Ecotaxe : Ségolène Royal « Chamboule-tout »

Les déclarations de Ségolène Royal remettant en cause complètement le principe de l’écotaxe chamboulent toute la classe politique française et l’administration européenne. Ayant fait fi  des travaux en cours de la commission parlementaire sur le sujet, cette dernière se voit contrainte de reporter la remise de ses conclusions.

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Le réseau routier taxable au titre de l'écotaxe poids lourds : en rouge le réseau national, en jaune les réseaux locaux.

La ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, a réaffirmé le 18 avril sur France 2 sa volonté de faire payer les camions étrangers circulant en France via une vignette payable à la frontière, une mesure destinée à se substituer au dispositif contesté de l'écotaxe, quitte à susciter l'ire de Bruxelles. Elle a ainsi réaffirmé son idée de forcer les camions étrangers à emprunter le réseau autoroutier à péage « lorsqu'il y a une autoroute parallèle à la route nationale », de façon à récupérer des bénéfices de ces sociétés autoroutières pour payer l’entretien des routes. Son argument : « Aujourd’hui, un camion venu de l'étranger peut traverser la France en faisant son plein en Belgique puis en Espagne tout en utilisant les routes payées par le contribuable français (...) et sans payer ni la taxe sur l'essence, la TIPP, ni le péage sur l'autoroute ».

Des élus interloqués

Si les Verts, via le sénateur Jean-Vincent Placé, ont qualifié « d'intéressantes » les pistes envisagées par la ministre de l'Ecologie Ségolène Royal de faire payer les camions étrangers circulant en France - via une "vignette" qui remplacerait l'écotaxe -, d’autres élus ont alerté sur les conséquences de ses déclarations. Nathalie Kosiuszko-Morizet,  qui était en poste au moment de la finalisation du contrat de l’écotaxe dont le principe a été adopté à la quasi-unanimité par le Parlement, a réagi le 16 avril sur RTL et lors de son audition devant la Commission sénatoriale d'enquête sur la mise en oeuvre de l'écotaxe poids lourds. L'ancienne ministre de l'Ecologie a estimé que l'idée de Ségolène Royal "peut paraître bonne sur le principe" mais "ne donne pas le bon signal en termes d'environnement" (un même tarif pour un passage ou pour plusieurs chaque semaine) (...) et est "irréalisable au regard du droit européen". « On ne peut pas, pour le même service ou pour le même usage de la route, faire payer différemment les camions français et étrangers. (…) Ségolène Royal se rendra vite compte de la complexité à la fois technique et juridique du problème, d'autant qu'il faudra trouver, d'une manière ou d'une autre le milliard d'euros nécessaire ». Un avis confirmé par Helen Kearns, porte-parole du commissaire européen chargé des Transports, Siim Kallas, au journal Le Monde : « Il est impossible de mettre en place un système discriminatoire entre Français et étrangers ».

De son côté, Bertrand Pancher, député UDI de la Meuse et membre de la commission du développement durable de l'Assemblée nationale, a prévenu dans un communiqué du 17 avril que sans écotaxe, « plus aucune nouvelle grande infrastructure ne sera réalisée dans notre pays ». Et appelé le Président de la République à « exiger de sa quatrième ministre de l'Ecologie qu'elle respecte un grand engagement environnemental et mette en place cette mesure de bon sens en tenant compte des préconisations du Parlement ». Enfin, lors d’un point presse sur le prochain Salon européen de la mobilité, le président du Groupement des autorités responsables des transports (GART) et maire PS de Strasbourg, Roland Ries, a rappelé l’urgence d’aboutir: « Nous ne sommes pas hostiles à une remise à plat, à condition qu’elle ne dure pas trop longtemps. Un ou deux mois, le temps de prendre connaissance du dossier. Mais pas un an ! Là ce serait une remise en cause… ». Car pendant ce temps, le financement des projets de transports (volet mobilité des contrats de plan, troisième appel à projets sur les transports en commun en site propre) est suspendu au sort de cette écotaxe.

Report des conclusions de la commission Chanteguet

De fait, Ségolène Royal a fait fi du travail engagé depuis cinq mois par la mission parlementaire d'information sur l'écotaxe poids-lourds, présidée par le député PS Jean-Paul Chanteguet et président de la commission du développement durable de l'Assemblée nationale. Cette commission s’est donc résolue, le 16 avril, à reporter de quelques semaines le rendu de son rapport et de ses recommandations, prévu initialement le 30 avril. Le temps d'auditionner la ministre de l'Ecologie et le ministre des Finances et des Comptes publics, Michel Sapin.

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