LES ESPACES DE RÉCLUSION D'ANDREA EICHENBERGER

Réservé aux abonnés
Image d'illustration de l'article
PHOTO - 12924_789216_k2_k1_1862717.jpg

Pour un photographe, la distance avec le sujet permet parfois de mieux voir les choses. Née au Brésil en 1976, Andrea Eichenberger vit en France depuis plusieurs années. Son œuvre, nourrie de rencontres, se développe au croisement de l'art et de l'anthropologie. Après avoir étudié l'art à l'université de l'Etat de Santa Catarina, elle se lance, en France et au Brésil, dans des études d'anthropologie qui lui permettent de percevoir le monde « d'une manière plus critique ». C'est à partir de son regard d'expatriée, qu'est né en 2011 le projet In (Sécurité), au fur et à mesure de ses allers-retours entre Paris et sa ville d'origine, Florianopolis. « A chaque fois, j'étais surprise de constater combien la question de l'insécurité véhiculée au Brésil par les médias et le discours ambiant se traduisait dans l'espace urbain : les habitants voulaient protéger toujours davantage leurs maisons. » Avec une amie anthropologue, elle entame alors une enquête visuelle. Elle photographie des murs surmontés de barbelés, des fenêtres grillagées, la présence des chiens…

Dans les quartiers chics, le contrôle se fait plus discret, presque invisible : si les jardins semblent ouverts avec leurs pelouses non closes, des vigiles patrouillent et des caméras enregistrent en permanence les allées et venues. Sous la forme de témoignages vidéo, le duo capte également la manière dont cette obsession sécuritaire s'infiltre jusque dans les gestes quotidiens les plus banals.

Enfermement volontaire ou subi

En France, Andrea Eichenberger a développé Les Mille Briques, autour des derniers jours d'une maison d'arrêt située à Beauvais. De l'enfermement volontaire, on passe cette fois à la détention subie.

Réalisé en 2015 dans le cadre d'une résidence Diaphane Pôle photographique en Picardie, en collaboration avec la psychologue Isabelle Marseille, ce projet a nécessité une immersion de plusieurs semaines dans la prison, avant que les occupants ne soient transférés dans un établissement pénitentiaire flambant neuf. Ces « mille briques » sont le surnom donné à la maison d'arrêt par les détenus. On peut aussi y voir la métaphore des dizaines d'existences qui s'y sont déroulées, les strates d'histoires intimes déposées entre ses murs. La photographe a dû se plier à l'exigence de l'administration pénitentiaire, qui ne souhaitait pas que soient montrés les visages. Les détenus apparaissent de dos ou la figure cachée par un élément d'architecture.

En guise de légende, Andrea Eichenberger reprend le descriptif anthropométrique attribué non pas à une personne mais à un numéro d'écrou : taille, sexe, signes distinctifs (cicatrices, tatouages…).

La vieille maison d'arrêt se révèle aussi sous l'angle de ses couleurs pastel et de scènes domestiques paisibles.

Image d'illustration de l'article
PHOTO - 12924_789216_k2_k1_1862717.jpg PHOTO - 12924_789216_k2_k1_1862717.jpg
Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !