Difficile de parler de La Réunion sans évoquer un des plus grands chantiers de France : la Nouvelle route du littoral. Un ouvrage de 12 km de long gagné sur la mer, pour moitié digue et pour moitié viaduc, qui reliera Saint-Denis à La Possession et qui remplacera la route actuelle encombrée et dangereuse. En effet, éboulis, réduction de trois à deux voies lors des pluies, voire fermeture (une centaine de jours par an), embouteillages monstrueux sont le quotidien des 70 000 Réunionnais qui l'empruntent chaque jour. L'ouvrage, de 5 400 mètres et situé entre 20 à 30 mètres au-dessus de la mer, a débuté en 2014. Aujourd'hui, 60 % du parcours sont avancés : 28 piles en mer sur 48 ont été posées. Afin de réduire les impacts sur le milieu naturel, tout l'ouvrage (piles et tabliers) a été préfabriqué à terre par deux usines installées à l'arrière du port, et le viaduc repose sur des fondations superficielles constituées de semelles circulaires de 20 à 23 mètres de diamètre. Le sol qui soutient les piles a ainsi été compacté et tassé via une technique de vibroflottation. Une fois le dragage du fond de la mer effectué (4 à 8 mètres de sable déblayé), une couche d'un mètre d'assise granulaire supporte la pile. L'embase des piles est alors déposée selon un axe XYZ, un sac géotextile est collé sous la pile dans lequel un coulis de béton est injecté. Les piles sont posées à partir d'une mégabarge auto-élévatrice prénommée Zurite et construite pour l'occasion. Des tapis en béton anti-affouillement de 35 cm autour des piles limitent les effets de la houle et protègent l'ouvrage de l'érosion.
Un viaduc source d'innovations
La réduction de l'impact environnemental a, par ailleurs, mobilisé 80 M € et a donné naissance à 150 mesures environnementales. Plusieurs procédés ont été pensés comme des mesures d'évitement (limitation des matériaux utilisés, creusement à un rythme adapté… ). Plus encore, des modules éco-conçus, sortes de récifs artificiels intégrés sur six piles, imitent les habitats naturels pour assurer le développement de la faune. Après un an, une colonisation corallienne a déjà pris naissance.
La principale préoccupation est celle des matériaux : 19 millions de tonnes sont nécessaires pour arriver à bout du projet, dont une partie approvisionnée par les carrières. Au final, ce viaduc, le plus grand de France en construction, comportera 1 386 voussoirs. Les dernières piles et tabliers devraient être posés d'ici la fin de l'année. Resteront les finitions et le dernier tronçon de la digue dont le début est attendu pour 2019. « On prévoit un retard estimé à deux ans et un dépassement du budget de 15 %. Cela reste raisonnable pour un chantier dont le coût est estimé à 1,65 Mrd € (financé par l'État et le Feder à hauteur d 'environ 900 M €) », évalue Dominique Fournel, vice-président de la Région en charge du projet depuis 2010. Quid de l'ancienne route une fois l'ouvrage terminé ? Plusieurs pistes sont envisagées, mais pas avant 2020.
