La commission présidée par Christian Brossier a remis son rapport sur la politique à mener en matière « de dessertes alpines » au ministère des Transports. Sont prises en compte trois préoccupations : un trafic, en forte hausse d'ici à 2015 (+ 4 % par an, soit une multiplication par 2,5 de ce qui était prévu), les coûts considérables des projets envisagés - alors que l'argent public sera rare « au cours des vingt prochaines années » - et les grandes options d'infrastructures de nos voisins, italiens, suisses et autrichiens.
Sur le Lyon-Turin, il est urgent d'attendre
Au bilan, ses recommandations s'avèrent très prudentes. « Il convient de mener une veille active et continue. Nos positions visent à ménager l'avenir pour ne pas se trouver, le jour venu, devant des impossibilités ou des renchérissements dus à une imprévision dommageable », plaide Christian Brossier, lorsqu'on l'accuse de frilosité. De plus, il pense que les actuels tunnels routiers du Fréjus et du Mont-Blanc possèdent des réserves de capacité suffisantes (25 millions de tonnes aujourd'hui ; 60 millions en 2010) par rapport aux projections de trafic marchandises.
Il est vrai que, sur la plupart des projets de tunnels nouveaux, le rapport adopte un profil bas. Ainsi, les rapporteurs ne sont pas convaincus « de la pertinence de la liaison ferroviaire (TGV et fret) Lyon-Turin ». Les raisons ? Tout d'abord, les Suisses, bien plus avancés dans la voie du tout-fret ferroviaire, vont ouvrir deux nouveaux tunnels ferroviaires : sous le Saint-Gothard (ouverture en 2006) et sous le Löetschberg (2011). Les transferts de flux conséquents à ces ouvertures risquent de vider de tout trafic le projet Lyon-Turin. Partant, pourquoi tant de dépenses ? En effet, le Lyon-Turin nécessite encore six ans d'études et onze années de construction, pour une facture estimée à 90 milliards de francs. Or, l'investissement public va être soumis à de rudes pressions dans les vingt prochaines années. Motif technique enfin : « Le concept d'autoroute ferroviaire n'aura que quinze ans, au mieux, de durée de vie ; au-delà, le relais sera entièrement pris par le combiné non accompagné », note le rapport.
Bref, Lyon-Turin est trop risqué, trop lointain et trop cher (1). En revanche, le rapport propose d'améliorer le réseau ferroviaire existant : renforcement de la position française sur l'axe du Mont-Cenis, développement du fret avec une infrastructure ferroviaire lourde, entre Ambérieu et Turin, mise au gabarit B + de la ligne jusqu'à Turin et du tunnel du Fréjus (coût : 7 milliards), amélioration entre Culoz et Chambéry (avec une 3e voie dans la traversée de Chambéry), amélioration Montélian-Chambéry.
La connexion italo-suisse
Pour les voyageurs, il s'agit de créer une interconnexion avec le réseau suisse à hauteur de Bâle et de prolonger la ligne TGV entre Satolas et Saint-André-le-Gaz d'une part, et Lépin, de l'autre.
Liaison routière Nice-Turin : le projet de tunnel du Mercantour (rebaptisé tunnel de la Lombarde) entre Isola et Vinadio a été estimé à 8 milliards de francs (pour 2 milliards de recettes de péages). Le rapport demande sa mise à l'étude, mais recommande de reconstruire le tunnel voisin de Tende, dès le prochain contrat de plan (coût du rebutage : 800 millions) et de le maintenir hors péage. « L'objectif d'une meilleure liaison Nice-Turin reste intéressant, mais il devra être économiquement mieux assuré. Il ne nécessite qu'une liaison rapide (pour les seules voitures) qui pourrait être satisfaite par un tunnel plus haut, plus court et donc moins coûteux.»
Sur l'ex-A51 (Grenoble-Sisteron), projet d'autoroute «bloquée» , la commission recommande la remise à plat du dossier, sous dix-huit mois, mais pas sur la base du dossier d'enquête publique de juin 1997. Il faudrait donc étudier toutes les alternatives possibles (du passage par Lus-la-Croix-Haute à l'hypothèse d'une autoroute réservée aux voitures et aux aménagements de la RN75), y compris les dessertes de Gap et de Sisteron-La Saulce.
(1) Une position que ne suit pas le ministère qui fait de Lyon-Turin l'axe central de sa politique.
CARTE :
LES TROIS OPTIONS DE LYON AU SILLON-ALPIN : 1) Satolas/Chambéry N ., 2) Satolas/lépin-le-Lac, 3) Satolas/Combe de Savoie (cout) Source : Transalpes
Le rapport propose de régler la question du noeud ferroviaire de Chambéry et de réaliser la liaison TGV Satolas-Lépin.