Interview

«Je coordonne les ouvriers sur les chantiers pour éviter tout risque de contact physique entre eux», Gilles Gal, architecte associé chez A+ Architecture

Agence montpelliéraine employant 90 salariés et réalisant un chiffre d’affaires de 8 millions d’euros, A+ Architecture compte plusieurs pôles, dont un spécialisé dans la direction de chantiers (maîtrise d’œuvre d’exécution, OPC, etc.). Il subit de plein fouet la crise sanitaire. Sur la trentaine de chantiers en cours, seuls trois sont restés ouverts. Bien avant la sortie du guide de l’OPPBTP, son directeur et architecte associé Gilles Gal a mis en place, avec les entreprises, le coordonnateur SPS et la maîtrise d’ouvrage, une organisation qui préserve au maximum la sécurité sanitaire des ouvriers.

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Gilles Gal, architecte associé et architecte associé chez A+ Architecture.

Quelle est la situation sur chacun des trois chantiers restés ouverts depuis le début du confinement ?

Ils se situent tous trois à Montpellier. Deux sont au stade de la finition : le pôle médical et la clinique Saint-Jean. Ce dernier occupait 140 personnes employées dans une trentaine d’entreprises. Le 18 mars, l’effectif est tombé à 35. Répartis dans la dizaine d’entreprises restantes, ces salariés étaient tous volontaires. Le troisième, la construction d’une halle des sports, se trouve au stade des travaux de second œuvre. Le risque y est moins important car il mobilise peu d’entreprises. Le 3 avril, il y avait six personnes présentes : une partie occupée à poser des revêtements de sols, l’autre des cloisons.

« Nous améliorerons nos dispositifs en fonction des préconisations du guide de l’OPPBTP »

Quelles mesures de sécurité avez-vous mis en place ?

Dès le début du confinement, suite à la diffusion de son plan général de coordination, le coordonnateur SPS a demandé aux entreprises de rédiger un additif au plan particulier de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) et de désigner chacune un référent Covid-19. Sur le chantier de la clinique Saint-Jean, le plus important en volume, l’entreprise de gros œuvre Bec Construction a mis à jour son plan d’installation de chantier avec des sens de circulation stricts. Par exemple, une cage d’escalier est réservée à la montée, une autre à la descente. Nous avons ensuite décidé de commander un service de nettoyage en continu et de désinfection des lieux de vie : réfectoires, vestiaires, sanitaires, baraquements, sol, murs, portes, poignées, équipements,  etc. En parallèle, nous avons fait poser huit points d’eau, tous équipés de savons, serviettes jetables, poubelles et gel hydro-alcoolique. Nous avons aussi fait enlever le tourniquet métallique à l’entrée pour éviter le risque de propagation du virus. A la place, nous avons convenu d’employer un vigile qui contrôle l’accès du personnel. Il est bien sûr masqué et ganté. En revanche, les ouvriers ne le sont pas tous, faute d’équipements disponibles. D’après nos informations, ils n’arriveront pas avant la mi-avril. Bien sûr, nous améliorerons ces dispositifs en fonction des préconisations du guide de l’OPPBTP.

Quel est votre rôle ?

J’ai plusieurs rôles : architecte, maître d’œuvre d’exécution, OPC, etc. Je n’impose rien. En revanche, je demande aux entreprises, qui continuent de travailler, de m’envoyer tous les jours la liste des ouvriers qui vont intervenir, quelles tâches leur seront affectées et à quel endroit ils vont travailler. En fonction de ces données, je les coordonne pour éviter tout risque de contact physique entre eux. Depuis le 2 avril, j’anime tous les matins une réunion avec tous les référents Covid-19 avec à l’ordre du jour : l’organisation des conditions de travail et la gestion des approvisionnements.

« J’ai pris conscience du risque pour ma santé »

Quel est votre état d’esprit ?

Je suis inquiet comme tout le monde. Au sein de l’agence, deux salariés sont malades. Aujourd’hui, j’ai passé trois heures sur le chantier. J’ai pris conscience du risque pour ma santé, même si nous faisons tous attention.

Et celui des entreprises ?

Elles craignent de ne pas bénéficier du dispositif de chômage partiel. Elles ont des carnets de commande remplis avec des chantiers à démarrer en septembre. Elles veulent avancer sur ceux en cours pour ne pas être débordées par la suite. Elles jouent le jeu en matière de sécurité. Mais elles ne sont pas à l’abri du droit de retrait de leurs salariés. Tant que nous ne serons pas sortis du confinement, nous fonctionnerons à effectif réduit. En effet, personne ne veut prendre le risque d’envoyer plus d’un salarié sur une nacelle. Sur la trentaine de chantiers que nous suivons, certains employaient des ouvriers détachés venus de Pologne, Espagne, Portugal. Ils sont retournés dans leur pays respectif. On ne sait pas quand ils pourront revenir en France. S’ajoute à cela la problématique des approvisionnements.

Quelle est la position des maîtres d’ouvrage ?

La majorité des chantiers que je suivais avant le 19 mars se sont arrêtés d’eux-mêmes suite à la décision des entreprises de suspendre leur activité. Très peu de maîtres d’ouvrage ont pris l’initiative via un ordre de services d’arrêt. Mais, globalement, tous sont compréhensifs. Par exemple, le groupe Cap Santé, maître d’ouvrage de la clinique Saint-Jean, va participer au financement des mesures de sécurité et de gardiennage.

D’ailleurs, où en est l’avancée des chantiers que vous avez pu poursuivre ?

On ne parle plus de délai...

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