Par une application restrictive d’un droit de préemption portant sur des locaux commerciaux exploités dans l’immeuble vendu, les juges font échec à la division de l’immeuble et à la vente du lot loué au profit du locataire bénéficiaire de la clause.
Dans cette espèce, une clause d’un bail commercial prévoit un droit de préemption au profit du preneur en cas de vente par le bailleur des locaux objets du bail. Le bail fait également obligation au bailleur de fournir à cette occasion une copie de l’offre d’achat. L’immeuble dans lequel sont situés ces locaux commerciaux loués est vendu en totalité. Le preneur estimant que la vente s’est réalisée en fraude de son droit de préemption assigne le bailleur aux fins d’annulation de la vente.
Les juges du fond déboutent le preneur de ses demandes au motif que :
- Le droit de préférence est une limitation au droit de propriété et à la libre disposition de son bien. Il doit donc s’interpréter de manière restrictive. En l’espèce, la rédaction de la clause de préemption ne vise que les locaux loués. Par ailleurs, l’objet de la vente (la totalité de l’immeuble) étant différent de celui du droit de préemption (les seuls locaux loués), une interprétation plus large de la clause englobant la totalité de l’immeuble conduirait le bailleur à renoncer à une vente en bloc et l’obligerait à procéder à une division de son bien avant toute transaction alors que l’immeuble, objet de la vente, est une entité autonome.
- L’annulation de la vente nécessite pour le preneur de démontrer une fraude de l’acquéreur et/ou du bailleur qui auraient conclu une vente en bloc de manière artificielle pour faire échec au droit de préemption du preneur. En l’espèce, une telle faute n’est pas rapportée.
La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le preneur et fait sienne la motivation de la cour d’appel : « attendu qu'ayant relevé que (le preneur) entendait exercer son droit de préemption sur les seuls locaux objet du bail et retenu que l'application de la clause litigieuse ne saurait conduire à imposer aux propriétaires de diviser leur bien en vue de le céder à des personnes distinctes, la cour d'appel, (…) a pu en déduire, sans dénaturation, que la demande devait être rejetée ».
Cour de cassation, 3e civ, 9 avril 2014, Société Laboratoire Hépatoum c/M. et Mme X. et autres, n° 13-13949%%/MEDIA:1305984%%