2013 : une équation budgétaire délicate
S’il existe bien un trait commun entre les lois de finances rectificatives pour 2012 et la loi de finances pour 2013, c’est leur caractère idéologique tendant à faire croire qu’il est possible de taxer toujours plus sans procéder à une réforme structurelle de l’État ni à une refonte fiscale d’ampleur. Comme nous le verrons ci-après, la fiscalité sur les hauts revenus et des grandes entreprises a été renforcée, sans véritable prise en compte de la variable investissement et sans logique d’ensemble. Le système fiscal français devient donc de plus en plus indéchiffrable, instable, voire suspect, et constitue sans doute le principal désavantage compétitif par rapport à nos partenaires européens, dont la logique est à ce jour différente. Ainsi, le Luxembourg multiplie les avantages fiscaux en faveur des entrepreneurs et du secteur du capital-risque, le Royaume-Uni fait de même en abaissant son taux d’impôt sur les sociétés à 26 % (au lieu de 28 %) pour le réduire de 1 % par an jusqu’à ce qu’il atteigne 23 % et l’Allemagne maintient son taux d’impôt sur les sociétés à 15 % ! Ce cavalier seul de la France est cependant risqué, surtout dans un monde d’économie ouverte où le flux des personnes, des capitaux et des entreprises est la règle. Alors, quelles solutions et comment ramener le législateur à plus de raison ? L’annulation par le Conseil constitutionnel de plusieurs dispositions de la loi de finances pour 2013, au nom l’excès de taxation ou de la rupture d’égalité devant les charges publiques, pourrait fournir un début de réponse.
La vigilance du conseil constitutionnel
Les premières intrusions des juges constitutionnels dans la limitation des pouvoirs du législateur, illustrées dans ses décisions du 29 décembre 2012, vont au-delà d’un simple épisode parlementaire. Le Conseil constitutionnel a notamment censuré l’article 12 de la loi de finances pour 2013 prévoyant l’introduction d’une contribution exceptionnelle de solidarité sur les très hauts revenus d’activité, et l’article 15 qui modifiait l’imposition des plus-values immobilières sur les terrains à bâtir. Et pour la réforme de la taxe sur les logements vacants, le Conseil a émis des réserves interprétatives. On peut alors se prendre à rêver que les sages de la rue de Montpensier prennent également en compte des facteurs exogènes comme la délocalisation pour apprécier le principe d’égalité devant les charges publiques. Il est en effet un peu rapide de considérer une mesure fiscale comme constitutionnelle au motif qu’elle n’induirait aucune rupture d'égalité devant les charges publiques en ne prenant en compte que les facultés contributives des assujettis à l’impôt, sans s’interroger sur leurs possibilités objectives de délocalisation en raison d’une fiscalité excessive par rapport à celle de nos partenaires européens. La suite logique de ce raisonnement conduirait alors à s’interroger sur l’augmentation des charges publiques des contribuables les plus faibles qui pourrait en résulter.
Ce raisonnement objectif doit pouvoir prospérer et conduire à un choc de confiance ou « choc de compétitivité constitutionnel ».
Principales mesures visant les particuliers
Le durcissement de la fiscalité des particuliers touche principalement la fiscalité du patrimoine et des hauts revenus ainsi que la fiscalité applicable en matière de délocalisation. Les exemples les plus marquants sont entre autres :
– l’alourdissement de la fiscalité immobilière (plus-values, cession temporaire d’usufruit, taxes foncières…) ;
– l’alourdissement de la fiscalité du patrimoine (apport-cession, stock-options, droits de mutation à titre gratuit, ISF, plafonnement des niches fiscales…) ;
– le durcissement de la fiscalité des non-résidents.
Un classique : l’alourdissement de la fiscalité immobilière des particuliers
Surtaxe des plus-values immobilières supérieures à 50 000 euros
L’article 70 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 a institué une surtaxe à l’IR sur les plus-values immobilières, autres que celles réalisées lors de la cession de terrains à bâtir. Cette surtaxe s’ajoute au taux proportionnel de 19 %, en fonction d’un barème progressif allant de 2 % (pour les plus-values comprises entre 50 000 et 100 000 €) jusqu’à 6 % (pour les plus-values supérieures à 250 000 €). Cette surtaxe s’applique aux plus-values immobilières générées à compter du 1er janvier 2013 lorsqu’elles ne procèdent pas d’une promesse de vente ayant acquis date certaine avant le 7 décembre 2012. Il convient de noter que l’exonération pour durée de trente ans continue à s’appliquer suivant l’ancien système avec une décote.
Nouveau régime fiscal de la cession à titre onéreux d’usufruit temporaire
Afin de faire échec aux montages d’optimisation fiscale permettant de percevoir immédiatement, et en franchise d’impôts sur le revenu comme de charges sociales, les revenus de certains biens en les appréhendant comme des plus-values de cession d’usufruit, l’article 15 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 est venu modifier l’article 13 du code général des impôts.
Avant l’introduction de cette mesure, une cession d’usufruit temporaire était taxée selon le régime des plus-values correspondant au bien en cause. Ainsi, ces produits bénéficiaient d’un taux fixe, voire même, pour les immeubles, d’abattements en fonction de la durée de détention. Pour le législateur, cette situation permettait au cédant de percevoir de manière anticipée les revenus produits par le bien sur la durée prévue de l’usufruit. La situation tout particulièrement visée par la loi est celle où l’usufruit est cédé à une personne morale contrôlée par le cédant. La société s’endette puis rembourse avec les revenus tirés de la chose en usufruit, le cédant percevant immédiatement les revenus et selon un régime de taxation plus avantageux.
Désormais, le cédant (personne physique ou société de personne) d’un usufruit temporaire (c’est-à-dire à durée fixe, non viager) est taxé non plus selon le régime d’imposition des plus-values mais selon le régime correspondant au revenu procuré par le bien dont l’usufruit est cédé (revenus de capitaux mobiliers s’il s’agit de titres ou revenus fonciers s’il s’agit d’un immeuble, par exemple). La base taxable s’entend du prix de cession ou de la valeur vénale quand celle-ci est supérieure.
Terrains à bâtir : la réforme est censurée
Le projet de loi de finances pour 2013 envisageait une modification en profondeur de la fiscalité des terrains à bâtir et des autres biens immobiliers. Ce projet prévoyait notamment la soumission des plus-values de cessions de terrains à bâtir au barème progressif de l’impôt sur le revenu en 2015, la suppression de toute forme d’abattement sur ces mêmes plus-values avec effet immédiat, ainsi que l’application d’un abattement exceptionnel de 20 % sur les plus-values nettes relatives à des biens immobiliers autres que des terrains à bâtir, pour 2013 seulement.
L’intégralité de la proposition de modification du régime des plus-values immobilières, destinée à favoriser la cession de biens immeubles, hors terrain à bâtir, en 2013 et à augmenter progressivement la fiscalité sur les cessions de terrains à bâtir telle qu’elle était prévue par le projet de loi de finances pour 2013 a été censurée par le Conseil constitutionnel car portant atteinte à l’égalité des contribuables devant les charges publiques.
Durcissement de la taxe foncière sur les terrains constructibles
La faculté laissée aux communes de majorer jusqu’à 3 € par mètre carré la valeur locative cadastrale des terrains constructibles situés dans certaines zones urbaines (article R123-5 du code de l’urbanisme) a été élargie aux zones à urbaniser (article R123-6 du code de l’urbanisme) par la première loi de finances rectificative pour 2012. Cette majoration est décidée par délibération du conseil municipal qui doit avoir lieu avant le 1er octobre d’une année N afin de pouvoir s’appliquer en N 1. Par conséquent, la délibération du conseil municipal doit avoir été prise avant le 1er octobre 2012 afin que cette majoration soit mise en œuvre en 2013. En outre, la première loi de finances rectificative pour 2012 et la loi de finances pour 2013 prévoient la mise en place d’un régime de majoration dérogatoire s’appliquant de plein droit (sauf délibération contraire) aux terrains situés dans certaines zones urbaines ou à urbaniser soumises à une forte rétention foncière, correspondant en pratique aux zones entrant dans le champ d’application de la taxe sur les logements vacants. Le montant de la majoration avait été porté par la première loi de finances rectificative pour 2012 à 5 € par mètre carré pour 2014 et 2015 et à 10 € par mètre carré à compter de 2016. La loi de finances pour 2013 prévoit que la majoration de plein droit s’élève à 25 % du montant de la valeur locative cadastrale, à laquelle s’ajoute une majoration complémentaire de 5 € par mètre carré pour 2014 et 2015 et de 10 € à compter de 2016.
Et les autres modèles européens ?
On comprend bien l’intérêt pour le gouvernement d’augmenter la taxation des actifs immobiliers qui, par définition, ne peuvent se délocaliser. Il convient à cet égard de s’interroger sur la compétitivité du système de taxation de l’immobilier en France par rapport à celui de nos voisins européens.
L’exonération pour durée de détention au bout de trente ans fait bien pâle figure au plan européen. En effet, en Italie les plus-values immobilières sont exonérées au bout de 5 ans, et de 10 ans en Allemagne. En Belgique, la gestion normale du patrimoine privé permet également de faire échapper à tout impôt les plus-values sur biens immobiliers et mobiliers sous certaines conditions. Ainsi, la revente d’un bien immobilier dans un délai de 5 ans à compter de son acquisition est taxée à 33 %. Ce taux tombe à 16,5 % si la revente intervient entre 5 et 8 ans ; au-delà de 8 ans, les plus-values immobilières sont exonérées. Dans ces conditions, investir dans l’immobilier français devient moins attractif.
Une confirmation : le durcissement de la fiscalité du patrimoine
Nouveau régime du report d’imposition des plus-values
L’article 18 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 limite l’intérêt du recours au mécanisme de l’apport-cession permettant à un contribuable de bénéficier d’un sursis d’imposition de la plus-value réalisée au moment de l’apport de ses titres à une société soumise à l’IR qu’il contrôle, puis de faire revendre rapidement ces mêmes titres par la société bénéficiaire de l’apport sans fiscalité à défaut de plus-value. À cette fin, il est institué un report d’imposition qui se substitue au sursis au moment de l’apport, de sorte que la plus-value est cristallisée et reste taxable dans le futur à certaines conditions. Le report d’imposition prend fin, entraînant ainsi la taxation immédiate de la plus-value d’apport selon les règles prévues à l’article 150-0 A du code général des impôts, en cas de :
– cession à titre onéreux, de rachat, de remboursement ou d’annulation des titres reçus en rémunération de l’apport ;
– cession à titre onéreux, de rachat, de remboursement ou d’annulation des titres apportés lorsqu’un tel événement intervient dans un délai de trois ans à compter de l’apport, sauf si la société bénéficiaire de l’apport prend l’engagement d’investir dans les deux ans à compter de la cession au moins 50 % du montant du produit de cession dans le financement d’une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale agricole ou financière à l’exception d’une activité de gestion d’un patrimoine mobilier ou immobilier. Un tel investissement peut également être réalisé via la souscription ou l’acquisition d’une fraction du capital d’une société exerçant une telle activité lorsque cette opération en confère le contrôle. Lorsque la cession à titre onéreux, le rachat, remboursement ou l’annulation intervient après trois ans, un tel événement ne met pas fin au report ;
– transfert de domicile fiscal tel qu’il est visé par l’exit tax (article 167 bis du code général des impôts).
En cas de donation des titres reçus en rémunération de l’apport, la plus-value en report est imposée au nom du donataire en cas de cession, d’apport, de remboursement ou d’annulation des titres dans un délai de dix-huit mois à compter de leur acquisition ou en cas de non-respect de la condition de réinvestissement précitée.
Le projet de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 avait par ailleurs prévu un dispositif permettant de taxer les opérations de donation-cession réalisées à court terme, mais il a été censuré par le Conseil constitutionnel.
l’isf une nouvelle fois réformé
Outre l’instauration de la contribution exceptionnelle sur la fortune par la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 pour les contribuables disposant d’un patrimoine net taxable supérieur ou égal à 1,3 million d’€ au 1er janvier 2012, l’article 13 de la loi de finances pour 2013 modifie en profondeur l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Bien que le seuil d’imposition soit maintenu à 1 300 000 €, le barème de l’ISF est fortement relevé, sans atteindre toutefois les taux utilisés pour le calcul de la contribution exceptionnelle sur la fortune (voir tableau). Ensuite, le mécanisme de réduction de l’ISF pour charges de famille est supprimé. Enfin, le plafonnement de l’ISF est rétabli. Lorsque le total formé par l’ISF et les impôts dus au titre du revenu (notamment IR, prélèvements sociaux ou contribution sur les hauts revenus) excède 75 % des revenus de l’année précédente du contribuable, le montant excédant cette limite est imputable sur le montant global de l’ISF, sans possibilité d’imputation sur d’autres impôts. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a censuré dans sa décision du 29 décembre 2012 la partie du texte imposant de prendre en compte, pour le calcul du plafonnement de l’ISF, des revenus capitalisés non disponibles. Enfin, aucun mécanisme de « plafonnement du plafonnement » n’est prévu.
Impôt sur le revenu : taxation des revenus mobiliers au barème de l’ir et nouvelle tranche à 45 %
Annoncée comme une des mesures phares (les revenus du capital devant être taxés comme ceux du travail), la soumission obligatoire au barème progressif de l’impôt sur le revenu (IR) de certains produits versés à des personnes physiques domiciliées en France a été décidée. Cette application du barème progressif vise :
– les dividendes et produits de placement à revenu fixe ;
– les gains de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux ;
– les gains de levée d’options sur actions et attributions d’actions gratuites.
Il est donc mis fin à l’imposition au taux proportionnel ainsi qu’au prélèvement forfaitaire libératoire, lorsqu’il s’appliquait sur option. En outre, les dividendes et produits de placement à revenu fixe (intérêts notamment) seront soumis, à compter de 2013, à une retenue à la source obligatoire non libératoire de l’IR perçue au taux de 21 % (dividendes) ou de 24 % (intérêts) sous forme d’acompte imputable sur l’IR. La réforme de l’IR s’est également faite à travers l’adjonction d’une nouvelle tranche au barème avec un taux marginal fixé à 45 % pour les contribuables déclarant plus de 150 000 € par part. Le taux symbolique de 75 % annoncé dans le cadre de la campagne présidentielle de 2012 devait être atteint grâce à l’instauration d’une contribution exceptionnelle de solidarité sur les très hauts revenus, mais cette nouvelle taxe a été jugée contraire au principe d’égalité devant les charges publiques par le Conseil constitutionnel.
Abaissement du plafonnement global de certains avantages fiscaux à l’impôt sur le revenu
Depuis la loi de finances pour 2009, les avantages fiscaux procurés par les différentes niches fiscales sont plafonnés. Cela signifie que le montant cumulé de certains avantages fiscaux (déductions, réductions ou crédits d’impôt) dont bénéficie le foyer fiscal à raison de dépenses payées, d’investissements réalisés ou d’aides accordées ne peut pas procurer une réduction du montant de l’impôt sur le revenu supérieure à une certaine somme. La loi de finances pour 2013 abaisse une nouvelle fois le plafonnement global des avantages fiscaux de 18 000 à 10 000 € et supprime la part proportionnelle de 4 %. Ainsi désormais, le total des avantages fiscaux concernés par le plafonnement ne peut plus procurer une réduction de l’impôt sur le revenu supérieure à 10 000 €. Il existe cependant des exceptions pour les réductions d’impôt en faveur des investissements outre-mer (article 199 undecies A, 199 undecies B et 199 undecies C du code général des impôts) et celles accordées au titre des souscriptions au capital des Sofica (article 199 unvicies du code général des impôts). Celles-ci demeurent donc soumises au plafond actuel (18 000 € majorés de 4 % du revenu imposable). Enfin, la réduction d’impôt accordée au titre de l’investissement Malraux est dorénavant exclue du plafonnement.
État des lieux en Europe
Comme pour la taxation de l’immobilier, la taxation du patrimoine apparaît en France comme excessive par rapport à ses voisins européens. À cet égard, l’existence d’un impôt sur la fortune, qui n’existe à ce jour que dans deux États membres de l’Union européenne (Espagne et France), en est une bonne illustration. En outre, la tranche marginale du barème de l’ISF fixée à hauteur de 1,5 % de la valeur du patrimoine à un moment où les taux d’intérêts monétaires à court terme avoisinent les 0,3 % apparaît comme très élevée.
Un inédit : le durcissement de la taxation des non-résidents
Le champ d’application des prélèvements sociaux a été élargi par la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 (article 29) de façon à s’appliquer aux revenus fonciers et aux plus-values immobilières de source française réalisées par des personnes physiques non résidentes.
Les contributions sociales relatives aux revenus fonciers sont recouvrées par voie de rôle sur la base de la déclaration d’impôt sur le revenu. Elles s’appliquent aux revenus fonciers perçus depuis le 1er janvier 2012. Contrairement aux résidents, les non-résidents ne peuvent pas bénéficier de la déduction partielle de la CSG sur l’assiette de l’impôt sur le revenu. Quant aux plus-values immobilières, les contributions sociales ne s’appliquent qu’aux plus-values réalisées à compter du 18 août 2012, effectivement soumises au prélèvement de 33,33 % (19 % dans un État membre de l’Espace économique européen et 50 % dans un État ou territoire non coopératif) prévu à l’article 244 bis A du code général des impôts (par exemple les plus-values résultant de biens immobiliers ou de titres de sociétés immobilières situés en France). Elles doivent être acquittées lors de l’enregistrement de la cession. Le taux global des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et sur les produits de placement s’élève désormais à 15,5 %, ce taux étant maintenu également pour l’année 2013.
Mesures-clés affectant les entreprises
Les mesures fiscales emblématiques en matière de fiscalité des entreprises tournent autour d’un durcissement de la fiscalité immobilière et financière.
Un classique : le durcissement de la fiscalité immobilière
Instauration d’une contribution sur les revenus distribués de 3 %
La deuxième loi de finances rectificative pour 2012 a instauré une nouvelle contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés perçue au taux de 3 % et basée sur les revenus distribués (y compris les revenus réputés distribués) par les sociétés et organismes soumis à l’IS. Des exceptions sont prévues, notamment en faveur des distributions réalisées par des organismes de placement collectif visés au code monétaire et financier (OPCVM, SCPI, OPCI, etc.). Les PME au sens du droit communautaire sont également exonérées de la contribution. Les distributions de dividendes réalisées entre sociétés membres d’un même groupe d’intégration fiscale ne sont pas non plus visées par la contribution de 3 %. Des dispositions particulières sont par ailleurs prévues en faveur des SIIC, les distributions réalisées par les filiales de SIIC à leur SIIC mère ne subissant pas cette contribution. Un dispositif d’exonération temporaire s’applique en outre en faveur des distributions obligatoires réalisées par les SIIC mères au profit de leurs actionnaires lorsqu’elles sont mises en paiement entre le 1er janvier et le 31 décembre 2013.
Distributions de dividendes suivies de la déduction d’une perte, moins-value ou provision
La deuxième loi de finances rectificative a supprimé la possibilité pour une société mère de percevoir des dividendes exonérés d’impôt sur les sociétés en application du régime mère-fille puis, cette distribution de dividendes ayant vidé la substance économique des filiales, de procéder à la déduction d’une provision pour dépréciation, d’une perte (lorsque les titres de la filiale sont inscrits en stock) ou encore d’une moins-value constatée à raison de la dépréciation ou de la cession des titres de leurs filiales. Ces mesures peuvent concerner les sociétés de marchands de biens et à prépondérance immobilière.
Taxe annuelle sur les logements vacants alourdie
La taxe annuelle sur les logements vacants, prévue à l’article 232 du code général des impôts, est due par les propriétaires de logements habitables dont la vacance résulte de leur volonté délibérée de ne pas mettre le bien sur le marché. La loi de finances pour 2013 vient à la fois étendre la zone géographique des logements visés, élargir la notion de vacance et augmenter le taux applicable.
À partir du 1er janvier 2013, une habitation se trouvant dans une zone d’urbanisation continue de 50 000 habitants ou plus peut être concernée par la taxe, alors que ce seuil était de 200 000 habitants sous le régime antérieur. Si auparavant un logement était considéré comme vacant, au sens de la taxe, quand le propriétaire ne pouvait pas justifier, au 1er janvier de l’année d’imposition, que le logement avait été occupé plus de 30 jours consécutifs au cours des deux années précédentes, la loi de finances pour 2013 a modifié les conditions tenant à la durée d’occupation et à la période de référence, entraînant ainsi un élargissement du champ d’application de la taxe. Pour échapper au champ d’application de la taxe, il faut désormais justifier de 90 jours consécutifs d’occupation au cours de la seule année qui précède celle d’imposition. La taxe est assise sur la valeur locative foncière brute du logement et de ses dépendances, et le taux d’imposition varie en fonction de la durée de vacance du logement. La deuxième loi de finances rectificative pour 2012 avait, prévu trois taux (12,5 % la première année d’imposition, 15 % la deuxième année et 20 % à compter de la troisième année). La loi de finances pour 2013 n’en retient que deux : 12,5 % pour la première année d’imposition et 25 % à compter de la deuxième année.
Renforcement de la taxe sur les friches commerciales en 2014
La taxe annuelle sur les friches commerciales, mise en place pour la première fois en 2008, peut être instituée par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et frappe le redevable de la taxe foncière qui dispose de locaux qu’il laisse inoccupés. En vertu de l’article 1530 du code général des impôts, il s’agit des :
– locaux à usage commercial ou agricole ;
– locaux occupés par les administrations publiques ;
– locaux des associations et établissements d’enseignement privé ;
– ateliers d’artisans qui ne sont pas munis d’un outillage suffisant pour leur conférer le caractère d’établissement industriel ;
– éléments isolés et les dépendances des établissements industriels situés en dehors de l’enceinte de ces établissements qui ne présentent pas en eux-mêmes un caractère industriel (sièges sociaux, bureaux…).
La loi de finances pour 2013 vient modifier cette taxe tant pour la durée d’inoccupation que pour les taux applicables. En effet, alors que sous le régime antérieur la taxe était due lorsqu’aucune activité entrant dans le champ de la cotisation foncière des entreprises n’a été pratiquée dans le local depuis 5 ans au 1er janvier de l’année d’imposition, avec la nouvelle loi, ce délai d’inexploitation passe à 2 ans. Ainsi, un local commercial qui n’est pas exploité depuis le 1er janvier 2012 devient imposable au 1er janvier 2014. L’assiette de la taxe est constituée par le revenu net servant de base à la taxe foncière sur les propriétés bâties. Son taux est actuellement fixé à 5 % la première année d’imposition, 10 % la deuxième et 15 % à compter de la troisième année. Ces taux sont portés respectivement à 10 %, 15 % et 20 % (ces taux peuvent, en outre, être majorés dans la limite du double par le conseil municipal ou le conseil de l’EPCI). Afin de laisser aux propriétaires le temps de céder ou de remettre en activité les biens concernés, les nouvelles dispositions ne s’appliquent qu’à compter des impositions dues au titre de 2014.
Report de la révision des bases des valeurs locatives des locaux professionnels au 1er janvier 2013
Impulsée par la loi de finances rectificative pour 2010, la révision avait pour date de référence le 1er janvier 2012. La deuxième loi de finances rectificative pour 2012 a reporté la mise en œuvre de la révision au 1er janvier 2013, les bases d’imposition devant ainsi être modifiées à compter de 2015. En outre, le mécanisme du coefficient de neutralisation est modifié et un mécanisme de lissage des écarts d’imposition (en cas de hausse ou de baisse des cotisations) provenant de la révision est instauré pour les années 2015 à 2018 (voir p. 15 et 50 de ce numéro).
Une nouveauté : l’endettement et les déficits des entreprises privées sous contrôle
plafonnement de la déduction des charges financières
La loi de finances pour 2013 a introduit une nouvelle limite à la déduction des charges financières supportées par les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés. Ainsi, pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2012, les charges financières nettes ne seront plus déductibles fiscalement qu’à hauteur de 85 % de leur montant. Les charges financières nettes s’entendent de la différence entre le montant des charges financières venant rémunérer des sommes laissées ou mises à disposition de la société et le montant des produits financiers rémunérant les sommes laissées ou mises à disposition par celle-ci. Toutefois, les sociétés dont le montant des charges financières nettes est inférieur à 3 millions d’€ sont exclues du dispositif de plafonnement global.
Les loyers de crédit-bail sont concernés par cette mesure et sont pris en compte pour la détermination des charges financières nettes pour leur fraction ne correspondant pas à l’amortissement du bien. Enfin, si ce dispositif n’a pas vocation à s’appliquer aux charges financières versées au sein d’un groupe d’intégration fiscale, il s’ajoute aux autres mesures de limitation de la déduction des intérêts telles que celles prévues en matière de sous-capitalisation (article 212 du code général des impôts) ou d’acquisition de titres de participation (article 209, IX du code général des impôts).
Aménagement des modalités d’imputation et de transfert des déficits fiscaux
La deuxième loi de finances rectificative pour 2012 et la loi de finances pour 2013 ont considérablement durci les conditions d’utilisation des déficits fiscaux générés par une société soumise l’IS. Ce durcissement impacte d’abord les conditions du transfert de déficits fiscaux en cas de restructuration, notamment en posant des critères légaux qui caractérisent le changement effectif d’activité, mais il se traduit également plus simplement par une diminution du montant de déficits imputable au titre d’un même exercice. En effet, en cas de report en avant des déficits, l’imputation était limitée jusqu’en 2012 au titre d’un même exercice à un plafond égal à un million d’€ majoré de 60 % du bénéfice fiscal de l’exercice d’imputation. Pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2012, ce dernier taux sera désormais limité à 50 % du bénéfice fiscal de l’exercice (loi de finances pour 2013). En outre, le plafond d’un million d’euros doit désormais être majoré des abandons de créance consentis dans le cadre d’une procédure collective (conciliation avec homologation, sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire).
Les critères d’appréciation de la notion de « changement réel d’activité » sont également précisés et remettent en cause plusieurs solutions jurisprudentielles. L’article 221, 5 du code général des impôts prévoit désormais que la disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l’exploitation pendant une durée de plus de douze mois ou suivie de la cession de la majorité des droits sociaux, emporte cessation d’activité (avec pour conséquence la perte du droit au report des déficits). Par ailleurs, l’adjonction d’une activité ou, à l’inverse, l’abandon ou le transfert (même partiel) d’une ou plusieurs activités peut caractériser un changement d’activité lorsqu’il entraîne une augmentation/diminution de plus de 50 % du chiffre d’affaires ou de l’effectif moyen du personnel et du montant brut des éléments de l’actif immobilisé par rapport à l’exercice précédant celui de l’adjonction/transfert ou abandon. Un agrément peut cependant être délivré pour permettre le report des déficits, sous conditions.
Cette nouvelle définition s’applique pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 4 juillet 2012. Les entreprises ayant procédé à des réorganisations avant le 4 juillet 2012 peuvent être concernées.
