Repensé, le canal Seine-Nord sort la tête de l’eau

Au lieu de 7 milliards d'euros dans le cadre du projet initial de partenariat public-privé (PPP), le canal Seine Nord reconfiguré par le député du Nord Rémi Pauvros ne coûterait plus que 4,4 à 4,7 milliards d'euros hors taxes, dont 40% financés par le budget européen. Voici ses principales recommandations au ministre des Transports, Frédéric Cuvillier, le 11 décembre.

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Le tracé du futur canal Seine Nord

Après sept mois de rencontres, d’échanges et de travail, le député PS du Nord Rémi Pauvros a rendu son rapport sur la reconfiguration du canal Seine-Nord Europe le 11 décembre au ministre des Transports, Frédéric Cuvillier. Le 17 avril 2013, ce dernier lui avait en effet fixé pour mission de rendre ce projet financièrement supportable après avoir annulé la procédure initiale de partenariat public-privé (PPP). La mission semble avoir été accomplie. Au lieu de 7 milliards d'euros prévus initialement dans le cadre d’un PPP (avec un financement européen de 6,22%), «le projet reconfiguré ne coûterait plus que 4,4 à 4,7 milliards d'euros hors taxe, dont 40% couverts par le budget européen», a déclaré Rémi Pauvros. L’Europe pourrait aussi prendre en charge jusqu’à 50% des études. En effet, ce projet de canal de 106 kilomètres entre l'Oise et l'Escaut a été retenu en octobre, lors des « Ten-T days » de Tallin, parmi les grands chantiers du mécanisme d'interconnexion pour l'Europe à favoriser et qui seront éligibles aux subventions européennes (près de 23 milliards d’euros) dans le cadre du budget 2014-2020.

Diminution du nombre d’écluses

Au-delà, de cette participation européenne, Rémi Pauvros a identifié un certain nombre d’économies pour abaisser le coût du projet. Elles viendront d’abord de la disparition des frais financiers de 1,5 à 2 milliards d'euros, assurances comprises, que les sociétés Bouygues et Vinci candidates au PPP prévoyaient pour couvrir leurs emprunts. Si les caractéristiques techniques et le tracé seront conservés afin de ne pas remettre en question la déclaration d’utilité publique (DUP), parmi les pistes identifiées dans le rapport pour réduire les coûts, figurent la possibilité d'utiliser, sur une dizaine de km, un tronçon élargi du canal du Nord actuel, ainsi que la diminution du nombre d'écluses - passant de 6 à 7- et la réduction de moitié la hauteur de la plus grande des écluses. Le rapport préconise de «différer, tout en gardant possible, certains équipements spécifiques, comme l’approvisionnement en eau autour de Lille». Enfin, Rémi Pauvros conseille de ne pas construire immédiatement les quatre plateformes multimodales prévues dans le projet initial pour un coût de 320 millions d'euros. De quoi économiser environ 200 millions d'euros. D’ailleurs le développement des plateformes multimodales serait confié aux régions et collectivités territoriales.

Des travaux préparatoires dès 2015

Du côté du financement du projet en lui-même, les collectivités concernées, très demandeuses du canal, seraient davantage impliquées. Leur engagement pourrait totaliser un milliard d’euros réparti entre les régions (220 millions pour le Nord-Pas-de-Calais, 210 millions pour l’Ile-de-France, 80 millions pour la Picardie) et l’autre moitié pour les départements. Avec la participation de l'Union européenne à hauteur de 2 milliards, l'État n’aurait donc plus qu’à débourser 1 milliard. Le solde, 500 millions d'euros environ, serait apporté par des prêts longue durée (40 ans) et à très bas taux d'intérêt de la Banque européenne d'investissement (BEI) et de la Caisse des Dépôts et consignations. Une société publique pourrait alors être créée par une loi afin de porter le projet, avec pour actionnaire Voies navigables de France (VNF) et les collectivités. « Cette reconfiguration permettrait d’engager des travaux préparatoires dès 2015 pour une ouverture en 2022 du tronçon central», avance Rémi Pauvros.

Tout en soulignant que la décision finale de soumettre le projet à la Commission européenne l'an prochain appartient à l’exécutif, le député du Nord estime que son rapport «met de la cohésion et de la cohérence dans ce projet, démontre sa faisabilité économique et crée les conditions de sa réalisation».

4500 emplois par an dans les TP

Réagissant à la remise du rapport, Frédéric Cuvillier est resté pour l’instant très elliptique : «C’est un travail de grande qualité. Mais comment finance-t-on les infrastructures de transports aujourd’hui en France ?», a-t-il lancé, faisant implicitement référence au report de l’écotaxe poids lourds. «Quid du financement de l’État quand on sait que d’ores et déjà, les projets d’infrastructures retenus par le rapport Mobilité 21 (dont le Canal Seine Nord ne fait pas partie)  ne sont aujourd’hui plus financés, suite à l’ajournement de l’écotaxe», a pour sa part réagi Bruno Cavagné président de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) qui estime à 4 500 les emplois générés par le projet chaque année dans le secteur des travaux publics. Le ministre des Transports pourrait donner les orientations à retenir pour la poursuite du projet lors de son déplacement à Valenciennes, le vendredi 13 décembre. De quoi redonner sa chance au canal ?

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