emprunteur un surenchérissement du crédit pour un prêteur donné et le conduit, pour ne pas réduire sa marge nette en raison de l'évolution de la réglementation, à offrir à l'emprunteur le choix entre supporter ce surenchérissement ou rembourser le crédit par anticipation. Des discussions peuvent naître sur les circonstances englobées par le changement de réglementation (notamment pour la prise en compte ou non des recommandations généralement appliquées par les banques de la place concernée ou un changement dans l'interprétation des lois, règlements ou directives prises en compte). Il est généralement admis que l'application des recommandations du comité de Bâle (dites Bâle II, qui redéfinissent la gestion des risques de crédit) ne peut pas conduire à la mise en œuvre de cette clause.

Bien que l'intervention des banques centrales ait permis d'éviter une impasse dans les refinancements interbancaires et ait donc évité la mise en jeu de cette clause, la clause de « perturbation de marché » tend, dans les crédits consentis à taux variable (généralement en fonction de l'Euribor), à tirer les conséquences d'une éventuelle impossibilité pour les prêteurs de se refinancer sur le marché interbancaire pour la période d'intérêts retenue (3, 6 ou 12 mois) dans des conditions satisfaisantes. Cette stipulation permet de fixer le taux d'intérêt applicable dans l'hypothèse où il n'existe pas de moyens appropriés et équitables pour établir l'Euribor applicable à la période d'intérêt considérée (en particulier en cas de non-publication du taux de référence) ou celle dans laquelle l'Euribor, calculé sur la base des taux indiqués par certains établissements déterminés (définis comme banques de référence), ne saurait refléter fidèlement le coût de financement pour les prêteurs de la mise en place ou du maintien de leur participation respective dans le crédit pour la période d'intérêt visée.

Les clauses régissant les obligations de l'emprunteur quant à la couverture du taux d'intérêt sont également stratégiques car les charges financières induites peuvent renchérir significativement le taux du crédit. Se pose notamment la question du choix de la banque de couverture, surtout pour les swaps susceptibles de faire naître une dette pour l'emprunteur (autrement dit, doit-elle ou non être la banque prêteuse). Généralement, une préférence est donnée à la banque prêteuse à conditions égales ou proches. S'il ne saurait être question de présenter ici les différentes stratégies de couverture (swap, cap, collar.), il peut néanmoins être utile de savoir qu'un cap est payé intégralement dès sa souscription et évite - contrairement au swap - de voir l'emprunteur devenir, pendant la durée du crédit, débiteur d'une somme supplémentaire au titre du contrat de couverture souscrit. Dans des marchés très volatils, il peut être de bonne gestion pour l'emprunteur de mettre en place la couverture du crédit dès la signature du term sheet sans attendre la signature de la convention de crédit (notamment via la souscription de droits de conclure, à certaines conditions et échéance, la couverture définie au travers d'options : les swaptions).

La clause de cession du contrat ou créance de prêt

La dernière clause évoquée est celle liée à la cession du contrat ou de la créance de prêt. Il est exclu que l'emprunteur puisse céder ses droits et obligations au titre du contrat sans l'accord des prêteurs ou de l'agent les représentant. En revanche, les banques souhaitent conserver le plus de liberté possible pour la cession de leurs engagements ou de leurs créances au titre des financements consentis. Dans un contexte d'incertitude quant à la santé financière de certains établissements, certains emprunteurs souhaiteraient pouvoir contrôler davantage le marché secondaire (il n'existe jamais de solidarité entre les prêteurs). Toutefois la rareté du crédit ne leur permet pas de le faire.

Dans ce cadre, et pour éviter que certaines décisions soient davantage liées à la situation particulière de l'établissement prêteur qu'à des conditions intrinsèques au financement ou à la situation de l'emprunteur, il peut être utile de rechercher à limiter le nombre d'établissements prêteurs ou de s'assurer d'une certaine permanence dans l'engagement des banquiers initiaux ou, à tout le moins, dans la représentation des prêteurs (via la personne de l'agent). Les emprunteurs avertis veillent également à ce que la cession par le prêteur de tout ou partie de ses droits ne conduise pas, à elle seule, à un surenchérissement du crédit par le jeu des clauses de « circonstances nouvelles » ou « impôts et taxes » dont l'effet peut être conventionnellement neutralisé dans cette hypothèse spécifique.

En conclusion, bien que soumis à des soubresauts, le financement immobilier reste un facteur clé de l'investissement immobilier. Un tarissement du premier ne pourrait qu'avoir de graves conséquences sur le second. Dans ce contexte, une bonne connaissance par les emprunteurs des nouvelles conditions de marché est nécessaire pour éviter les déconvenues. Et les procès.

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