Vous avez été élu en mars dernier à la tête de l'ordre des architectes des Hauts-de-France. Quels sont vos objectifs pour les trois prochaines années ?
Nous en avons plusieurs, dont celui d'être plus présents auprès des élus et des instances régionales. Aujourd'hui, nous sommes malheureusement aphones en région. Le Croa n'est même pas invité aux vœux des institutionnels, encore moins aux différentes commissions où se prennent les décisions. Notre intégration à des instances comme la commission logement de la FFB avec l'Union régionale pour l'habitat (URH), à laquelle je participe depuis deux ans, peut pourtant faire changer les choses. Aux côtés de l'URH, nous travaillons, par exemple, à harmoniser les dossiers d'appel d'offres des bailleurs car aujourd'hui, leur contenu diffère en fonction de chaque chargé d'affaires ou assistant à maîtrise d'ouvrage ! Pour démultiplier notre présence, nous sommes aussi convenus avec la FFB de nous entraider en plaidant chacun simultanément la cause des entreprises et des architectes auprès des élus. Car notre grand problème, c'est le manque de temps. Je passe trois jours par semaine à l'Ordre mais cette activité n'est pas rémunérée.
Et nous ne comptons que 18 conseillers, qui ont tous des agendas bien chargés.
La formation faisait aussi partie des priorités affichées lors de votre campagne. Comment cela se traduira-t-il?
L'obligation de se former 14 heures par an est aujourd'hui perçue négativement par la profession alors que c'est une chance. Pour remédier à cette situation, nous travaillons notamment à élargir l'offre en direction des professionnels qui travaillent seuls et qui représentent 50 % des 1 300 inscrits à l'ordre dans les Hauts-de-France. Nous nous sommes ainsi rapprochés du CD2E, pôle d'excellence régional de l'éco-transition, afin qu'il monte des formations spécifiques.
Nous sommes aussi en contact avec l'Ecole d'architecture et de paysages de Lille (Ensapl), afin notamment de profiter de cycles de conférences existants qui sont très intéressants.
Nous aimerions par ailleurs créer une association d'alumni de l'Ensapl, ce qui permettrait de parrainer de jeunes diplômés. Nous imaginons aussi avec l'Afapi des interventions qui pourraient être réalisées directement dans les bureaux des grosses agences d'architecture.
L'ordre est-il bien perçu par les architectes dans les Hauts-de-France ?
L'image du Croa auprès de nos confrères reste à améliorer.
Nous sommes encore trop souvent perçus uniquement comme ceux qui prélèvent une cotisation. Ils ne voient pas tous les bénéfices possibles, comme le soutien juridique - qui est très important - ou les conciliations. Nous en tenons plusieurs par mois et nous arrivons souvent à trouver des arrangements qui conviennent à tous sans devoir passer devant le tribunal. Le Croa prend aussi position sur des sujets de fond. Nous militons pour que cessent les démolitions infondées comme celle de l'ancien siège de la métropole européenne, à Lille, ou celles prévues dans le quartier de l'Alma à Roubaix, qui sont une véritable catastrophe. Pour réduire les émissions de CO2, il faut cesser de démolir ; des solutions existent pour transformer l'existant. Nous mettons aussi en place des actions comme la charte bas carbone à destination des petites communes. Pour l'instant, elle a été signée par une dizaine de collectivités, et nous travaillons à la déployer davantage.
Des liens forts avec la Belgique
Il existe dans les Hauts-de-France d'importants enjeux transfrontaliers. En effet, de nombreux architectes français se forment ou effectuent des stages outre-Quiévrain. Le directeur de l'Ensapl, lui-même de nationalité belge, est l'ex-doyen de la faculté d'architecture de l'université libre de Bruxelles.
Avec le Conseil de l'ordre de la province du Hainaut, le Croa a même organisé un premier festival transfrontalier, organisé l'an dernier du 15 septembre au 15 octobre, en Belgique.
« L'événement sera reconduit sous forme de biennale et nous essaierons aussi de nous rapprocher des néerlandophones », projette Jean-Charles Huet. Cette année, la prestation de serment de 120 jeunes architectes sera commune aux deux ordres. Elle se tiendra le 8 novembre à Tourcoing (Nord).