Un tunnelier de 380 tonnes à l'oeuvre en vue d'améliorer la gestion des inondations

Pour lutter contre les inondations, Nîmes se dote d'un réseau enterré réalisé au tunnelier avec une précision chirurgicale.

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Le tunnelier travaille à faible profondeur, entre 5 et 10 m, et en zone urbaine dense.

Sous les pavés nîmois, un colosse de 380 t dévore les entrailles de la ville. Ce tunnelier à pression de terre doit forer deux galeries dans le cadre de l'aménagement hydraulique des cadereaux d'Uzès (980 m) et des Limites (1 280 m). Habituellement à sec, ces ruisseaux urbains peuvent se muer en torrents violents lors de fortes pluies. « Depuis le premier programme d'actions de prévention des inondations (Papi) en 2007, le cadereau d'Uzès a été largement aménagé en aval et au sud. L'objectif de ce nouveau chantier, inscrit au Papi 3 de la rivière Vistre, est de faire passer la capacité d'évacuation de 8 à 80 m3 /s pour protéger l'est de Nîmes contre des événements pluvieux comparables à ceux de 2005 », expose Jordane Lafaye, cheffe de projet à Nîmes Métropole. Aux manettes, les équipes de Razel-Bec interviennent à une très faible profondeur, soit entre 5 et 10 m, en zone urbaine dense et en connexion avec des ouvrages existants qui doivent rester opérationnels.

1 500 capteurs embarqués

« Nous creusons avec un bouclier de 4 m de diamètre pour poser un revêtement en anneaux de béton d'un diamètre intérieur de 3,30 m, indique Samir Renaï, responsable projet chez Razel-Bec. Si la méthode est éprouvée, des aléas ne peuvent être exclus malgré les reconnaissances géotechniques et les diagnostics bâtimentaires en amont. » Deux anomalies ont ainsi été détectées grâce aux 1 500 capteurs embarqués et à l'étude de la nature des matériaux évacués : les investigations par forage ou excavation à la grosse pelle ont révélé une fosse remblayée, mais aussi les vestiges d'un ancien site militaire, tous deux non cartographiés. A chaque obstacle, sa solution. « Dans le premier cas, nous avons coulé du béton pour recréer une assise sous la machine et combler l'espace devant elle avec des matériaux adaptés », détaille l'ingénieur. Dans le second, après prélèvements et analyses, la progression a repris sous haute surveillance.

Avec seulement quelques mètres de couverture, le creusement impose une régulation constante de la pression de confinement. « Il faut s'assurer que la tête de coupe creuse au bon gabarit et que la vis sans fin évacue les matériaux excavés à la même vitesse que l'avancement du bouclier pour éviter tout affaissement », explique Samir Renaï. La consistance de la « pâte », un mélange terre-eau, doit aussi rester homogène pour garantir la stabilité. Par ailleurs, entre les déblais évacués chaque jour par 30 semi-remorques et l'approvisionnement en voussoirs de béton, l'intégration urbaine du chantier repose sur une logistique gérée minutieusement.

Tracé sinueux

Le dernier défi concerne les redémarrages. « Le tunnelier n'est pas entièrement modifiable, il faut donc adapter sa configuration à l›ouvrage dans lequel il est assemblé, dont la forme dépend des usages futurs. Pour le premier tir, nous avons pu utiliser un ouvrage cadre construit antérieurement », note le responsable. Le second, en revanche, réalisé depuis le même puits, a été plus complexe. « Il a fallu relancer la machine presque du même point de départ. Or le tunnelier mesure 100 m, contre 80 m seulement pour le puits de démarrage et l'ouvrage cadre. Les 20 m restants, correspondant aux remorques fonctionnelles, ne tenaient pas à l'intérieur. Nous avons donc dû les installer à l'extérieur et les connecter progressivement », poursuit-il. Le tracé, plus sinueux que le premier, a encore corsé l'exercice. « De nombreux échanges ont permis de définir un parcours qui concilie les capacités du tunnelier, les contraintes foncières négociables et le fuseau de servitude imposé par la déclaration d'utilité publique », précise Samir Renaï.

Si la progression atteint aujourd'hui 12 à 14 m par jour, « la sécurité hydrologique ne sera pleinement effective qu'en 2027, à l'achèvement des entonnements de raccordement », rappelle Jordane Lafaye. En attendant, des techniciens de maintenance aux poseurs d'anneaux, des chauffeurs de train de marinage aux logisticiens opérant en surface ou dans le puits, pas moins de 63 ouvriers restent mobilisés sur le chantier.

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Informations techniques

Maîtrise d'ouvrage : Nîmes Métropole.

Maîtrise d'œuvre : Tractebel.

Entreprises : Razel-Bec (puits, tunnelier, génie civil hydraulique), Franki Fondation (pieux sécants des puits, écrans de soutènement).

Calendrier des travaux : tunnel d'Uzès de juillet 2024 à janvier 2025 ; tunnel des Limites de mars à décembre 2025 ; ouvrage de confluence en 2026.

Coût : 35,4 M€ HT pour le marché Uzès et Limites aval ; 8 M€ HT pour le marché Limites amont.

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