À l’image des autres activités d’amélioration de l’habitat, le marché de la véranda a profité de la sortie du premier confinement. Les années?2020 et?2021 se sont avérées historiques tant en termes de demandes que de volumes, avec une croissance d’au moins +?10 à +15?%. Tous les acteurs ont constaté cette dynamique. Mais « certains n’ont pas pu répondre à temps car il y a eu des problèmes d’approvisionnement liés à des fermetures d’usines. En ce moment, se posent encore des vérandas qui ont été vendues fin 2021 », note Vrège Jeloyan, directeur opérationnel chez Vie & Véranda. Depuis le printemps 2022, le marché a retrouvé un cours plus tranquille avec des chiffres proches des volumes enregistrés en 2019 à la même période. « L’intérêt pour la véranda ne faiblit pas mais il devient plus difficile de concrétiser les ventes », remarque Sébastien Chartier, directeur général Vérandas de Renoval, qui pointe la forte inflation du coût des matières premières, particulièrement l’aluminium et le verre, principaux constituants des vérandas. Face aux importantes hausses de prix qui ont suivi la relance économique post-covid puis aux pénuries de matières et à la flambée des prix de l’énergie liées à la guerre en Ukraine, la profession a dû répercuter des augmentations de 15 à 20?%.

« Premiumisation » progressive du produit
« Il y a eu une “premiumisation” progressive des produits compte tenu du niveau de prix qu’il est désormais nécessaire de pratiquer. Ce sont surtout les vérandas d’accès qui en ont pâti. Il est plus difficile d’être compétitif sur ce secteur et de donner satisfaction à une frange de clients qui venaient nous voir avec des budgets plus serrés », constate Bernard Cousin, directeur général de Gustave Rideau. De nombreux vérandalistes témoignent aussi d’une forte augmentation du panier moyen. Comme le souligne Philippe Plat, gérant de la société Le Vérandier, « la véranda est un produit de plus en plus optionné. On est sur de la pièce de vie utilisable du 1er?janvier au 31?décembre. Les questions tournent donc autour de l’isolation bien sûr l’hiver, mais aussi du confort d’été ». Pour Yoann Arrivé, P.-D.G. de Concept Alu, il s’agit bien d’une tendance de fond. « À partir du moment où il se lance sur un projet d’agrandissement, le particulier se dit qu’il ne le fera qu’une fois et il a envie de le faire bien. De plus en plus, les clients nous font confiance sur l’éclairage de leur pièce, sa protection solaire, les finitions, l’habillage du mur, de la dalle, voire l’option vitrage chauffant . » La véranda étant plus cossue, elle est perçue comme un produit d’extension et non plus un produit plaisir, que les gens achetaient au moment de la retraite. « Cela rajeunit un peu le profil du consommateur puisque le prisme du plaisir évolue vers celui de la nécessité, du besoin d’une pièce en plus », remarque Bernard Cousin. Cette montée en gamme de la véranda s’accompagne d’attentes de performances thermiques et phoniques plus marquées. La véranda basique utilisée en intersaison tend à disparaître.

Hausse du niveau d’exigence thermique
Au niveau du SNFA et de la profession, l’idée est de marcher dans les pas de la RE2020 qui va s’appliquer à toutes les constructions neuves au 1er?janvier 2023. Il s’agit d’augmenter le niveau d’exigence en termes d’isolation thermique et de prendre en compte de manière plus globale leur mise en œuvre, l’isolation de dalle, les protections solaires, etc. Si nombre d’acteurs avaient déjà entamé ce questionnement, ils doivent aller plus loin. « Lorsque la véranda est en place et chauffée, elle entre dans le calcul du diagnostic de performance énergétique de la maison. On ne peut pas se permettre de venir dégrader la performance énergétique d’une maison existante », met en garde Vrège Jeloyan. Cette plus grande attention au confort d’été conduit les fabricants à proposer des systèmes de protections solaires intégrés par brise-soleil orientable (BSO) ou store, là où, longtemps, le volet roulant était le principal élément rapporté, plus pour des questions de sécurité. Comme le résume Sébastien Chartier, « il y a un enjeu à aller vers des démarches plus proactives qu’auparavant ». Un constat partagé par Yoann Arrivé qui remarque que « les consommateurs sont de plus en plus réceptifs à nos conseils sur les protections solaires. Beaucoup ont compris que les coefficients thermiques des menuiseries étaient importants, qu’il fallait aussi veiller à apporter de la protection et à différencier les solutions en fonction des expositions. Sur une façade nord, on va préconiser des murs isolants et du triple vitrage avec volet roulant pour la partie vitrée. Côté est, sud et ouest, on va travailler avec des screens, des ombrières ou du BSO ». Côté produits, les évolutions se situent en toiture où l’épaisseur du complexe isolant monte jusqu’à 220?mm dans le cas d’une véranda chevronnée, 350?mm pour une véranda à toit plat, quand les anciens panneaux de toiture ne dépassaient pas 66?mm. Bernard Cousin y voit un mouvement global d’amélioration de l’habitat qui rend le consommateur plus sensible à la performance de la toiture de la véranda. Isolation thermique qui va de pair avec une étanchéité accrue à l’air et une meilleure isolation phonique : un aspect de plus en plus important. Le toit plat, de son côté, poursuit son essor, séduisant par son esthétisme contemporain. « Il peut faire office d’alternative quand il y a une contrainte technique, par exemple le manque de hauteur d’accroche pour poser une toiture monopente. Mais il reste un petit segment du marché en raison de son surcoût pour le consommateur, qui très vite revient vers des solutions plus basiques », tempère Philippe Plat.

Nouvelles solutions connectées
Au niveau de la structure, le profilé aluminium reste la norme, par sa finesse, sa pérennité et ses possibilités de laquage. Toutefois, certaines gammes jugées désuètes finissent par tirer leur épingle du jeu parce qu’elles sont assez fines, légères… et moins consommatrices d’aluminium. La véranda en bois demeure, elle, l’affaire de spécialistes mais séduit un nombre croissant d’amateurs, attirés par le caractère chaleureux et respectueux de l’environnement du matériau. Le fabricant Vie & Véranda en a fait l’expérience lors de la dernière foire de Paris avec sa nouvelle gamme Alizé, en structure bois apparente. « En lançant ce modèle, nous avions conscience que le besoin d’entretien du bois constituait un frein. Finalement, quand on met dans la balance des délais plus courts, des prix plus avantageux et des géométries plus ouvertes, le sujet de l’entretien passe au second plan », souligne Vrège Jeloyan. Du point de vue des dimensions, le seuil des 20?m² demeure, même dans le cas de produits à forte valeur ajoutée, car il permet de simplifier les démarches administratives. Le projet moyen se situe entre 15 et 20?m². Les formes rectangulaires et les lignes rectilignes représentent l’essentiel des ventes.
La véranda extension se développe aussi pour aménager une cuisine, un salon. Pour multiplier les usages et apporter une souplesse entre intérieur et extérieur, certains misent sur de nouvelles solutions à mi-chemin entre la véranda et l’abri de jardin. Dans le même temps, de nouvelles solutions connectées arrivent sur le marché, poussées par les fabricants qui mettent en avant un gain de confort et des économies à la clef. Ainsi, l’industriel Profils Systèmes présente, en partenariat avec Somfy, un système de gestion intelligente des protections solaires en fonction des températures à l’intérieur de la véranda et à l’extérieur de la maison. En termes de teinte, le gris anthracite 7016 caracole en tête des ventes, même si on enregistre davantage de demandes de noir, de gris intermédiaires, voire de blanc granité.
Ces deux années de forte croissance n’ont pas modifié le positionnement des grands acteurs du secteur, parmi lesquels figurent Gustave Rideau, Akena (Soko), Renoval, Vie & Véranda, Grandeur Nature, Veranco, Concept Alu, Schüco, Profils Systèmes ou Le Vérandier (Tryba). Si le secteur ne connaît pas de nouveaux entrants, il voit les entreprises les moins historiques poursuivre le maillage territorial de leur réseau et points de vente, quand les autres recherchent des relais de croissance via la pergola, le carport ou l’abri de piscine.
