L’utilisation d’eau usée recyclée pour l’arrosage des espaces verts dans les collectivités territoriales peut contribuer à réduire la consommation de la ressource en eau potable et répondre ainsi à une préoccupation quotidienne des gestionnaires, dans un contexte de sécheresse récurrente et de volonté de s’engager dans une démarche de développement durable de leurs territoires. Cette possibilité permet en effet de diminuer les rejets issus des stations d’épuration dans le milieu naturel ou de les différer dans le temps. Un atout particulièrement intéressant dans les villes touristiques qui voient leur consommation d’eau grimper en flèche à la belle saison, souvent à la suite de problèmes de saturation des équipements de traitement. Ainsi sur les zones côtières, l’écrêtage du rejet vers la mer des eaux usées recyclées permet d’améliorer la qualité des eaux de baignades et de réduire les risques sanitaires pour la pêche à pied et les activités conchylicoles. La réutilisation des eaux usées traitées est une pratique très répandue dans les pays touchés par des pénuries chroniques d’eau potable dans le bassin méditerranéen, en Asie, dans le golfe Persique ou dans certaines régions des Etats-Unis.
L’arrêtée du 2 août 2010.
La France, quant à elle, accuse un certain retard en la matière, sans doute lié à la relative abondance de la ressource, mais aussi à une absence de réglementation spécifique. L’arrêté du 2 août 2010 relatif à l’utilisation d’eaux issues du traitement d’épuration des eaux résiduaires urbaines pour l’irrigation de cultures ou d’espaces verts vient palier ce manque. Les eaux usées traitées sont « celles issues des stations d’épuration des eaux usées mentionnées au II de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales et celles issues des installations d’assainissement non collectif mentionnées au III de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales et dont la charge brute de pollution organique est supérieure à 1,2 kg de demande biologique en oxygène sur cinq jours (DBO5) par jour ». Cette réglementation impose de tenir compte de deux volets majeurs. Le premier est lié à la qualité physico-chimique de l’eau traitée. Les principaux paramètres visés sont la teneur en matières en suspension et la teneur en éléments nutritifs. En effet, si la teneur en particules en suspension s’avère importante, le réseau d’arrosage risque de s’encrasser.
Protection sanitaire.
Concernant les matières fertilisantes, il faudra tenir compte des quantités apportées pour ajuster le plan de fertilisation. L’autre aspect important de la réglementation concerne la protection sanitaire du public, des animaux, des productions agricoles et de l’environnement, avec une exigence élevée sur les niveaux de décontamination parasitologiques et bactériologiques. En effet, « les micro-organismes pathogènes ne sont généralement pas éliminés par les stations d’épurations classiques » soulignent les spécialistes de la société Aréo. Quatre niveaux de qualité ont été définis selon les usages, mais seul le niveau de qualité A (le plus élevé) est autorisé pour l’irrigation des espaces verts et des terrains de sports. Attention : tous les types d’espaces ne peuvent être concernés. La réglementation impose en effet que les terrains arrosés par aspersion aient une pente inférieure à 7 %, ce qui limite considérablement les « candidats ». En outre, l’arrosage doit se faire en dehors des heures d’ouvertures au public.
Programme de suivi.
Sur le plan administratif, le gestionnaire qui envisage d’utiliser des eaux usées traitées pour l’arrosage, devra s’armer de patience. En effet, dans le dossier de demande d’autorisation qu’il doit fournir à la préfecture, il lui faut notamment présenter un programme de suivi de la qualité des eaux pendant 6 mois consécutifs, comprenant une saison estivale. Il doit être mené à échelle réduite sur un terrain protégé de telle manière qu’aucun public n’y soit exposé. À la suite de l’examen du dossier et après avis de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire), la préfecture délivrera (ou non) l’autorisation. Il reste donc à souhaiter que la complexité de certains aspects de cette nouvelle réglementation ne décourage pas les collectivités territoriales qui désirent s’engager dans la voie de l’utilisation des eaux usées traitées pour l’arrosage, car elle constitue une alternative prometteuse pour la préservation des ressources naturelles de notre territoire.



