Chantier de l'autoroute A69 : le Sénat adopte la proposition de loi permettant une future reprise des travaux

Avec ce texte, le projet est reconnu comme répondant à une raison impérative d'intérêt public majeur (RIIPM) et valide ainsi des arrêtés permettant de déroger aux règles de protection de l’environnement et des espèces protégées afin de poursuivre et achever la liaison autoroutière entre Castres et Toulouse.

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Les parlementaires parviendront-ils à court-circuiter la suite de la procédure judiciaire entourant le projet de liaison autoroutière de 53 km entre Castres (Tarn) et Toulouse (Haute-Garonne), la fameuse A 69? Les deux sénateurs du Tarn, Marie-Lise Housseau et Philippe Folliot, ont en tout cas obtenu une première victoire en faisant adopter confortablement en première lecture au Sénat - 252 voix contre 33 - une proposition de loi dite de « validation ».

Concrètement, il s'agit d'entériner deux arrêtés relatif à l'autorisation environnementale du projet, au motif qu'il répond à une raison impérative d'intérêt public majeur (RIIPM), nécessaire pour justifier aux yeux de la justice les atteintes portées à l'environnement par un tel chantier. Rappelons que c'est l'invalidation, fin février, par le tribunal administratif de Toulouse, de l'arrêté préfectoral autorisant de telles atteintes qui avait provoqué l'arrêt du chantier.

« Nous faisons notre travail de parlementaire en proposant une porte de sortie pour faire en sorte d'arrêter cette situation ubuesque et stopper cette gabegie », a lancé M. Folliot pour justifier cette initiative. Avec ce vote, le Sénat répond « à une situation d'urgence » pour « éviter les conséquences dramatiques d'un arrêt du projet », a martelé le sénateur Horizons Franck Dhersin, rapporteur du texte.

En effet, les défenseurs du texte plaident pour le « désenclavement » d'un bassin d'environ 100 000 personnes (Castres-Mazamet) et veulent donner des perspectives aux acteurs économiques locaux. Or selon Marie-Lise Housseau, l'arrêt du projet, qui devait s'achever en 2025, entraînerait des « dommages irrémédiables tant sur le plan économique que sur le plan psychologique pour ce département (le Tarn, NDLR) qui se sent humilié, méprisé et nié dans ses choix de développement ».

Débats constitutionnels

Au-delà du bien-fondé du projet d'A69, les débats les plus nourris ont concerné la forme de cette initiative, avec de sérieuses interrogations sur sa conformité à la Constitution. « Le législateur crée un précédent grave en tentant d'influencer une Cour de justice », s'est alarmé l'écologiste Jacques Fernique, fustigeant une initiative qui « fait primer une volonté politique sur l'État de droit ».

A l'opposé, les soutiens du texte ont défendu leur démarche en listant méticuleusement les nombreux « motifs impérieux d'intérêt général » démontrant selon eux la conformité du texte à la loi fondamentale : socioéconomiques, politiques, environnementaux, relatifs aux finances publiques ou encore à la sécurité routière.

Mais certains législateurs n'ont pu masquer leur inconfort face à une proposition de loi au format inhabituel, débattue à quelques jours de l'examen par la cour administrative d'appel de Toulouse d'un premier recours contre l'arrêt des travaux, le 21 mai.

« Nous ne devons pas procéder à du cas par cas législatif », a reconnu le communiste Jean-Pierre Corbisez, pourtant favorable. Le Sénat « envoie un message trouble, celui d'un Parlement qui interviendrait pour sauver un projet en difficulté juridique », a abondé le socialiste Hervé Gillé, dont le groupe n'a pas participé au vote malgré quelques soutiens de sénateurs occitans.

Si plusieurs ministres ont salué ces derniers jours l'initiative, le gouvernement n'a pas pris position officiellement devant le Sénat, préférant un « avis de sagesse » pour « n'interférer ni dans la procédure juridictionnelle en cours, ni dans le travail parlementaire », a expliqué le ministre des Transports Philippe Tabarot. Mais « la position du gouvernement n'est plus à prouver sur la nécessité de cette autoroute », a-t-il pris soin de rappeler.

Les opposants au texte resteront aussi probablement minoritaires à l'Assemblée nationale, qui s'emparera du texte le 2 juin, mais leurs troupes y sont tout de même en nombre suffisant pour saisir le Conseil constitutionnel en vue d'obtenir la censure du texte. « Le Conseil sera évidemment saisi », a confirmé à l'AFP le sénateur écologiste Ronan Dantec, qui a dénonce « une loi de posture ».

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