« Qu’un nouveau pouvoir exécutif remette à plat un tel projet ne doit pas déclencher de réaction hostile», a d’emblée reconnu Philippe Marini, président de l’association Seine-Nord Europe et sénateur de l’Oise (UMP), à l’occasion d’un débat qui s’est tenu à Paris le 11 juillet à l’issue de l’assemblée générale de l’association. « Mais l’approche adoptée doit être réaliste. Il ne faut pas que ce soit un moyen de noyer le poisson pour ne pas le réaliser», a-t-il averti à l’endroit de son invité, le député PS Rémi Pauvros, chargé le 17 avril dernier par le ministre délégué chargé des Transports d’une mission de reconfiguration du projet de canal Seine-Nord Europe.
Deux constantes : un tracé inchangé et un gabarit européen
Sans préjuger de ses conclusions, qui doivent être remises en fin d’année après un pré-rapport attendu cet automne, Rémi Pauvros a toutefois souhaité répondre aux craintes exprimées par le président de l’association. « Je n’ai pas accepté cette mission pour procéder à un enterrement de première classe du canal », a-t-il indiqué. Comme pour montrer sa détermination à créer les conditions d’un arbitrage favorable du gouvernement, il a précisé son état d’esprit :
- Pas question de rouvrir la Déclaration d’utilité publique (DUP), par exemple en changeant le tracé, « sinon notre génération ne verra pas ce canal fonctionner ».
- Pas question de ne pas le faire au gabarit européen, « sinon on passe à côté de l’objectif fixé ».
- Pas question non plus d’opposer ce projet d’envergure nationale à d’autres. Dans la mesure où le projet lui-même et son financement ne sont pas calés, il a été volontairement écarté – tout comme la ligne ferroviaire Lyon-Turin – du périmètre d’étude de la commission Mobilité 21.
En revanche, il s’agit bien pour lui d’adapter le projet pour trouver des économies substantielles, sans toutefois remettre en cause sa vocation. « Des avenants à la DUP sont envisageables. Son objectif et son phasage doivent avant tout être clairement définis », a-t-il indiqué. Le député-maire de Maubeuge a par exemple laissé entendre que les plateformes pourraient ne pas être traitées de la même façon sur tout le parcours. « Elles devront en tous cas être pilotées par leurs utilisateurs », a-t-il lancé.
Large consensus et nouveau portage financier à trouver
« C’est l’intérêt économique du projet qui emportera la décision, j’en suis persuadé. C’est pourquoi il faut parvenir à un consensus sur la totalité du réseau évidemment, mais aussi jusqu’à Rouen, au Havre et à Paris, qui doivent être davantage impliqués. Il faut faire tomber les réticences et que chacun y trouve un intérêt. Je ne suis donc pas choqué que le Havre exige des investissements d’adaptation du port pour s’y préparer. »
Le député a également reconnu que sa nouvelle copie devrait préparer un portage financier différent. « Le partenariat public-privé est derrière nous. Mais l’Etat ne pourra pas le financer seul », a-t-il concédé. Une façon de dire qu’il faut profiter des taux d’intérêt très bas et du soutien des institutions européennes, qui pourrait passer de 300 millions à 1,5 milliard d’euros.
Une condition toutefois: « Cet investissement d’avenir par nature ne doit pas rater une fenêtre de tir unique : présenter le dossier à la Commission européenne au premier semestre 2014 ! », a rappelé le président de l’association Seine Nord Europe, Philippe Marini.