L'Assemblée nationale a eu le dernier mot le 8 novembre, adoptant définitivement le projet de loi Sapin 2. Mais tout n'est pas complètement joué pour autant. Un groupe de sénateurs et un groupe de députés Les Républicains ainsi que le Président du Sénat ont saisi le 15 novembre le Conseil constitutionnel, qui devra se prononcer dans les prochaines semaines. Ces parlementaires estiment que la loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique porte atteinte à plusieurs principes et libertés constitutionnels.
Parmi les mesures visées, figurent celles relatives à l'encadrement du lobbying, au droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) ou encore à la responsabilité des dirigeants de grandes entreprises qui échoueraient à lutter contre la corruption. Un certain nombre de cavaliers législatifs (articles relatif à l'aménagement de la ZAC du quartier de Polytechnique de Palaiseau, définissant le principe d'innovation, ratifiant l'ordonnance relative aux gares routières, etc.) sont aussi dénoncés. Dépourvus, selon les parlementaires, de lien avec l'objet initial de la loi, ils n'auraient rien à y faire.
La saisine des sénateurs pointe aussi du doigt le dispositif de renforcement des sanctions en cas de retard de paiement. Le projet de loi définitif porte en effet le plafond de l'amende administrative pour non-respect de la réglementation des délais de paiement à 2 millions d’euros (au lieu de 375 000). Et systématise la publication sur le site de la DGCCRF du nom des sociétés sanctionnées pour leurs mauvaises pratiques en la matière. Or, pour les élus du groupe Les Républicains, la sévérité accrue des amendes encourues et la publication systématique de la décision de sanction devraient conférer à ces amendes "un caractère non plus administratif mais pénal, de par leur caractère répressif et dissuasif". Ils contestent dès lors le fait que les contrevenants ne bénéficient pas des garanties prévues en droit pénal (droit à un procès équitable, par exemple). Autrement dit, si le législateur veut renforcer les amendes, soit ; mais il devrait le faire en les transformant en véritables sanctions pénales prononcées par un juge.
Le Conseil constitutionnel dispose d'un mois pour statuer sur tous ces points.