Le 1er janvier 2024, vous avez officiellement pris la direction de l’Ecole d’architecture, de la ville et des territoires Paris-Est (ENSA de Paris-Est) à Champs-sur-Marne (Seine-et-Marne), établissement dans lequel vous officiez en tant que maître de conférences depuis 2016. Est-ce important à vos yeux de s'inscrire dans une certaine continuité ?
Oui, je ne serai pas devenu le directeur de cette école sans y avoir enseigné. Les instances élues début 2023, dont je faisais alors partie en tant que membre du conseil d’administration présidé par Pierre Alain Trévelo, portent un projet pédagogique et scientifique fédérateur dans lequel je me retrouve. Il comprend notamment la réforme environnementale des enseignements et le développement de la recherche. Diriger une école, ça n’est pas être seul à sa tête, mais entouré. Un vrai travail d’équipe !
Depuis mon arrivée en janvier, je fais le tour du personnel administratif pour mieux connaître leur travail quotidien et ajuster les futurs recrutements qui viendront parfaire le nouvel organigramme. J’imagine faire la même chose courant février avec les enseignants, les responsables des formations et les associations étudiantes, afin de comprendre la manière dont leurs idées de projets pédagogiques pourraient s’épanouir. Fort de ces discussions en interne, j’effectuerai en avril une tournée institutionnelle où je me ferai le porte-parole d’un certain nombre de priorités pour lesquelles j’irai développer des partenariats et négocier des moyens supplémentaires.
J'aimerai développer l’interdisciplinarité qui est à l’origine de l’école, en réactualisant le triptyque architecture, ville et territoire avec les défis écologiques à relever.
Quel bagage de maître de conférences emportez-vous dans votre bureau de directeur ?
Lorsque j’étais enseignant, j’ai porté la création - effective en novembre 2023 - d’une chaire sur la transition foncière, car parler de sols vivants dans un projet d’architecture, d’urbanisme et de territoire à l’heure du changement climatique me semble essentiel, et d’autant plus avec ma formation de paysagiste. Cette chaire finance et fédère un écosystème où les connaissances scientifiques en physique et biologie des sols croisent la mise en forme de l’espace, les choix techniques et esthétiques qui modèlent notre société.
Le dispositif « chaire » est intéressant par sa dimension partenariale. Elle n’aurait pas vu le jour sans le portage conjoint avec l’Ecole des ingénieurs de la Ville de Paris et le financement de l’Institut de la transition foncière, la Fondation de l’Université Gustave-Eiffel, et l’Institut pour la recherche de la Caisse des dépôts et consignations. En tant que directeur, j’aimerais que l’on continue à développer, avec des partenaires internationaux ciblés et exigeants, l’interdisciplinarité qui est à l’origine de l’école, en réactualisant le triptyque architecture, ville et territoire avec les défis écologiques que nous devons relever collectivement.
L’ENSA de Paris-Est fait partie depuis 2020 de l’Université Gustave-Eiffel, elle aussi située à Champs-sur-Marne. En quoi cette proximité géographique contribue-t-elle à élargir le champ des connaissances de vos quelque 700 étudiants ?
J’ai assisté à la naissance de l’Université Gustave-Eiffel en tant que référent sur la vie étudiante du campus de 2018 à 2020. Outre la mutualisation de certaines fonctions supports qui apportaient une qualité de vie à nos étudiants (sport, santé, etc.), j’ai alors vu tout le potentiel qu’elle offrait en termes de pédagogie et de recherche. Cette université ayant pour thématique la ville, ça avait du sens que l’ENSA de Paris-Est contribue à sa création et son développement.
Durant les trois années de mon mandat (renouvelable deux fois), il y aura des synergies à opérer entre nous pour former les penseurs et les praticiens de la transition écologique via la transformation de l’espace. Nous avons déjà des liens avec des laboratoires de recherche reconnus, dont les sujets peuvent nourrir le champ de l’architecture. Mais c’est encore trop timide, nous ne nous connaissons pas encore très bien ! De nombreuses collaborations sont à créer avec les disciplines telles que l’urbanisme, la géographie, mais aussi celles des sciences des matériaux, voire la sociologie, la philosophie, la littérature et l’économie. Tout cela est disponible sur les différents campus de l’Université.
Une école d’architecture est un service public qui œuvre pour le développement de son territoire.
Vous souhaitez ancrer davantage l’établissement dans son territoire. Comment ?
Une école d’architecture est un service public qui œuvre pour le développement de son territoire. Une des idées consisterait à créer un cycle de formation continue - adossé au travail pédagogique et de recherche de l’école sur les questions de culture architecturale, urbaine et territoriale - à destination de tous les élus, mais plus particulièrement ceux de l’est parisien (Champs-sur-Marne et son agglomération, la Seine-et-Marne, la Seine-Saint-Denis toute proche, etc.).
Nous souhaitons concevoir ce cycle avec nos partenaires locaux, le CAUE 77, la Drac, mais également en synergie avec les 20 écoles d’architecture afin de lui donner une ampleur nationale dans le cadre de la réactualisation de la Stratégie nationale pour l’architecture portée par le ministère de la Culture. Nous visons une mise en place aux prochaines élections municipales de 2026. Nous voudrions surtout dire aux élus, expérimentés ou nouvellement arrivés, qu’ils ne sont pas seuls face aux défis climatiques et environnementaux de notre société. Une école d’architecture se trouve sur leur territoire et ses enseignants-chercheurs et étudiants peuvent les accompagner en réalisant des projets pédagogiques et de recherche appliqués à leurs sites à enjeux.
Nous impliquons, par exemple, la commune de Pontault-Combault, en Seine-et-Marne, dans le projet de recherche FreshWay, financé par l’Ademe, sur les trajectoires possibles de rafraîchissement urbain. J’ai prévu d’aller à la rencontre d’autres élus du département et au-delà pour leur indiquer qu’ils peuvent aussi se tourner vers nous pour les épauler.
La loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture stipule que «la création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public». Alors soyons utiles !