Baisse d'activité continue depuis quatre ans
Pourquoi avoir décidé une nouvelle organisation de l’activité routière du groupe Colas en France ?
Cela fait quatre ans que notre chiffre d’affaires se maintient. Mais, corrigé de l’inflation des coûts (augmentation des prix des matières premières, notamment du pétrole), cela correspond à une baisse d’activité de 4 à 5% par an. Ce qui signifie qu’en quatre ans, nous avons dû nous adapter à environ 15 à 20% de baisse d’activité. Aujourd’hui, nous devons gagner en agilité et en marge de manœuvre.
C’est par exemple déplacer des équipes ou encore regrouper des industries. La solidarité au sein de chacun de nos trois réseaux (Colas, Screg, Sacer) a bien fonctionné, mais nous avons maintenant atteint les limites de l’exercice. Quant à la solidarité entre marques, pour le matériel ou la sous-traitance par exemple, elle a égaIement beaucoup progressé mais elle est freinée par des lourdeurs, notamment sur le plan administratif, réglementaire, fiscal : il y a des refacturations à gérer, etc. Une seule société juridique par région au lieu de trois donnera de la souplesse pour les mouvements internes.
Vous avez déjà procédé à plusieurs reprises à des adaptations de votre organisation dans le sens d’une harmonisation…
Depuis que Sacer nous a rejoints en 1992 et Screg en 1996, nous avons peu à peu harmonisé certains processus et nous avons réglé des situations conflictuelles sur le territoire par des apports de fonds de commerce d’une marque à une autre. Il y a eu quelques fusions d’agences. Les industries (émulsions, enrobés) ont été majoritairement regroupées. Pour les carrières, des sociétés communes ont été créées. Un grand pas a également été franchi, il y a plusieurs années, avec la mise en place des Echangeurs. Dans ces centres de services partagés régionaux, communs aux trois marques, les services supports ont été mutualisés à 60 ou 70%. Les services juridiques et administratifs sont déjà unifiés. Restait à rassembler totalement les services commerciaux, techniques, communication, ou les ressources humaines. Nous ne pouvions le faire qu’en rassemblant nos marques. En revanche, notre fonctionnement décentralisé en réseau d’établissements restera inchangé. La nouvelle organisation vise seulement à simplifier la façon de travailler.
Jusqu’à aujourd’hui, trois établissements du groupe Colas pouvaient répondre à un même appel d’offres ?
Dans l’organisation actuelle, basée sur 16 filiales régionales en trois réseaux, chaque filiale est autonome et en concurrence avec les deux autres filiales régionalement compétentes. Donc, en chaque point du territoire, trois établissements du Groupe, un de chaque marque, peuvent déposer chacun une offre : avec trois directeurs d’agence et trois bureaux d’études différents, il y a, potentiellement, trois réponses.
En quoi va consister la nouvelle organisation de l’activité routière en France ?
A effet du 1er janvier 2013, l’organisation sera structurée autour de sept filiales Colas. Tous les établissements d’une même région, quelle que soit leur marque d’appartenance, seront ainsi regroupés au sein d’une seule filiale régionale Colas. Juridiquement, leur personnel, leur matériel et leurs marchés seront transférés à la filiale Colas concernée. Mais, physiquement, leurs moyens ne changeront pas. Les établissements resteront dans leurs locaux, avec leur personnel, leur matériel et leurs moyens d’étude et de réalisation. Colas restant propriétaire des marques Screg et Sacer, certains établissements conserveront leur marque : ce sera étudié au cas par cas, selon leur notoriété historique.
Quelle différence cela fera-t-il pour vos clients ?
Le principal changement, c’est qu’à un appel d’offres donné correspondra, à partir du 1er janvier prochain, une seule offre du groupe Colas, alors que jusqu’à présent il pouvait y en avoir trois. Pour le reste, c’est surtout l’environnement juridique qui est transformé, ce qui sera finalement peu visible, excepté sur les documents administratifs. En ce qui concerne les produits, nous gardons bien entendu notre portefeuille.
De nouvelles règles du jeu
Comment allez-vous choisir l’entité qui répondra à un appel d’offres?
L’arbitrage et la mise en place des règles du jeu seront dévolus aux directeurs régionaux. Il y en aura en moyenne deux par région administrative. Dans un premier temps, pour chaque appel d’offres, le directeur régional désignera l’établissement en charge de l’étude. Dans 80% des cas, la décision sera évidente mais, dans les cas plus complexes, il devra arbitrer. Ensuite, le directeur régional devra définir des zones d’expression géographique ou métier pertinentes pour chacune des agences.
Vous allez spécialiser les établissements par type de travaux ?
C’est une option. Si l’un est plus habitué à faire des gros travaux et l’autre des VRD par exemple, cela pourra déterminer le choix de celui qui répond. Le savoir-faire et le matériel de chacun seront également pris en compte.
Quel encadrement allez-vous mettre en place pour piloter cette nouvelle organisation ?
Les sept filiales régionales seront dirigées par sept PDG, épaulés chacun par un directeur général adjoint. Ces tandems auront à gérer entre 500 millions et un milliard d’euros de chiffre d’affaires. Ensuite, il y aura 4 à 5 directeurs régionaux par filiale.
Si vous faites désormais une seule réponse au lieu de trois aux appels d’offres, vos moyens d’études ne vont-ils pas être surdimensionnés ?
L’objectif de notre réorganisation est de gagner en efficacité. En termes d’études, cela signifie qu’au lieu d’étudier trois fois la même offre, nous allons soit en étudier plus, soit les étudier mieux. Nous ne voulons pas perdre de chiffre d’affaires !
Comment cette nouvelle organisation a-t-elle été accueillie par les instances représentatives du personnel?
Ce projet a été globalement bien compris, comme en attestent les résultats du vote : 20 CCE ou comités d’entreprise sur 21 instances consultées ont émis un avis favorable à une très large majorité.
Les salariés doivent-ils voir les prémices d’un plan social dans cette nouvelle organisation ?
Non. Dans l’état du marché actuel, nous sommes bien dimensionnés et nous avons besoin de l’ensemble de nos collaborateurs. Je rappelle que cette nouvelle organisation ne touche pas physiquement aux établissements, même s’ils peuvent être réorientés sur un territoire ou sur un type de travaux. De plus, elle va instaurer une nouvelle dynamique.
Comment jugez-vous la conjoncture économique actuelle ?
Nos clients principaux que sont les communes nous ont permis de maintenir jusqu’à présent notre niveau d’activité et de conserver un carnet de commandes élevé, même si des disparités persistent entre les grosses agglomérations, dynamiques, et les communes rurales. Le niveau des prix semble avoir atteint un plancher. Sur certains secteurs, les prix nous paraissent déraisonnables, nous avons donc cessé de répondre. Nous privilégions, en effet, le maintien de nos marges.